Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes Chers Collègues,
Mardi dernier, dans toute la France, les intermittents du spectacle étaient en grève, pour défendre leurs droits, pour préserver leur régime d’assurance chômage une nouvelle fois menacée par le MEDEF.
Si j’en crois certaines déclarations, les artistes, les techniciens du spectacle seraient les nouveaux privilégiés des temps modernes, coupables de tirer profit du régime d’intermittence et responsables tout trouvés de son déficit.
Or les intermittents ne font pas métier de leur intermittence. Ils sont acteurs, techniciens, musiciens.
Monsieur le Ministre, il n’y a pas trop d’artistes en France, trop de culture, il n’y en a pas assez. On nous dit souvent : tout cela coûte cher. Certains technocrates, certains comptables, supérieurs, arrogants et glacés parlent toujours du coût de la culture, mais se gardent bien de se poser la question du coût de l’absence de culture.
Le temps me manquerait mais permettez moi simplement que le régime des intermittents est l’indispensable complément de revenus qui permet aux artistes, aux techniciens de subsister ou de vivre de leur métier.
Ainsi la région Nord-Pas de Calais compte 3 000 artistes et techniciens répertoriés. Seuls 1330, moins de la moitié sont indemnisés et pour un quart d’entre eux, en dessous du SMIC. Les proportions sont identiques à l’échelle du pays.
Où sont donc les privilégiés ?
Faire disparaître ce régime spécifique et transférer les intermittents dans le statut de l’intérim comme le demande le MEDEF, avec un seuil minimum de 606 heures travaillées contre 507 actuellement, exclurait des milliers d’artistes et de techniciens des ASSEDIC. La proportion des salariés indemnisés tomberait à 30 % , portant ainsi un coup très important à la culture et à la création françaises.
Car n’oublions pas que le régime de l’intermittence est constitutif de la vie culturelle française. C’est lui qui permet à un nombre très important de compagnies, de théâtres de fonctionner, à de multiples spectacles, festivals d’exister. Les professionnels du spectacle ont des métiers dont les spécificités : ponctualité des projets, saisonnalité de l’activité, répétitions, travail créatif personnel, formation continue justifient un statut particulier qui n’a rien de commun avec celui des travailleurs intérimaires.
Au-delà de l’aspect comptable, c’est donc bien de la place et de la vitalité de la culture et de la création française, et de leur financement, qu’il s’agit.
Je suis aussi attentif que vous, Monsieur le Ministre, au bon usage des deniers publics. Dans le domaine culturel comme dans celui des aides à l’emploi accordées aux entreprises pour rester dans le domaine de l’actualité. Et peut être y aurait-il là quelques pistes à explorer pour rappeler le MEDEF à moins d’arrogance et à plus de modestie.
Cela étant le régime de l’intermittence a peut être besoin d’être réformé. Je rappelle quand même qu’un accord, que le MEDEF refuse d’appliquer, avait été trouvé en 2001 entre les employeurs et les organisations syndicales les plus représentatives. Si réforme il doit y avoir, ce doit être en tenant compte des spécificités du métier mais aussi dans le cadre plus général d’une réflexion sur le statut de l’artiste dans notre société. Il faudra bien un jour élaborer une loi-cadre sur la culture pour affermir et affiner l’exception culturelle française.
Monsieur le Ministre, la situation est aujourd’hui trop grave pour que les pouvoirs publics s’abstiennent.
Ma question est simple : qu’allez vous faire ?