Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cela a été dit, mais je le répète, la première année des études de médecine est une catastrophe humaine et pédagogique !
Il s’agit d’une année inhumaine, qui a des conséquences terribles sur la santé des étudiants et des étudiantes. Notons que 70 % d’entre eux souffrent de symptômes dépressifs et que la consommation d’anxiolytiques ou de drogues est très élevée.
Sous la pression de cette hypersélection, les étudiants et les étudiantes achètent très majoritairement les services d’officines privées, pour des montants élevés – de 4 000 à 5 000 euros. C’est une forme de sélection sociale, qui exclut encore plus les étudiants aux revenus les plus modestes.
L’essentiel des candidats à la PACES provient de la série S, à l’exclusion de quasiment toutes les autres. Pourtant, le taux d’échec atteint 80 %.
La récente loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, dite ORE,…
M. Jacques Grosperrin. Une bonne loi !
M. Pierre Ouzoulias. … a ignoré cet immense gâchis, alors même que, selon les explications données par le Gouvernement, son objectif était justement de mettre fin à cet échec et d’offrir aux étudiants les mêmes droits pour tous, indépendamment de l’origine sociale.
Cet apparent paradoxe m’oblige donc à vous demander, madame la ministre, si la forme d’organisation de la PACES – son mode de sélection, le recours à l’offre privée, le numerus clausus – n’est pas une anticipation de ce que seront les autres années universitaires après la mise en œuvre de la loi ORE.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, je viens d’expliquer que nous allons travailler pour supprimer la PACES et le numerus clausus, que nous œuvrons à une diversification des profils et que nous cherchons à mettre un terme à la sélection effectivement assez inhumaine évoquée par vos soins.
D’ailleurs, de nombreux CHU ont mis en place des formations et des tutorats justement pour éviter que les étudiants ne s’inscrivent dans des formations privées. Cela s’est fait sur la base du volontariat et, en tant que professeur d’université, j’ai été de ceux qui formaient les étudiants de l’université de Paris-V à la PACES.
Votre propos va donc à l’encontre de tout ce que je viens d’annoncer en matière de diversification des profils ou encore de coup d’arrêt porté à ce concours butoir.
Aujourd’hui, des expérimentations sont en cours. La loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, dite ESR, avait ouvert la possibilité d’expérimenter des alternatives à l’accès aux études de médecine. Nous avons prolongé cette expérimentation jusqu’à la fin de l’année universitaire 2021 et favorisons le lancement de nouvelles expérimentations dans les facultés – quatre, me semble-t-il, seront engagées cette année.
Autrement dit, monsieur Ouzoulias, nous faisons exactement l’inverse de ce que vous décrivez !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour la réplique, en vingt-six secondes.
M. Pierre Ouzoulias. Pourquoi n’avons-nous rien fait dans le cadre de la loi que nous venons de voter, madame la ministre ? Si votre ambition était vraiment celle-là, nous aurions pu la concrétiser dans cette loi. Il n’en a rien été. C’est sans doute qu’un problème subsiste quelque part !