Monsieur le Ministre,
Je souhaite attirer votre attention sur la situation de la Poste en Isère et en Savoie.
Depuis le 15 mai, suite à l’annonce par la direction de la suppression de 6 tournées de la plateforme de tri de Villard-Bonnot dans l’Isère, les facteurs ce cette plateforme ont lancé un préavis de grève illimitée et ont engagé différentes actions afin d’exprimer leur opposition à cette décision et en informer les usagers.
Les salarié-e-s alertent, avec leurs organisations syndicales, sur les conséquences de cette réorganisation qui vise l’augmentation de la durée de travail et la suppression de postes. Une détérioration des conditions de travail pour les salarié-e-s qui s’accompagnera immanquablement d’une détérioration de la qualité du service public et d’un recul de la présence postale sur notre territoire.
Les salarié-e-s alertent également sur les méthodes employées par la direction – pression sur les agents, installation d’un centre de tri parallèle, recours à des intérimaires pour effectuer le travail des agents grévistes - et sur l’absence de dialogue social et le refus de la direction de tout compromis.
D’ailleurs, mercredi 4 juin, 19 salarié-e-s de la Poste étaient assigné-e-s devant le tribunal de grande instance de Grenoble par la direction pour avoir entravé l’accès au centre de tri, assignation accompagnée d’une demande de pénalité de 1 500 euros par salarié-e assigné-e et 5 000 euros par jour d’entrave supplémentaire. Or l’entrave constatée n’a jamais été totale selon les organisations syndicales et l’assignation concerne certains agents non présents les jours visés.
Cette décision de la direction est particulièrement troublante. Elle l’est d’autant plus que les conflits sur le territoire Isère-Savoie se multiplient suite aux multiples plans de réorganisation et à des méthodes managériales pour le moins contestables.
La récente tentative de suicide d’une salariée du bureau de poste Lionnel Terray à Grenoble en témoigne. Et les conflits ont une fâcheuse tendance à s’envenimer dans la dernière période.
Je suis personnellement intervenue auprès de Monsieur Zatti, Directeur du Courrier, la veille de l’audience afin de lui demander de suspendre la mesure d’assignation et les poursuites à l’encontre des salarié-e-s et d’engager des négociations.
Monsieur Zatti m’avait alors assurée de sa volonté de ne pas envenimer le conflit et de ne pas aller au bout des poursuites mais le matin même de l’audience un premier salarié avait reçu à son domicile une convocation pour un entretien préalable avant sanctions pouvant aller jusqu’au licenciement.
Il ne me semble pas que ces méthodes soient vraiment de nature à réduire le conflit.
Devant l’inquiétude légitime des salarié-e-s menacé-e-s dans leur emploi et la reconnaissance de leur métier, j’attendrais de vous Monsieur le Ministre que vous puissiez faire prévaloir le pouvoir d’actionnaire principal de l’Etat et peser pour apaiser la situation et stopper l’escalade des sanctions ; que vous puissiez peser pour que le groupe La Poste adopte des méthodes managériales plus respectueuses envers ses agents en charge d’une mission de service public qu’ils et elles effectuent généralement en bons « serviteurs de l’Etat » dans un contexte social et salarial dégradé.
Je suis parfaitement consciente, tout comme les salarié-e-s de la Poste et ses usagers, de l’évolution des pratiques et de la demande en matière de courrier. Mais je suis persuadée que les salarié-e-s sont parfaitement capables de contribuer à cette évolution et à la définition de nouveaux services et convaincue que les réorganisations ne peuvent se faire sans eux, encore moins contre eux. Sans doute serait-il judicieux de permettre aux agents d’évoluer vers les nouveaux services plutôt que de les licencier.
Je pense aussi, Monsieur le Ministre, qu’une part des 171 millions de dividendes versés en 2013 à la Caisse des Dépôts, résultant du bilan financier dont se félicite La Poste, pourraient être affectés aux réorganisations et à l’amélioration des conditions de travail des agents. Ce serait là véritablement, la marque d’un gouvernement de gauche.
Je vous remercie de l’attention que vous porterez à ce courrier et, dans l’attente de votre réponse et des suites que vous voudrez bien donner, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre l’expression de ma considération.