Mes chers collègues, il aurait été plus logique d’aborder les articles relatifs aux métropoles en général avant d’examiner la situation particulière de Paris ou de Lyon, et non l’inverse.
Cela dit, depuis 2010, la position du groupe CRC concernant le développement des métropoles n’a pas changé. À nos yeux, ce processus fragilise les structures de la République, auxquelles, malgré ce que l’on voudrait nous faire croire, les citoyens sont très attachés, nous le savons.
On nous parle sans cesse du célèbre « millefeuille » français. Pourtant, il faudrait le rendre plus complexe encore, et développer des métropoles sur tout le territoire national ! Je suis d’accord avec Edmond Hervé quand il dit que l’on ne peut pas créer des métropoles sur la seule base de la population d’un territoire, et que d’autres conditions doivent être réunies. (Mme Catherine Morin-Desailly marque son approbation.) Quelle sera la lisibilité de cette institution pour les citoyens ? Vers qui ces derniers pourront-ils se tourner lorsque leur mairie ne sera plus qu’une mairie d’arrondissement ? La métropole sera bien loin d’eux !
Ces métropoles, mes chers collègues, sont de véritables « pompes aspirantes » non démocratiques, dans lesquelles des communes pourront être intégrées de force, éloignant d’autant la prise de décision des citoyens. D’une région ou d’une métropole à l’autre, les compétences ne seront pas exercées par les mêmes instances. Cette architecture « à la carte » remet en question à la fois la lisibilité de nos instances locales et l’unicité de la République, pourtant proclamée par la Constitution.
Malgré ce qui vient d’être dit, ce processus n’encourage pas l’égalité des territoires qu’Edmond Hervé appelle de ses vœux ; on en est même très loin.
En réalité, ce développement ne laisse rien présager de bon. Plus encore qu’avec la loi de 2010, le transfert de compétences aux métropoles instauré par ce texte affaiblira terriblement les collectivités territoriales, et plus précisément les communes et les départements. Pourtant, un sondage récent sur les collectivités territoriales a montré que les mots de « commune » et de « département » étaient ceux auxquels les Français étaient le plus attachés !
Ce projet de loi tend à un véritable démantèlement des structures institutionnelles qui ont façonné notre pays et son histoire, avec, en filigrane, la suppression de certains échelons administratifs. Le groupe écologiste, d’ailleurs, a déposé un amendement tendant à supprimer le département ! (M. Ronan Dantec ironise.)
Les départements et les régions qui auront une métropole sur leur territoire verront celle-ci capter l’essentiel de leurs compétences et de leurs moyens. Cela procède d’une vision exclusivement urbaine de notre société. Aucune responsabilité de péréquation envers le reste du territoire ne pèsera sur les métropoles. Par conséquent, les autres zones deviendront les parents pauvres de l’aménagement du territoire.
Dès lors, on se demande comment le département et la région, ainsi dépouillés de leurs ressources, seront en mesure de réparer les dégâts causés par cette fracture sociale et territoriale.
De fait, les métropoles, en concentrant aides, investissements et emplois, vont mettre en concurrence nos territoires, non seulement au niveau européen, mais surtout au niveau local : concurrence entre territoires, entre métropoles, entre milieux urbain et rural. Les territoires ne sont pas des entreprises, pas plus que les élus ne sont des directeurs financiers !
Plus profondément, quelle politique voulons-nous pour nos territoires, qui sont la richesse de notre République ? La compétitivité et la concurrence au lieu de la solidarité ? Le rôle des politiques est-il d’accompagner et de renforcer un mouvement qui s’amorce déjà de lui-même ? Ne faut-il pas plutôt le contrebalancer, en renforçant la solidarité pour le rendre plus efficace ? On peut construire des structures en réseau, avec des villes moyennes connectées aux métropoles et au territoire rural, comme cela se pratique chez nos voisins européens.
Non seulement nous risquons de manquer notre développement métropolitain en créant trop de métropoles, au lieu de les intégrer dans un fort réseau urbain et rural, mais, en plus, nous allons faire perdre leur attractivité, dont il faut bien avoir conscience, à nos politiques de cohésion et de lien social en dépouillant les départements !
Par conséquent, nous proposerons la suppression de l’article.