En réalité, la participation est une rémunération aléatoire et discrétionnaire

Participation dans l'entreprise

Publié le 25 octobre 2017 à 18:10 Mise à jour le 26 octobre 2017

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis le début de notre jeu de questions-réponses, la participation dans l’entreprise est présentée comme un modèle vertueux qui permettrait de faire profiter les salariés des richesses créées par leur entreprise. Je voudrais m’associer à mon collègue Dominique Watrin pour regretter que l’on n’ait pas pu parler de la participation comme droit démocratique nouveau accordé aux salariés.

Je voudrais également soulever un paradoxe : aujourd’hui, le choix de cette participation justifie ou occulte pour une part le refus des employeurs de revaloriser les salaires de manière importante, tout comme, d’ailleurs, celui de l’État d’augmenter le montant du point d’indice pour les fonctionnaires.
Si la rémunération des salariés augmente par le truchement des primes liées à la participation aux résultats des entreprises, il n’est pas inutile de préciser qu’elles sont exemptes de cotisations sociales.

À l’heure des saignées budgétaires dans le domaine de la santé, singulièrement au détriment des hôpitaux, on peut s’interroger sur cette exonération des entreprises concernant le financement de la sécurité sociale, d’autant que, contrairement aux salaires, les sommes versées au titre de la participation ne sont pas non plus prises en compte pour le calcul de la retraite des salariés. En réalité, la participation est une rémunération aléatoire, discrétionnaire, dont les résultats dépendent du bon vouloir des dirigeants des entreprises.

Par exemple, alors que les salariés participent au quotidien à la production des richesses, leurs salaires ne vont augmenter que de 1,8 % en 2017, tandis que les entreprises du CAC 40 ont réalisé 50 milliards d’euros de bénéfices au premier semestre 2017, soit une hausse de 24 % par rapport à 2016.
N’y a-t-il pas, monsieur le secrétaire d’État, une forme d’hypocrisie à geler les salaires des fonctionnaires et le SMIC tout en encourageant la participation dans l’entreprise ? (M. Dominique Watrin applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Je constate qu’il y a encore des antagonismes entre, d’un côté, la fonction publique, et, de l’autre, les salariés, comme si nous avions deux France qui ne se parlent pas, même si je pense que telle n’est pas réellement votre vision, madame la sénatrice.

J’assume parfaitement le fait que la participation permette à des salariés d’avoir des revenus importants. Dans certaines entreprises, des mécanismes de répartition et de participation originaux ont été mis en place tout en bas de l’échelle des salaires, avec une clé de répartition non pas égalitaire, mais quasiment. Ainsi, le cadre supérieur et une personne ayant une fonction support bénéficient à la fin de la même chose.

Plus largement se pose la question, déjà évoquée tout à l’heure, de la révision de la formule du calcul de la participation pour en faire un instrument plus juste et plus équitable de répartition des fruits du résultat de l’entreprise. À la fin, quand l’entreprise est bénéficiaire, qu’elle a des résultats importants, c’est grâce à la totalité des personnes qui la composent.

Nous sommes ouverts à une réflexion qui permettrait une répartition plus juste entre les différentes échelles de la grille salariale dans l’entreprise, les fonctions dites support devenant autant bénéficiaires que les autres. Je dois vous dire que j’ai connu ce cas de figure, quand j’ai travaillé pour un fameux grand groupe du CAC 40 souvent pointé du doigt, où des mécanismes de participation conduisent à des montants relativement différents selon les fonctions occupées dans l’entreprise. Je pense que l’on peut travailler à y remédier, de manière sereine, sans opposer le monde de la fonction publique et celui du salariat.

Enfin, ouvrir la question de la participation et de l’intéressement dans la fonction publique est aussi, sans doute, un moyen de la faire évoluer, de la moderniser, d’y attirer des nouveaux talents, et de changer le rapport à leur métier de nos millions de fonctionnaires, dont chacun, j’en suis certain, salue ici le dévouement.

Laurence Cohen

Sénatrice du Val-de-Marne
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