Dans le débat sur le CPE, l’autoritarisme de la majorité ne supporte plus la contradiction

Publié le 23 février 2006 à 11:09 Mise à jour le 8 avril 2015

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,

Mon rappel au règlement se fonde également sur l’organisation de nos travaux et plus particulièrement sur les conséquences sur les débats parlementaires de l’imbrication de la déclaration en urgence de ce projet de loi et l’application à l’Assemblée Nationale de l’article 49-3 de la Constitution.

Est-il concevable, M. le Ministre, mes chers collègues, que l’Assemblée Nationale, les députés, les représentants du peuple, élus au suffrage universel direct, ne soient jamais consultés sur la plupart des articles de ce projet de loi ?
En effet, la déclaration en urgence limite, comme le rappelait mon ami Roland MUZEAU, à une seule lecture l’examen dans chaque assemblée de ce texte.
Jamais les députés n’examineront les dispositions relatives aux stagiaires.

Jamais les députés n’examineront les dispositions relatives aux zones franches.
Jamais ils n’examineront les articles relatifs à la responsabilité parentale ou à la lutte, bien timide au demeurant, contre les discriminations.
Jamais ils ne pourront exercer leur droit constitutionnel d’amendement sur les 34 des 38 amendements qu’ils n’ont pas eu le loisir d’examiner.

Ce projet de loi préoccupe pourtant profondément la nation.
Au-delà de la mesure relative au CPE sur laquelle nous aurons l’occasion de revenir, des questions aussi primordiales que la formation, l’apprentissage ou la lutte contre les discriminations ne peuvent décemment pas être soustraites à l’examen des députés.

M. le Ministre, je demande solennellement au gouvernement, en espérant l’appui du Sénat tout entier, la levée de la déclaration en urgence sur le projet de loi relatif à l’égalité des chances.

La suppression de trois articles par la Commission des Lois démontre d’ailleurs la nécessité d’approfondir la réflexion.

Mes derniers mots concernent la tenue du débat au Sénat.
Je considère désagréable le soupçon systématique à l’égard de la gauche sénatoriale d’une volonté d’obstruction.
Certes, des amendements nombreux ont été déposés. Ils reflètent une opposition au texte proposé et une volonté de proposition, de montrer qu’une alternative à la politique libérale, destructrice du code du travail et du service public de l’éducation national peut être avancée.
Mais voilà, l’autoritarisme déjà évoqué ne supporte plus la contradiction.

Alors que le parlement devrait être comme il le fut le lieu où la confrontation des idées, l’affrontement idéologique même, se déroule, vous voulez le cantonner dans son rôle de chambre d’enregistrement, de parlement Godillot.
Avec mes amis du groupe communiste républicain et citoyen, mais aussi de toute la gauche sénatoriale, nous tenterons de sauver l’honneur du parlement et du Sénat lui-même, en permettant au débat démocratique d’avoir lieu.

C’est bien parce que nous souhaitons qu’il ait lieu demain à l’Assemblée Nationale que j’insiste pour que le gouvernement me réponde sur la levée de la déclaration en urgence.

Guy Fischer

Ancien sénateur du Rhône

Ses autres interventions :

Sur les mêmes sujets :

Emploi, salaires et retraites
Mouvements sociaux