Tunisie : la France doit faire entendre l’exigence du respect des droits humains

Publié le 14 avril 2008 à 10:46 Mise à jour le 8 avril 2015

Lettre au Ministre des Affaires Etrangères

J’ai appris que Madame Rama YADE et, semble-t-il, vous-même, envisagiez de vous rendre en Tunisie dans les prochains mois.
En février, Madame Fatma KSILA, Secrétaire générale du Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’ Homme en Tunisie et Madame Samia ABBOU, membre de l’ Association tunisienne de lutte contre la torture -dont l’époux, Maître ABBOU, a subi plus de deux ans de détention pour avoir publié un article ayant déplu au pouvoir- y ont été violemment prises à partie et frappées par la police tunisienne. Elles rendaient visite à des familles de prisonniers.
Ce fut le cas également, quelques jours après, début mars, de Madame Sihem BENSEDRINE, porte-parole du Comité National pour les Libertés en Tunisie et de Monsieur Omar MESTIRI, directeur de rédaction au journal en ligne Kalima.
Un opposant politique connu âgé de 66 ans, condamné sans preuves, Monsieur Abderrahmane TLILI, incarcéré malgré plusieurs maladies graves, a été amené à entamer en grève de la faim pour protester contre de mauvais traitements. Sa mère, âgée de 89 ans, a fait de même pour le soutenir, mettant elle aussi sa santé en danger. La seule issue concevable est la libération de Monsieur TLILI, et avec elle celle tous les prisonniers politiques.
Je viens également d’apprendre la violente répression dont vient d’être victime la population du bassin minier de Gafsa. La police tunisienne a procédé à l’arrestation de syndicalistes, de chômeurs parmi lesquels un grand nombre de jeunes. Des dirigeants syndicaux ont été frappés et interpellés. La libération de toutes ces personnes est une exigence.
Ce ne sont là, hélas, que quelques exemples parmi de nombreux autres des pratiques en cours en Tunisie.
Comme vous le savez, les défenseurs des droits humains -qu’ils soient politiques, associatifs, juristes -, les progressistes et les syndicalistes y sont régulièrement l’objet d’arrestations, de condamnations à de lourdes peines de prison.
Les restrictions à la liberté de réunion, d’expression et de circulation se multiplient. L’indépendance de la justice est bafouée. On déplore des procès iniques, des pratiques de torture et des mauvais traitements, des agressions, des interdictions arbitraires de voyager...
Aussi, je vous demande de saisir l’occasion de ce déplacement qui semble prévu en Tunisie pour faire entendre auprès du gouvernement tunisien et du Président Ben ALI, la voix de la France en faveur du respect des libertés et des pratiques élémentaires appartenant à un Etat de droit et pour lui rappeler que l’esprit et la lettre même de l’accord d’association UE-Tunisie est conditionné au respect des droits de l’Homme.

Nicole Borvo Cohen-Seat

Ancienne sénatrice de Paris et présidente du groupe CRC

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