Directeurs, professionnels exerçant dans les EHPAD, toutes et tous s’accordent à dire que le système est à bout de souffle.
Madame la ministre, nous vous avons auditionné il y a un mois en commission des affaires sociales sur la situation des EHPAD. Face à mes questions sur ces métiers majoritairement occupés par des femmes, peu valorisés, faiblement rémunérés, vous m’aviez notamment répondu que ces femmes peu qualifiées avaient peu de perspectives, et que si l’on voulait recruter des aides-soignantes, il fallait améliorer l’attractivité du métier et promouvoir la gestion des carrières.
Je suis tout à fait d’accord. Mais, en attendant, je souhaiterais que vous puissiez m’expliquer comment ces salariées, qui sont déjà débordées faute d’effectifs et dont la liste des tâches s’allonge, en particulier à cause de la suppression de nombreux contrats aidés, pourraient mettre en application les formations, très parcellaires, qu’elles reçoivent ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Cohen, vous avez parfaitement pointé la difficulté de recruter dans les EHPAD, notamment des personnels aides-soignants.
Le nombre de personnes qui s’engagent dans la formation d’aide-soignante a été divisé par quatre en quelques années. Il y a donc un véritable manque d’attractivité de ces métiers. Nous travaillons, au sein de mon ministère, sur la réévaluation du référentiel du métier d’aide-soignant, qui répond à un engagement ancien, et relançons les concertations sur ce sujet.
Au-delà des enjeux statutaires et des problèmes d’effectifs, la perspective de carrière des aides-soignantes est aujourd’hui très fermée. Nous nous sommes engagés auprès des professionnelles que nous avons consultées voilà quinze jours à faciliter les formations, afin de permettre les reconversions à mi-carrière.
Nous devons également mieux former les personnels chargés de l’encadrement de ces métiers, afin de nous assurer que ces fonctions d’encadrement soient également proposées à ces métiers. Cela permettrait une valorisation des métiers exercés au sein des EHPAD. Nous allons aussi construire un plan métiers et compétences, en lien avec le ministère du travail, les fédérations du secteur et les organismes de formation.
Nous prenons donc ce sujet à bras-le-corps, pour offrir à ces professionnelles des perspectives qui donnent envie, de nouveau, d’entrer dans ces carrières.
Certains ont également souligné la difficulté qu’il y a, pour des personnes de vingt ans, de s’engager dans une carrière d’aide-soignante et d’être confrontées aussi rapidement à la fin de vie. Nous devons, dans le cadre de la commission sur la qualité de vie au travail dans les EHPAD, réfléchir à la façon d’accompagner ces professionnelles qui doivent faire face quasiment chaque jour, alors qu’elles sont très jeunes, à des situations douloureuses.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.
Mme Laurence Cohen. Vos paroles, madame la ministre, entrent en écho avec notre expérience. Avec mes collègues du groupe CRCE et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine de l’Assemblée nationale, nous faisons le tour de France des hôpitaux et des EHPAD, et constatons qu’il y a une grande souffrance des personnels.
Le problème, c’est qu’il faut débloquer des moyens financiers et humains. Ce dont nous parlent les professionnelles, en plus des conditions de travail éprouvantes et épouvantables qu’elles subissent, c’est des troubles cognitifs et des cas de maladie d’Alzheimer, certains extrêmement lourds, dont souffrent les résidents ; or elles n’ont pas été formées pour y faire face. (Mme la ministre opine.)
Vos réponses ne correspondent pas aux réalités du terrain. Mettre en œuvre une politique de bientraitance envers nos aînés, c’est un choix de société, un choix politique qui doit être fait par le Gouvernement. Il implique de prévoir un nombre suffisant d’aides-soignantes, d’infirmières, mais également de kinésithérapeutes, d’orthophonistes... Il faut repenser ce système à bout de souffle !
Je suis ravie, madame la ministre, que vous mettiez en place des commissions et des référents, mais ces paroles sont loin de la mise en acte.