pénalisation de la contestation des génocides

Publié le 24 mai 2006 à 10:54 Mise à jour le 1er avril 2015

A l’attention du Président du CCAF MARSEILLE

Monsieur le Président,

Par la présente, je vous confirme que je ne pourrai pas participer au debriefing que vous organisez le 29 mai prochain, étant retenu par une initiative du forum social du 13ème Arr. qui se tiendra à la même heure.

Je profite de cette occasion pour vous faire connaître ma réflexion sur la proposition de loi de Didier MIGAUD, examinée ce jeudi 18 mai à l’Assemblée Nationale.

Alors que cette initiative aurait pu faire date, d’un point de vue historique et législatif, elle est un échec à plus d’un titre. Echec de la procédure, échec quant à sa finalité, et mise en échec de la crédibilité du Parlement.

Nous avons assisté à un déni de démocratie motivé pour l’essentiel par des intérêts commerciaux, voire des pressions politiques d’un autre temps. Autant d’arguments fallacieux qui ne mettent pas à l’honneur la France et son Gouvernement.

Pour autant, si la méthode choisie pour censurer le débat a pu surprendre, l’issue était somme tout prévisible. En effet, les discussions menées au sein du groupe de travail que vous aviez mis en place avaient permis de définir précisément, dès le début de nos travaux, les écueils qu’il fallait à tout prix éviter pour parvenir à l’objectif que nous nous étions donné, notamment :

  • ne pas focaliser sur le seul génocide arménien afin d’éviter les foudres des lobbies turcs ;
  • ne pas appréhender la question de la négation d’un génocide sous l’angle de la loi Gayssot, lequel est réducteur puisque relatif à la presse et sans portée universelle.
  • obtenir le consensus le plus large possible au sein des groupes parlementaires des deux Assemblées.

Dès lors, il convenait d’aborder le négationnisme par le droit pénal général comme délit accessoire au crime de génocide, et non comme délit autonome du droit pénal spécial à la presse.

Et seule une position consensuelle sur un texte dénué de finalité communautarisme pouvait escompter une issue favorable. Les précédents nous l’ont maintes fois démontré. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous avions opté pour un texte relatif à « l’incrimination pénale de la contestation publique des crimes contre l’humanité ».

A ce titre d’aucun ne peut prétendre être surpris de la situation de blocage à laquelle nous avons assisté jeudi, sauf à croire qu’il était possible de passer de force.

Au-delà de la déception occasionnée par le report du vote de cette proposition de loi, au-delà de la déconvenue suscitée par le déroulement des débats, il est à craindre que nous soyons en plus dans l’impasse la plus totale.

En effet, il faut s’attendre à ce que le Gouvernement ne souhaite pas essuyer un nouveau revers. Les réfractaires à une pénalisation du négationnisme du génocide arménien de 1915 vont avoir tout le loisir de s’organiser d’ici la prochaine session parlementaire pour empêcher l’inscription d’un tel texte à l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale très certainement, du Sénat à coup sûr.
Et par incidence, cette situation ne pourra qu’occasionner un contexte de tensions, voire de d’affrontements à l’approche des élections présidentielles.

Néanmoins, en vue d’envisager de poursuivre ou non l’action menée par l’Appel des 5, je souhaiterai, si cela est possible, pouvoir disposer d’un compte-rendu des propositions avancées ce 29 mai.

Dans cette attente,
Et restant à votre disposition,

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’assurance de mes sincères salutations.

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