Une politique de logement social étudiant ambitieuse pour permettre la réussite

Publié le 10 juin 2015 à 16:14 Mise à jour le 16 juin 2015

Alors que le nombre d’étudiants n’a cessé de croître (2,3 millions aujourd’hui, dont 12% d’étudiants étrangers), la construction et la rénovation des logements sociaux dédiés n’ont pas suivi cette dynamique. Le constat aujourd’hui est alarmant, seuls 7% des étudiants, au niveau national, ont accès à un logement social géré par un des CROUS (Centres Régionaux des Œuvres Universitaires et Scolaires) ou un organisme conventionné. Le dernier rapport de la Cour des Comptes faisait ainsi état de 162 457 chambres dans le pays, soit bien trop peu pour répondre aux besoins.

A ce chiffre, déjà faible, il faut ajouter une incontestable inégalité territoriale, particulièrement flagrante dans les grandes villes universitaires.

Les plans Anciaux et « 40 000 », lancés en 2004 et 2012 n’ont pas amélioré de façon suffisante la situation. Le premier n’a rempli que 53% de son objectif (26 400 logements sur les 50 000 initialement prévus). Le second, bien que démarré il y a peu, fait apparaître un certain nombre d’inquiétudes. L’engagement de 8000 nouvelles places annuelles n’est pour l’heure pas tenu. Plus inquiétant encore, les crédits dédiés, alloués aux Plans Etat/Régions ont été amputés de 14 millions d’euros pour cette année.

Les conséquences de cette situation sont nombreuses.
Pour les étudiants d’abord… Choix bloqués d’universités par absence de possibilité de mobilité, précarité financière, salariat étudiant accru avec tous les risques en matière de réussite que cela comporte… c’est le sort réservé à nos étudiants par défaut d’une politique audacieuse. Car lorsque nous parlons de logement étudiant, nous parlons du premier poste de dépenses de ces jeunes. Combien d’étudiants n’ont pas réellement pu choisir leur lieu d’études, voire même leur orientation, étant contraints de rester dans le giron familial ? c’est autant de vocations et de motivations gâchées…
Combien d’étudiants ont dû prendre un emploi pour financer leurs études ? Aujourd’hui près de la moitié des étudiants se salarie toute l’année (73% si l’on compte aussi les étudiants faisant de la vacation). Cet état de fait a des conséquences sur la réussite des études. L’INSEE a montré que les étudiants salariés réussissaient globalement moins bien (66% contre 49,3%). Cela ne date pas d’hier. Les gouvernements successifs ont ainsi construit de véritables parcours d’échec pour nos jeunes et au premier chef les plus fragiles économiquement…

Pour les CROUS et leurs salariés aussi, qui connaissent chaque année un véritable enfer. Le recrutement de vacataires pour assurer une partie des permanences physiques et téléphoniques ne suffit pas à combler le manque de moyens humains récurrent. Dans certains CROUS de ma connaissance, des politiques de seuils ont été mises en place pour limiter le nombre de demandes.
Dans certains CROUS surchargés, les étudiants dont la famille habite dans une ville limitrophe, quelque soit leur situation particulière, ne peuvent même pas prétendre accéder à une Cité U. Face à cette situation, tant pour les étudiants que pour les CROUS, une relance de la construction de logements étudiants ne pourra se faire sans un réinvestissement plus général dans les CROUS, permettant à ses salariés de bonnes conditions de travail et une bonne condition de service pour les étudiants résidants.

La question est donc celle-ci, Comment, alors même que les crédits dédiés à la construction ont été revus à la baisse, le gouvernement entend-t-il relancer les constructions et les rénovations de logements sociaux étudiants, dans le cadre du plan « 40 000 » ou du Plan de Vie Etudiante annoncé, afin d’assurer une offre décente aux étudiants en vue de favoriser leur réussite ?

Patrick Abate

Ancien sénateur de Moselle
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