Le Conseil constitutionnel vient de censurer l’article 107 de la loi de modernisation sociale tendant à rendre plus difficiles les « licenciements pour convenance boursière ». Cette décision, réclamée par la droite, donne satisfaction au Médef et encourage le cynisme des milieux financiers pour lesquels les salariés sont une simple variable d’ajustement. (Protestations à droite.)
J’ai déjà évoqué ici un exemple emblématique de cette pratique : je veux parler de la décision du groupe multinational B.S.N.-Glasspack, en avril 2001, de fermer V.M.C. verrerie de Givors et de licencier 880 personnes dans l’ensemble du groupe, alors qu’aucun argument économique ne justifie cette fermeture : le marché est en croissance, le niveau de rentabilité se situe à 15 %, l’outil de travail est performant. Ce plan vise exclusivement à favoriser les bénéfices des actionnaires, les fonds de pension anglo- saxons pour 56 % du capital et le groupe Danone pour 40 %. Un véritable coup boursier !
Dès l’annonce du projet de fermeture, le comité de soutien et l’intersyndicale C.G.T.-C.F.D.T. ont réalisé un document rassemblant des solutions économiques alternatives et ont organisé un référendum d’initiative sociale. J’ai moi- même sollicité l’intervention du Premier ministre, à plusieurs reprises.
Pour que le dispositif anti-licenciement voté par la représentation nationale soit réaffirmé, quelles mesures le gouvernement entend-il prendre afin d’empêcher la suppression des 880 emplois, dont le seul but est de garantir aux actionnaires une meilleure rentabilité financière, et pour permettre d’éviter, à l’avenir, de telles situations ? Si une mesure législative est urgente, à l’heure où le chômage est en hausse, c’est bien de stopper les licenciements boursiers. Il reste trois semaines au Parlement avant la suspension de ses travaux du fait des élections. Nous pouvons donc agir, mais il faut faire vite. (Applaudissements sur les bancs du groupe C.R.C.)
M. PIERRET, secrétaire d’État à l’industrie. Comme vous, le gouvernement pense que l’emploi ne doit pas servir de variable d’ajustement économique. Il a rappelé à B.S.N. ses responsabilités et j’ai reçu ses salariés à mon ministère à plusieurs reprises.
On ne peut ignorer les difficultés du secteur verrier. Reste que l’autorité judiciaire a annulé en juillet 2001 la procédure de licenciement du fait des engagements pris par B.S.N. Le groupe a entamé une nouvelle procédure ; nous verrons si l’autorité judiciaire la juge légale.
De nombreuses dispositions de la loi de modernisation sociale, validées par le Conseil constitutionnel, donnent de nouveaux pouvoirs aux comités d’entreprise, et notamment celui de saisir un médiateur. De plus les obligations de reclassement ont été significativement renforcées par la majorité de l’Assemblée nationale et notamment par votre groupe.
S’agissant de l’article 107, le gouvernement ne peut que prendre acte de la décision du Conseil constitutionnel qui par ailleurs et c’est un espoir a confirmé la jurisprudence de la Cour de cassation censurant « les licenciements dictés par la seule volonté de majorer les profits des actionnaires ». Le gouvernement veillera à ce que cela soit respecté. (Applaudissements sur les bancs socialistes.)