Monsieur le Président,
C’est avec beaucoup d’interrogations et d’inquiétudes que je m’adresse à vous par ce courrier. J’écoute et j’entends les gens qui expriment massivement leurs angoisses, quelquefois leur désespoir.
Avant mai 2012, vous aviez su faire naître un réel espoir pour la majorité de notre peuple. Malheureusement, trois ans et demi après, il n’est plus là, pis encore, la Gauche ne représente plus l’espoir, pas même une attente citoyenne. Ceci est très grave pour le présent, mais surtout très dangereux pour notre peuple et pour l’avenir de notre pays.
Le Crédit Impôts Compétitivité Emploi (CICE) est un échec, c’est aussi le vôtre. Les diminutions des dotations aux Collectivités, un désastre dont les conséquences se mesureront de plus en plus douloureusement par les Elu(e)s locaux et la population. La baisse de 11 milliards d’euros en 3 ans est présentée comme une « contribution des collectivités territoriales à l’effort de redressement des comptes publics » alors qu’elles alimentent, en réalité, les aides aux grandes entreprises par le biais de dispositifs dont l’efficacité est loin d’être prouvée.
En tant que Sénateur, j’aimerais que vous entendiez les Maires de France. Il est urgent de leur donner un signe positif. Ils vivent très mal l’injustice qui leur est faite de participer à hauteur de 25 à 30% de réduction de la dépense publique alors que leur « part » dans la dette publique n’atteint pas 10%. C’est brutal, injuste et insupportable.
Cette diminution drastique des dotations est un choc qui fragilise considérablement les Communes. Elle détruit dans nombre d’entre elles, tout ce qui permet de vivre ensemble. Elle remet en cause l’égalité des droits, la qualité, voire l’existence de services utiles, voire essentiels aux habitants. Elle va entraîner une hausse des tarifs sociaux, une baisse conséquente des subventions à la vie associative, sportive, culturelle et même caritative.
Cette diminution de la Dotation Globale de Fonctionnement (DGF) s’est déjà traduite en 2014, par une baisse de l’investissement des communes et des intercommunalités de 12,4%, soit une perte sèche de 4,3 milliards d’euros.
Le bloc communal n’est pas le seul concerné. Les Départements qui assurent des dépenses sociales très importantes et des investissements lourds, tels les collèges et la voirie, sont eux aussi gravement impactés. Par exemple dans le Morbihan, la hausse de 20% des dépenses et la baisse de 18% des dotations sont illustrées dans le tableau suivant :
Année | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 4 années |
DGF | 183,7 | 183,3 | 177,9 | 164,3 | 150,8 | -32,9 |
Dépenses d’action sociale | 275,2 | 292,6 | 305,4 | 325,3 | 330,9 | +55,7 |
La DGF a été créée pour compenser les recettes fiscales supprimées lors de multiples transferts de compétences. En réduisant les dotations, le contrat initial est caduc. Rien que pour le Département du Morbihan, un écart de 38% s’est creusé en 4 ans entre les besoins recensés et les moyens prévus (- 32,9 millions d’euros de baisse de la DGF / + 55,7 millions d’euros de dépenses). Il ne faut pas omettre également la perte de la Taxe Professionnelle sous l’ère Sarkozy avec près de 10 milliards d’euros en moins pour l’ensemble des collectivités locales.
D’autres départements connaissent des situations bien plus graves encore. Ils seront bientôt incapables de faire face à leurs échéances. Alors que faire ?
Il est urgent de mettre un terme à la baisse de la dotation globale de fonctionnement des collectivités locales. Comment ? Les solutions existent :
En réduisant le CICE, les niches fiscales (toutes n’ont pas la même utilité), en créant une tranche exceptionnelle d’Impôts sur le revenu comme un marqueur de la justice fiscale (comprise entre 50 et 55%) et en poursuivant la lutte contre l’évasion fiscale qu’il faut réduire chaque année.
Il est possible de concevoir, de manière responsable, une réforme de la DGF digne de ce nom, s’attaquant aux écarts injustifiés. Il est temps de donner aux collectivités les moyens de leurs actions pour les services publics indispensables à leurs populations, quelle que soit leur taille, pour l’emploi et le développement des investissements indispensables à la vie de nos territoires.
C’est la seule voie pour relancer l’économie et redonner un peu d’espoir et de motivation aux Français et créer enfin les conditions du recul du chômage dont le niveau atteint est insupportable. C’est un devoir républicain fondamental qu’il faut concrétiser, ne laissons pas le temps détruire notre tissu social.
Les communes jouent un rôle essentiel, elles méritent d’être respectées et soutenues. L’investissement public est un moteur de développement économique efficace et même indispensable, c’est un atout majeur pour notre pays pour sortir du marasme et du déclin.
Il serait judicieux d’envisager de mener de nombreuses consultations dans le cadre d’un moratoire pour définir avec les associations d’élus et les parlementaires, les principes communs d’une réforme de la dotation globale de fonctionnement. Ce serait un signe fort adressé à ces acteurs locaux et à la population pour répondre à leurs attentes. Il faut insuffler le changement de cap réclamé. Il est encore temps mais il ne faut plus attendre.
L’heure est grave. Ne rien changer, c’est ouvrir la porte en grand au Front National pour des lendemains que nous ne voulons pas. L’année 2016 sera déterminante. La suivante 2017, sera catastrophique si vous ne changez pas de cap maintenant.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, en l’expression de mes salutations les plus respectueuses.