Le gouvernement s’est tardivement repositionné dans la gestion de la crise migratoire. Il a attendu d’être confronté à une véritable catastrophe humanitaire pour reconsidérer sa position sur l’accueil des réfugiés. Il était temps, car cette situation n’était pas digne de la France. En vue de démanteler les campements de fortune de Calais et de Paris, l’État organise désormais, dans l’urgence, l’hébergement des réfugiés dans des Centres d’Accueil et d’Orientation (CAO) un peu partout en France.
Mais cette opération d’une grande complexité est menée dans la précipitation et parfois dans l’improvisation. Des lieux d’accueil disponibles sont ciblés dans les régions et départements et les préfets ont la charge d’organiser concrètement l’arrivée des réfugiés en coopération avec des associations qui gèrent déjà d’autres types d’hébergements dédiés aux demandeurs d’asile. Les élus locaux informés souvent très tardivement sont pris de court.
Le temps manque pour organiser une véritable concertation et pour déployer auprès de la population les explications qui vont permettre d’accueillir dignement ces futurs arrivants. Dès lors, la situation est propice à l’expression très majoritaire d’une logique de refus. Le Front national est en embuscade. Il attise les haines en se livrant aux amalgames les plus honteux. La droite n’est pas en reste. Elle refuse ouvertement l’implantation de centres d’accueil en flattant les positions extrêmes d’hostilité et en surfant sur le désespoir des populations.
Avec partout la même démarche : l’extrême droite et la droite pétitionnent, manifestent, exigent des référendums. Ils instrumentalisent les peurs de notre société qui est travaillée en profondeur par les risques d’attentats terroristes, par le poids du chômage, par l’explosion de la précarité et par la crainte de devenir pauvre. Tout cela est propice au repli sur soi, au rejet de tout ce qui est perçu comme contraire à ses propres intérêts. Face à cette situation qui se développe dans la plupart des territoires où l’État implante un Centre d’accueil et d’orientation, l’enjeu est de parvenir à faire entendre la voix indispensable de l’accueil, de l’humanitaire et de la fraternité. D’abord en dénonçant les propos et les comportements violents inadmissibles et extrêmement dangereux qui se produisent un peu partout.
Des bâtiments sont incendiés, des élus et des citoyens qui expriment des avis favorables aux projets sont pris à partie jusqu’à recevoir des menaces de mort. Il est donc primordial de condamner fermement ces comportements dangereux qui ne sont pas tolérables dans un État de droit et il est vital qu’une très large majorité d’habitants et d’élus, attachée aux valeurs de la République, s’exprime dans ce sens afin d’isoler les auteurs de ces actes abjects.
Ensuite, en organisant la riposte. Car les forces qui considèrent que c’est l’honneur de notre pays d’accueillir, comme le prévoit le droit international, des populations que les guerres et les tragédies ont jetées sur les routes, sont bien présentes, prêtes à se mobiliser. Le village de Forges les Bains de 3600 habitants, voisin de celui dont je suis maire, a défrayé la chronique pendant plusieurs semaines au cours desquelles les forces hostiles à l’implantation d’un centre d’hébergement ont très largement dominé les débats.
Aujourd’hui, 44 réfugiés ont rejoint le CAO sur les 91 qui sont attendus. J’ai participé, il y a quelques jours, à une réunion organisée par la mairie et l’association Emmaüs en charge de l’organisation du centre. À cette occasion, plus de 120 personnes ont réfléchi ensemble aux initiatives à prendre pour réussir l’accueil des migrants. Une très belle initiative permettant à des dizaines de bénévoles d’accompagner le projet et capable de faire prévaloir, sur la durée, une logique d’accueil. Ce mouvement ne demande qu’à prendre force et à s’amplifier. Partout où les élus, les citoyens, les associations se mobilisent pour créer les conditions du meilleur accueil possible, les choses se passent bien. Saluons ici tous les élus locaux et les habitants qui s’investissent pleinement pour permettre un accueil apaisé des réfugiés dans leur collectivité. Ils sont l’honneur de notre pays, attachés à nos traditions d’accueil, à notre devoir de solidarité et à nos
valeurs de fraternité.