L’agriculture bio associée aux circuits courts nécessite moins de capital et est plus rentable

Femmes et agriculture

Publié le 20 février 2018 à 16:52 Mise à jour le 23 février 2018

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la délégation, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’organisation de ce débat et de ses riches travaux.

Vous me pardonnerez de m’éloigner légèrement des quarante préconisations pour aborder un autre sujet, celui des femmes et de l’agriculture biologique, que le rapport évoque sans l’approfondir, faute de données suffisantes. Néanmoins, le dernier recensement agricole de 2010, mentionné dans ce document, révèle que, parmi les exploitations agricoles gérées par des personnes de moins de quarante ans, 6,9 % d’exploitations certifiées bio sont gérées par des femmes, contre 5,3 % par des hommes. Dit autrement, cela signifie que, parmi les exploitants agricoles bio de moins de quarante ans, 56,6 % sont des exploitantes, contre 24 % dans l’ensemble de la filière.

Les pistes d’explication pour décrire ce phénomène sont balbutiantes, et la Fédération nationale d’agriculture biologique enquête actuellement sur ce sujet. Les résultats de ce travail seront présentés à l’occasion d’un colloque le 10 avril prochain. Aussi, pour éviter de tomber dans le stéréotype de genre, nous nous concentrerons sur les facteurs socio-économiques, plus objectifs.

Ainsi, 30 % à 50 % des agriculteurs et agricultrices bio se lancent hors cadre familial. Nous connaissons tous le problème de l’accès au foncier. Il est bien plus aisé, pour commencer, d’acquérir une petite parcelle plutôt qu’une exploitation importante. Or, sur de petites surfaces, le bio, associé aux circuits courts, est bien plus rentable que le conventionnel.

L’agriculture bio est également nettement moins mécanisée, ce qui nécessite un apport en capital moindre. L’activité est plus facilement diversifiable – agrotourisme, vente directe – pour accroître sa rentabilité.

On le voit, sans même prendre en compte d’autres considérations telles que la santé, le respect de la terre ou la qualité des produits, il est moins coûteux de se lancer en bio. Cet intérêt économique se traduit manifestement par un bien meilleur accès des femmes au statut d’exploitante.

Madame la secrétaire d’État, partagez-vous ce constat ? Afin d’atténuer les inégalités de sexe, peut-on compter sur votre concours pour défendre, au sein du Gouvernement, un soutien durable à l’agriculture biologique et une politique foncière favorisant l’accès à la terre de nouvelles arrivantes ou arrivants ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes. Je partage votre constat, monsieur le sénateur, s’agissant du lien entre agriculture bio et lutte contre les stéréotypes de genre, si l’on peut le formuler de cette manière.

Vous avez raison, les femmes s’engagent tout particulièrement dans l’agriculture biologique. D’ailleurs, les exploitations agricoles que j’ai eu l’occasion de visiter depuis que je suis en poste en tant que secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et qui sont dirigées par des femmes sont des exploitations en agriculture biologique.

Il semble y avoir plusieurs raisons à une telle situation. Nous n’aurons pas le temps de les développer cet après-midi, mais je note la date du colloque que vous avez mentionné. Je rappelle simplement l’existence de VIVEA, le fonds pour la formation des entrepreneurs du vivant, qui s’engage à accompagner les agriculteurs et agricultrices vers l’agriculture biologique.

Vous avez indiqué ne pas vouloir détailler toutes les questions liées à l’agriculture biologique, et notamment celle de la santé. Je rappelle cependant l’existence du plan Ecophyto 2+, qui vise à réduire l’utilisation des produits dangereux et à supprimer celle des produits les plus dangereux pour les exploitations agricoles. Cette question est liée à celle que vous avez évoquée. Elle peut motiver les femmes agricultrices à se lancer dans la création ou la reprise d’une exploitation agricole biologique.

Par ailleurs, des travaux sont en cours concernant les emballages des produits agricoles, notamment des pesticides, afin, d’une part, de réduire considérablement leur taille et, d’autre part, de permettre l’incorporation, très technique, des produits dans le pulvérisateur, sans avoir à soulever ou ouvrir le bidon. Le dispositif – un système de transfert sans contact – permettra en outre de limiter drastiquement l’exposition aux substances chimiques dangereuses. Car les conséquences sur la santé des agricultrices sont parfois plus importantes, même si l’évolution de ces protections est souhaitable pour les femmes comme pour les hommes dans les exploitations agricoles.

Guillaume Gontard

Sénateur de l'Isère
Contacter par E-mail

Ses autres interventions :

Sur le même sujet :

Agriculture et pêche