Monsieur le Maire,
Sénateur du Val-de-Marne et Vice-président de la Délégation Sénatoriale aux Collectivités Territoriales, je suis d’abord un élu local, attaché à notre département, à nos communes et à leurs services publics. Il m’a semblé ainsi indispensable d’échanger avec vous à propos des finances locales, et particulièrement des réformes qui, au travers du Projet de Loi de Finances pour 2018, viennent d’être votées par le Sénat.
Il y a derrière les politiques gouvernementales, une volonté d’affaiblir les moyens de l’action publique locale, et une remise en cause de l’autonomie financière des Collectivités. C’est pourquoi je vous informe avoir voté contre le Projet de Loi de Finances pour 2018.
Plus que jamais, la situation actuelle appelle à une action commune des élues et élus locaux, comme nationaux, à une mobilisation qui je crois pourra d’autant plus être efficace si elle est collective. C’est tout l’objet de mon courrier.
- Concernant la dotation globale de fonctionnement (DGF) et les moyens des services publics locaux.
Ces trois dernières années, les collectivités territoriales ont perdu 11 milliards d’euros via la baisse de la DGF. Et si les concours financiers directs de l’Etat sont stables pour 2018, d’autres coûts annexes risquent d’affecter durablement les services publics locaux. Je pense particulièrement à la baisse du budget du logement social. Celle-ci représente 70 millions d’euros en moins pour les Offices Publics de l’Habitat du Val-de-Marne. Je voudrais souligner la forte mobilisation des acteurs Val-de-Marnais du logement social qui, aux côtés des associations d’usagers et des élus locaux, se rassemblent pour élaborer d’autres propositions
En Val-de-Marne, je pense aussi aux services publics de santé qui sont menacés, et en tout premier lieu au service de chirurgie hépatique de l’Hôpital Henri Mondor. L’ensemble des parlementaires et des élus locaux du département sont mobilisés aux côtés de la coordination de vigilance Mondor, une même mobilisation qui en 2011 avait gagné le combat pour maintenir en place le service de chirurgie cardiaque de l’Hôpital.
- Concernant la perte d’autonomie financière des communes.
Afin que soient effectives les baisses budgétaires prévues sur ces 5 prochaines années (13 milliards d’euros), l’exécutif veut en venir à une politique "contractuelle" avec les 319 collectivités les plus importantes de France : le gouvernement accepterait de ne pas procéder à une baisse directe des dotations, en échange d’une coupe "volontaire" dans les dépenses de fonctionnement. Dans tous les cas, il y a une baisse des moyens de l’action publique, mais aussi une atteinte à l’autonomie financières des collectivités. Seront concernés le Conseil Départemental du Val-de-Marne et les plus grandes communes de notre département, alors que les besoins sociaux y sont de plus en plus importants.
- Concernant la taxe d’habitation et la fiscalité locale.
Sénateur membre de la commission des finances, il m’a été confié la rédaction du rapport parlementaire sur les "dégrèvements et remboursements d’impôt ». Dans ce rapport je dénonce avec fermeté cette mesure qui, pour les communes du Val-de-Marne, représente le gel de 253 millions d’euros de financements à partir de 2020 ! Ce montant phénoménal équivaut au coût de construction de 25 écoles par an ou de 72 crèches.
Le 22 novembre, j’ai interrogé la Ministre des Collectivités Territoriales Mme Jacqueline Gourault pour défendre les communes de notre département. Elle a confirmé mes inquiétudes quant au fait que pour l’après 2020, le gouvernement n’a pas pour le moment prévu de dégrèvement pour pallier à la perte des recettes des Collectivités.
Le 28 novembre, le Sénat a voté la suppression de la réforme de la taxe d’habitation. Les Sénateurs Communistes, Républicains, Citoyens et Ecologistes ont eu la position suivante : la majorité présidentielle et la majorité sénatoriale prennent les français en étau. D’un côté la majorité présidentielle augmente le pouvoir d’achat des français... en leur supprimant, à terme, des services publics. De l’autre côté, la majorité sénatoriale propose de conserver un impôt injuste. Au final, aucune de ces propositions n’est satisfaisante.
Il faut le dire aux françaises et aux français, un choix politique est possible : oui, il est possible d’augmenter le pouvoir d’achat des gens, sans supprimer, et même en développant les services publics. Pour cela, il convient d’élaborer une réforme générale de la taxe d’habitation et de la taxe foncière qui passe par une révision générale des valeurs locatives ; cela permettrait d’avoir une imposition plus juste.
De plus, les collectivités locales ont perdu une partie importante de leurs recettes avec la suppression de la taxe professionnelle ; il faut donc réintroduire un impôt local sur les entreprises sans revenir pour autant à la taxe professionnelle qui comportait de nombreux défauts.
Quoi qu’il en soit, je me tiens entièrement disponible pour recevoir, Monsieur le Maire, vos propositions de réformes de la fiscalité locale. Il est indispensable que celles-ci viennent des élus locaux, et je m’engage à mettre vos réflexions sur la table des débats du Sénat.
- Concernant les nouvelles recettes des collectivités.
Au nom du groupe des Sénateurs Communistes, Républicains, Citoyens et Ecologistes, voici les propositions que j’ai faites au Sénat en ce qui concerne spécifiquement les recettes des collectivités :
1 - J’ai d’abord proposé avec mon groupe d’augmenter de 4 milliards d’euros la dotation globale de fonctionnement pour cette année afin de compenser les années de réduction.
2 - Ensuite, et pour reprendre les propositions des 800 élus locaux du Val-de-Marne et d’autres départements qui ont lancé "l’appel de Grigny", j’ai demandé que soit revalorisée à hauteur 90 millions d’euros chaque dotation de solidarité aux communes, et que soit créé un fond spécial destiné aux quartiers politiques de la ville, d’un minimum de 100 millions d’euros.
3 - J’ai également déposé un amendement afin que soit sanctuarisée la compensation de ce qui constitue la réforme de feu la taxe professionnelle. Cette compensation a une importance cruciale dans les finances des communes des anciens bassins industriels, notre département compris.
Ces trois propositions sont pour le moment en suspend, mais plus la mobilisation sera large pour les porter et ouvrir un rapport de force, plus elles auront des chances d’être votées lors de prochains débats.
4 - Je me réjouis toutefois que l’amendement 262 que j’ai déposé ait été adopté. Celui-ci supprime la minoration des fonds départementaux de péréquation de taxe professionnelle, ce qui majore la dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de taxe professionnelle de 65,8 ME.
5 - Enfin, et en tant que rapporteur au Sénat de la mission "remboursements et dégrèvements", j’ai demandé à ce que le contrôle et le traçage des Crédits Impôts Compétitivité Emploi (CICE) et Crédit Impôt Recherche (CIR) soient effectifs. Selon le comité de suivi, les résultats ne sont pas au rendez-vous. Ceci, en terme de créations d’emplois comme d’investissements économiques. Au total, ces crédits représentent 27 milliards d’euros de manque à gagner pour les recettes de l’Etat et des Collectivités.
Je compte proposer dans les prochains mois qu’une réelle enquête puisse être menée à ce sujet et que cet argent puisse être en partie réorienter pour redonner un nouveau souffle aux finances locales. J’entends ainsi vous solliciter lorsque les premiers travaux seront ouverts à ce sujet.
Voilà, en quelques mots, l’actualité parlementaire concernant les finances des collectivités, et en premier lieu, des communes. Beaucoup d’élus Val-de-Marnaises et Val-de-Marnais m’ont exprimé leurs inquiétudes, que je partage entièrement. Mais aucun ne se résigne à un affaiblissement de l’apport démocratique, social et économique des Collectivités Territoriales.
Bien au contraire, dans le Val-de-Marne, les Collectivités innovent, inventent et renouvellent une action publique qui, à l’échelle du pays, a besoin de ces réflexions. Tous ces projets, dont ceux que vous menés dans votre ville, méritent une reconnaissance nationale et peuvent être le moteur de réformes nouvelles.
Je me tiens entièrement disponible, Monsieur le Maire, pour discuter de vive voix avec vous de ces sujets, pour relayer les préoccupations qui sont les vôtres, et que nous portions ensemble des propositions de rassemblement autour du renforcement des services publics et des Collectivités Locales, qui constituent l’épine dorsale de la République.
En espérant pouvoir répondre à vos attentes, je vous prie de recevoir, Monsieur le Maire, l’expression de mes considérations distinguées,