Un texte « voiture-balai »

Diverses dispositions relatives aux collectivités locales

Publié le 2 juillet 2013 à 15:50 Mise à jour le 8 avril 2015

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, quelques semaines après l’adoption de la loi portant modification des modes de scrutin locaux et départementaux, nous voici saisis d’un texte correctif, comme le qualifie notre rapporteur. Chacun en conviendra, cela ne va pas sans poser de problèmes.

D’abord, cela montre bien que les conditions d’examen du texte initial n’ont pas été optimales, comme nous l’avions d’ailleurs souligné, à l’époque.

En effet, malgré six lectures et une commission mixte paritaire, notre collègue Alain Richard note dans son rapport que des lacunes ou imprécisions semblent persister.

De plus, le Gouvernement ne semblait pas avoir totalement obtenu le texte qu’il aurait souhaité.

Finalement, nous allons débattre d’un texte « voiture-balai » - en ces temps de Tour de France, c’est d’actualité ! – sans avoir l’assurance que l’Assemblée nationale nous suivra sur ces propositions, à moins que cet accord ne soit d’ores et déjà acquis…

Que penser de cette initiative prise par notre collègue par ailleurs président de la commission des lois avec cette proposition de loi ? Ne serait-elle pas, de fait, une commande gouvernementale ?

M. Jean-Pierre Sueur. Non, pas du tout ! J’en ai pris l’initiative seul !

M. Christian Favier. Cette technique de présentation d’une proposition de loi pour masquer un projet gouvernemental, a toujours été, on le sait, durement critiquée sur les travées de la gauche, lorsque la droite était au pouvoir et usait de cette pratique.

M. Bruno Sido. Ce n’est pas nouveau !

M. Christian Favier. Aussi serait-il bon, à notre avis, de persister dans ce positionnement, car, finalement, cette procédure dessaisit les parlementaires de leur véritable initiative législative.

Par ailleurs, cette situation illustre le peu de liberté d’amendement accordée aux parlementaires, de l’opposition comme de la majorité. À cet égard, vos mises en garde, formulées à l’instant, madame la ministre, confirme tout à fait le sens restrictif que vous avez souhaité donner à l’examen de ce texte.

Enfin, que dire de cet amoncellement de textes qui nous est soumis ? Il aboutit à un véritable engorgement législatif et met en cause nos conditions d’examen. Il ne permet pas un véritable travail collectif ; il se solde par un examen rapide des amendements en commission et par une joute verbale en séance, avec l’objectif gouvernemental d’accepter le moins d’amendements possible !

En fin de compte, le Parlement est de plus en plus transformé en une simple chambre d’enregistrement. Ce faisant, il se convertit peu à peu en un outil exécutif, mettant en œuvre les décisions prises par le Président de la République et présentées par son gouvernement.

Aussi ce texte est-il finalement révélateur de dérives dans la mise en œuvre même de la Constitution et appelle à plus de respect pour notre assemblée.

Pour revenir sur le contenu, le texte porte pour l’essentiel sur des précisions techniques concernant la mise en œuvre de la loi du 17 mai dernier. Bien que nous ayons voté contre ce texte, nous ne nous opposerons pas à ces mesures.

De plus, nous soutenons le retour à neuf élus dans les conseils municipaux des communes de moins de 100 habitants. Espérons que, cette fois, l’Assemblée nationale acceptera cette mesure.

Une autre disposition constitue pour nous une avancée, certes légère, mais qui va, nous semble-t-il, dans le bon sens. En effet, l’article 3 prévoit l’élection des conseillers communautaires par le conseil municipal. J’ai bien entendu, madame la ministre, que vous n’étiez pas favorable à cette proposition.

Certes, ce retour à la situation actuelle n’est rendu possible que dans une situation particulière. Si nous soutenons cette mesure, nous maintenons néanmoins que ce mode d’élection devrait demeurer la règle en toutes circonstances. C’est le souhait d’une majorité d’élus locaux, largement exprimé au moment des états généraux de la démocratie territoriale, ici, au Sénat.

Enfin, comptons sur la navette parlementaire pour mieux harmoniser l’article 3 A et l’article 3, concernant la désignation du suppléant éventuel en cas d’élection par le conseil municipal d’un conseiller communautaire, dans les communes de moins de 1 000 habitants.

Ne nous opposant pas à l’essentiel des articles de cette proposition de loi et en soutenant le plus grand nombre, nous voterons en faveur de ce texte, malgré les remarques et préoccupations que j’ai pu exprimer au début de cette intervention.

Christian Favier

Ancien sénateur du Val de marne - Président du Conseil départemental
Contacter par E-mail

Ses autres interventions :

Sur le même sujet :

Institutions, élus et collectivités