Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Mes chers collègues,
Le budget du ministère de l’Intérieur augmente de manière significative pour 2003, puisqu’il s’établit à 19,5 milliards d’euros, ce qui représente une progression de 11 % par rapport à 2002.
Le budget qui augmente également de façon notoire est celui de la police nationale, puisqu’il atteint 5,45 milliards d’euros, soit une hausse de 5,8 %. Celui de la gendarmerie atteint quant à lui 4,26 milliards d’euros, soit 8,4 % d’augmentation par rapport à 2002.
Concernant les effectifs, vous prévoyez de créer 13 500 emplois sur cinq ans, police et gendarmerie confondues.
Et c’est pourquoi je souhaite vous interpeller sur la question du redéploiement des forces de police et de gendarmerie, qui pose justement la question des effectifs et de leur réorganisation dans le cadre de ce plan de redéploiement.
La carte des compétences respectives entre police et gendarmerie est, nous sommes d’accord la-dessus, désuète. Datant de 1941, elle ne tient plus compte de la désertification de certaines zones rurales et de l’urbanisation intense des communes localisées à proximité des grandes villes. Il en résulte donc deux autorités différentes et deux services inégaux, de nombreuses anomalies ont été constatées.
Ce redéploiement prévoit donc la fermeture de commissariats, au moment même où vous prévoyez une hausse des effectifs !
On peut s’interroger également sur la pertinence de la fermeture de certains commissariats dans des zones où la délinquance est en baisse. En effet, les zones de police enregistrent de manière générale une stabilité des faits constatés et une régression sensible de la délinquance de voie publique. Mais ceci a induit un effet pervers, à savoir que la délinquance s’est déplacée dans des zones géographiques plus isolées, en milieu rural, et où l’on constate une recrudescence de faits violents.
Il est certes nécessaire d’implanter de nouvelles brigades de gendarmerie, mais est-ce cohérent de supprimer des commissariats là où la délinquance est en baisse ? Si la police est efficace, pourquoi lui couper l’herbe sous le pied ?
Si la délinquance est en baisse, c’est aussi parce que le service de la sécurité est bien assuré. C’est cela que nous souhaitons renforcer : une police véritablement républicaine, dans le sens où elle protège nos concitoyens sur l’ensemble du territoire.
Car le risque existe, avec un redéploiement laissant des communes sans commissariats, que les délinquants réinvestissent les anciennes zones de police.
Nous ne voulons pas d’une dégradation du service public de sécurité dans les petites villes. Et ce n’est également pas ce que souhaitent les syndicats de policiers, notamment dans le département des Bouches-du-Rhône, où, dans deux communes (Tarascon et Chateaurenard) il est prévu de retirer la police nationale alors que les policiers démontrent leur capacité 24 h sur 24 et chaque jour de l’année à assurer une sécurité permanente.
D’autant plus qu’il n’est pas garanti que les policiers seront remplacés par un nombre équivalent de gendarmes. Nombre de maires et de policiers, dont ceux de Dinan dans les Côtes d’Armor ou encore de Tarascon dans les Bouches-du-Rhône, s’inquiètent d’ailleurs de voir remplacer leur cinquantaine de policiers par une vingtaine de gendarmes. Que pouvez nous répondre pour les rassurer, pour nous rassurer sur la continuité et la qualité de notre service public de sécurité.
Un autre point me semble important : une interrogation subsiste quant à l’avenir de ces policiers qui seront délocalisés pour être remplacés par des gendarmes. Les syndicats de police restent d’ailleurs vigilants concernant l’accompagnement social de ce plan de redéploiement. Nous mêmes sommes inquiets du coût humain de ce redéploiement. Comment accompagnerez-vous concrètement les policiers fortement attachés à leur région, ayant investi dans une maison, mais aussi leur conjoint et leur famille en général ?
Enfin, ces fermetures annoncées ne doivent pas accentuer la désertification rurale et les déséquilibres de répartition de la population, en appauvrissant encore davantage des zones déjà touchées par la crise économique.
C’est pourquoi les élus locaux et les différents acteurs de la sécurité doivent ensemble travailler main dans la main afin d’appréhender le plus concrètement possible les éventuelles corrections à apporter au quotidien à ce redéploiement.
Mais ils ne devront pas seulement se limiter au strict aspect sécuritaire du redéploiement. Car, avec ce plan des redéploiement des forces de police et de gendarmerie, vous souhaitez certes vous attaquez à la délinquance, mais à aucun moment vous n’en combattez les causes, et c’est également en ce sens que nous percevons ce budget de l’Intérieur. Il est effectivement en hausse et cela, nous ne pouvons que l’accepter ; mais nous ne pouvons admettre l’utilisation qui en est faite. La question de la lutte contre l’insécurité doit être prise dans sa globalité, en s’attaquant également aux problèmes d’ordre économique et social. Mais je m’éloigne de la question !
C’est pourquoi, nous souhaiterions que vous nous apportiez, Monsieur le Ministre, le plus de garanties possibles concernant l’avenir des policiers et gendarmes concernés par ce plan de redéploiement et des fermetures de commissariats et de brigades qu’il entraîne.