Comment garantir que les obligations vertes ne sont pas une escroquerie ?

COP 23

Publié le 13 décembre 2017 à 10:57 Mise à jour le 19 décembre 2017

Madame la secrétaire d’État, il y avait quelque chose de tout à la fois encourageant et curieux de voir tant de grands acteurs de la finance mondialisée réunis hier à Paris pour évoquer le financement de la transition énergétique.

Encourageant, car cette rencontre, même si on ne comprend pas bien pourquoi elle ne pouvait pas se tenir dans le cadre de la COP23, le mois dernier, n’a guère de précédent.

Curieux, car il est difficile de concevoir que la grande finance, principale responsable du dérèglement climatique, puisse contribuer sans règle à sa résorption. En effet, si la planète est aujourd’hui à ce point en péril, c’est la conséquence directe de la recherche permanente de la rentabilité, de l’hyperfinanciarisation de notre économie et de la marchandisation du vivant.
Madame la secrétaire d’État, si nous savons bien qu’aucun espoir ne sera permis sans une mobilisation de toutes et tous, en particulier des acteurs économiques, vous comprendrez aisément les réserves que nous inspire cette finance dite « verte ». Nos doutes ont été confortés par le rapport rendu public par l’association ATTAC, confirmant que ces obligations vertes, les green bonds, relèvent trop souvent de l’escroquerie.

En effet, aujourd’hui, rien ne garantit que ces investissements soient climato-compatibles. Ces obligations ne sont ni contrôlées ni régulées. Il en est ainsi des obligations émises par Repsol, multinationale du pétrole, qui visent en réalité à prolonger la durée de vie des raffineries de cette entreprise, ou encore de celles émises par Engie, qui ont servi à financer la construction de barrages en Amazonie, au détriment des écosystèmes locaux et des populations. Les États ne sont pas en reste, puisque la Pologne ou encore le Mexique ont utilisé ce dispositif.

Seulement 25 % de ces obligations sont aujourd’hui certifiées, c’est-à-dire répondent directement à leur objectif premier de préservation de l’environnement. C’est peu.

Madame la secrétaire d’État, quelles mesures pensez-vous pouvoir prendre pour nous garantir que, demain, les obligations vertes correspondront non pas à une vaste opération de greenwashing, mais bien à des investissements réels en faveur de la transition écologique ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur, si le One Planet Summit n’a pas eu lieu dans le cadre des négociations conventionnelles de l’ONU, c’est parce qu’il s’agit de deux choses complètement différentes.

Les négociations conventionnelles de l’ONU, qui sont absolument
fondamentales, posent le cadre de la collaboration internationale et fixent les objectifs à atteindre. Vous savez à quel point l’accord de Paris est important ; il faut célébrer sa conclusion.

Maintenant que nous avons fixé l’objectif, il faut se mettre en marche et trouver la meilleure route pour l’atteindre. Nous faire entrer de plain-pied dans l’action, c’est exactement l’objet du One Planet Summit, auquel ont participé de nombreux chefs d’État.

C’est justement la recherche du profit qui permettra à la grande finance, pour reprendre vos termes, de s’engager résolument dans le financement de l’économie verte. En effet, si nous instaurons la transparence sur les risques climatiques, quel investisseur participera à un projet néfaste pour l’environnement ? C’est tout l’enjeu de la transparence sur les risques climatiques.

Concernant les obligations vertes, il s’agit d’une initiative récente, appelée à se massifier et à changer d’échelle. Elles rencontrent d’ailleurs déjà un énorme succès. Nous nous attachons à promouvoir des standards, à faire prévaloir la rigueur. J’ai ainsi récemment présidé un groupe de travail sur l’évaluation des obligations vertes, qui vise à définir des standards, pour la France mais aussi à l’échelon européen, afin que, lorsque nous parlons de projets respectueux de l’environnement, nous parlions tous de la même chose et évitions le greenwashing.

Guillaume Gontard

Sénateur de l'Isère
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