Vous vous réjouissez d’arriver à vos fins dans un délai acceptable, au terme d’un débat serein, et non restreint. Nous avons voté contre la Constitution de 1958 et contre ses modifications, qui vont toujours vers un présidentialisme de plus en plus affirmé -lequel n’est pas un régime présidentiel. Vous avez arraché une réforme constitutionnelle à une voix près, réforme dont vous nous disiez qu’elle revaloriserait le rôle du Parlement : nous ne l’avons pas cru et nous voyons aujourd’hui que nous avions raison.
Vous votez l’article 13 en jurant que vous ne l’appliquerez pas, vous participez ainsi à une limitation des droits du Parlement. Chaque fois qu’on a voulu limiter les droits du Parlement, ç’a été un recul général de la démocratie. On le voit aujourd’hui, pas seulement ici, mais aussi dans des pratiques qui peuvent être sournoises.
Nous sommes donc inquiets. Et il n’y a pas seulement l’article 13. Le nouveau droit de résolution s’est réduit à la possibilité d’émettre des voeux pieux... si le Premier ministre est d’accord ! Les dispositions de la loi organique touchant l’évaluation des projets de loi mourront et seront oubliées, tout comme la circulaire de 1995 qui imposait déjà des études d’impact parce que complexes et inapplicables. La procédure accélérée est généralisée, forme d’urgence qui limite aussi notre intervention.
Et avec quelle célérité le Gouvernement nous a soumis ce projet de loi organique, avant d’autres sur des sujets importants ! Lorsqu’il s’agit de limiter les droits des parlementaires, il ne traîne pas ! Mais il a éludé une question essentielle. Chaque assemblée a une certaine autonomie dans l’élaboration de son Règlement. Le professeur Gicquel, qui a l’habitude de travailler avec M. Gélard -bien discret dans ce débat- juge que de notables différences de fonctionnement d’une assemblée à l’autre seraient anormales, affectant la procédure législative. Elles seraient à mon sens une véritable incongruité. Le Conseil constitutionnel nous apportera sans doute une réponse sur ce point.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Probablement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Le législateur, le constituant, s’en remet au Conseil constitutionnel !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Il y est obligé !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Vous auriez pu avoir le courage de refuser cette disposition, ce qui n’aurait de toute façon pas supprimé les différences entre les deux assemblées.
Nous voterons contre ce texte. Nous avons eu grand plaisir à débattre, même si la majorité est restée presque muette. Hélas, votre objectif est atteint et les libertés parlementaires, limitées.