Avec la publication du décret sur l’organisation du temps scolaire, la réforme des rythmes à l’école maternelle et élémentaire est désormais engagée. Toutefois, la refondation de l’école ne doit pas se limiter à la seule question des rythmes hebdomadaires. Elle doit appréhender l’année scolaire dans sa globalité dans l’intérêt de l’enfant pour lui offrir de meilleures conditions d’apprentissage et donc favoriser la lutte contre l’échec scolaire et la réduction des inégalités.
L’angle pédagogique doit être privilégié et la question des rythmes ne peut résoudre à elle seule la mission de la réussite de tous. Dans le cadre de la Loi d’orientation et de programmation sur l’école, il faudra s’interroger aussi sur le contenu des programmes, reconsidérer la formation des enseignants et pour ce qui concerne les collectivités, clarifier les rôles respectifs de l’État et des Collectivités concernant le financement et des compétences afin de mettre un terme aux transferts des responsabilités non compensées. En effet, cette réforme impacte directement les collectivités locales tant au niveau organisationnel que financier. De nombreux maires nous ont d’ailleurs témoigné leur inquiétude légitime.
Les communes tenteront d’appliquer au mieux cette réforme, mais trop d’inconnues et d’obstacles se dressent devant elles tant les conditions de sa mise en œuvre sont imprécises. Le fonds prévu par l’État ne permet pas de couvrir l’intégralité des dépenses supplémentaires. Cette dotation sera versée uniquement pour la prochaine rentrée scolaire. Or, le coût sera supporté chaque année par les collectivités. Un simple calcul montre que la stricte application des barèmes d’aide financière aux communes pour les 6,7 millions d’élèves du primaire dépasse largement les 250 millions promis par l’État. Comment justifier qu’une réforme concernant notre jeunesse de manière structurelle ne soit pas l’objet d’un financement à la hauteur des ambitions ?
Est-il concevable qu’une commune ne pouvant commencer en 2013 soit pénalisée par l’absence de financement lors de la mise en route en 2014 ? Et le transport ou la restauration scolaire du mercredi ? Cela n’a pas été évalué concrètement ! Dans cette période de crise, nos communes doivent s’adapter à un contexte financier de plus en plus contraint. La rationalisation devient alors un enjeu majeur pour l’équilibre des budgets de nos collectivités qui se doivent d’administrer au mieux les ressources dont elles disposent, dans une logique d’optimisation des services publics rendus à la population. Le cas des activités pédagogiques complémentaires, APC, illustre le flou de cette réforme. Mais, seront-elles gratuites ou payantes ?
On touche à nouveau à l’inégalité de nos territoires puisqu’une commune qui ne pourra financer ces activités sera poussée à demander une contribution aux familles. Compte tenu du calendrier imposé par le gouvernement, il est impossible pour beaucoup de collectivités de formaliser un projet éducatif territorial de qualité, concerté et réfléchi. Les situations sont très diverses et s’il convient de ne pas entraver ceux qui pourront entrer dans le dispositif dès la prochaine rentrée, il est indispensable de laisser l’année 2013 aux autres pour trouver les conditions satisfaisantes au bon déroulement de cette nouvelle organisation en donnant du temps au temps, assurant le libre choix des élu(e)s du peuple. Il est en effet difficile de recruter des animateurs compétents.
L’abaissement temporaire des taux d’encadrements ne résout pas le casse-tête des maires pour trouver des personnes qualifiées pour venir travailler au maximum une heure par jour sur quatre jours dans des conditions d’encadrement moins sécurisées. Sous couvert de mieux pour nos enfants, nous créons du moins pour les parents, notamment pour les femmes qui seront de fait recrutées en priorité dans ses contrats précaires.
D’autres interrogations font surface : quelles solutions pour organiser des activités périscolaires de qualité ? Quels apprentissages peut-on conduire dans un temps aussi court d’accueil périscolaire ? Comment organiser des activités quand la commune ne dispose pas de salle à mettre à disposition ? Comment les collectivités vont-elles financer la formation, quand l’État incite à restreindre les dépenses publiques ? De même, comment vont-elles assumer ce que les conseils généraux n’accepteront pas ou plus dans la prise en charge des transports scolaires ? À l’aube d’un nouveau projet de décentralisation, cette réforme rejoint la question plus générale de la territorialisation et de l’égalité du service public de l’Éducation sur l’ensemble du pays.
Nous sommes d’accord pour refonder l’École, mais regrettons de ne pas retrouver dans le projet de loi les ambitions affichées. Nous invitons le gouvernement à écouter les maires et tous les partenaires pour qu’ensemble, nous élaborions le projet du 21e siècle dont notre école a besoin.