Projet de loi de finances pour 2009 : santé

Publié le 28 novembre 2008 à 16:09 Mise à jour le 8 avril 2015

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Santé » apparaît plus que jamais comme un budget de transition dans l’attente du projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires », ainsi que l’atteste le gel des crédits accordés aux autorités régionales de santé. Mais ce budget de transition n’est pas sans nous interroger, voire nous mécontenter.

Avant d’entamer le cœur de ce qui constitue notre opposition aux crédits alloués à cette mission, je voudrais dire combien je regrette que les décrets d’application de la loi du 8 février 2008 relative aux personnels enseignants de médecine générale n’aient pas encore été publiés. Il s’agissait pourtant d’un texte qui avait fait l’unanimité dans notre hémicycle. J’avais donc bon espoir que cela avance vite. Tel n’est pas le cas.

En outre, je voudrais appeler l’attention du Gouvernement sur la nécessité de procéder rapidement au déblocage des crédits alloués à l’enseignement de la médecine générale. En effet, le nombre de médecins enseignants est très largement insuffisant, à peine 130 pour 6 000 internes.

Toujours dans mes propos liminaires, je souhaiterais vous faire part, madame la ministre, de notre interrogation concernant la réflexion de notre collègue Alain Milon sur les agences sanitaires. Si nous ne sommes pas opposés à une clarification en matière d’agences sanitaires, nous redoutons que celle-ci ne se fasse qu’au bénéfice des seuls motifs économiques. Aussi la fusion envisagée de l’AFSSA, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, et de l’AFSSET, l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, nous semble inopportune dans la mesure où risquerait d’être minoré l’important sujet de la sécurité sanitaire au travail. C’est l’une de nos préoccupations, monsieur le rapporteur pour avis. J’espère que vous y serez sensible.

Par ailleurs, je voudrais regretter ici la pratique des transferts entre les différents budgets, qui, bien que parfois heureux, rendent impossibles toute comparaison d’une année sur l’autre. Au-delà de cette question technique, je voudrais dire l’interrogation qui est la nôtre sur le transfert auprès des services du Premier ministre de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie. Si l’on comprend bien la logique, qui est de favoriser une compétence unique pour une mission transversale, au nom de mes collègues du groupe CRC-SPG, (Exclamations amusées sur plusieurs travées) ...

M. Gilbert Barbier. C’est plus long à prononcer !

M. Guy Fischer. Oui, et il va falloir nous y faire. (Sourires.)

... je voudrais rappeler que le traitement efficace de la lutte contre la toxicomanie et les addictions en général ne peut se limiter à une conception sécuritaire. Il ne peut être question que de chercher à sanctionner. Certes, il faut le faire, mais il faut aussi tout mettre en œuvre pour prévenir la toxicomanie et pour permettre à ceux qui en sont victimes de trouver les moyens, en termes d’accueil et d’accompagnement humain, de combattre leur addiction.

Cette question me conduit directement à regretter le recul qu’entame le Gouvernement en matière de lutte et de prévention contre les risques infectieux, particulièrement ceux qui sont liés à la sexualité : le VIH/SIDA, l’hépatite et les autres infections sexuellement transmissibles, les IST. En effet, on ne peut que regretter que le plan de lutte contre le VIH/SIDA et les IST, entamé en 2005 et qui trouve sa fin en 2008, ne soit pas reconduit en 2009. C’est du moins mon impression.

Ainsi, vous entendez diminuer les moyens afférents à la lutte contre les IST de plus de 15 % en 2009, sans compter l’abandon du programme national. Pourtant, jamais les besoins de prévention n’auront été aussi grands.

D’après le bulletin épidémiologique hebdomadaire, en date du 5 février 2008, publié par l’Institut de veille sanitaire, le nombre d’infections sexuellement transmissibles ne cesse de se multiplier. C’est ainsi que les infections à gonocoque ne cessent de croître depuis 2006. Pour éviter de recourir à des termes médicaux inutiles ici, il s’agit d’une recrudescence encore jamais vue de la blennorragie : une augmentation de plus de 70 % sur dix ans ! Aurais-je mal lu ?

Se développe également la lymphogranulomatose vénérienne, particulièrement dans sa forme rectale.

Tout cela est d’autant plus vrai avec la recrudescence du VIH et la multiplication de pratiques sexuelles dangereuses, promues par certains sites internet comme les relations sexuelles sans préservatif, alors que l’on se sait contaminé.

Mais surtout, on constate une recrudescence du nombre de victimes du VIH, particulièrement chez les plus jeunes. C’est dire que je fais mienne la conclusion de l’INVS, qui constate un relâchement dans les pratiques sexuelles et dans les mesures de prévention.

Je ne peux que regretter que, face à ce relâchement individuel, le Gouvernement, qui a une responsabilité en matière de prévention, décide de diminuer ses efforts...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mais non, monsieur Fischer ; je vous donnerai des explications !

M. Guy Fischer. J’espère que vous me convaincrez, madame la ministre, en me donnant des éléments d’informations.

Il me semblait que vous aviez décidé de baisser considérablement, de plus de 20 %, les budgets mis à disposition par l’État dans la lutte contre le VIH.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C’est le contraire !

M. Guy Fischer. De surcroît, 57 départements ont renoncé à la gestion de la lutte contre les IST et ce mouvement tend à s’amplifier. Si ni les régions ni l’État ne peuvent assumer pleinement cette mission essentielle de prévention, on est en droit de se demander qui le fera.

Par ailleurs, je déplore, comme l’ont fait les associations, l’absence du gouvernement français à la dernière conférence mondiale de lutte contre le sida, qui s’est tenue en août dernier à Mexico.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La France était représentée !

M. Guy Fischer. Vous n’y étiez pas, madame la ministre, et seule votre présence me rassure. (Sourires.)

Votre absence, madame la ministre, a été considérée par les associations comme un désengagement de l’État français, qui est confirmé par la diminution des crédits de 20 % que j’évoquais,...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mais non, les crédits augmentent ! Il faut savoir lire les documents budgétaires !

M. Guy Fischer. ... et, au plan international, avec la coupe sévère de 60 % annoncée dans les budgets des programmes d’aide aux pays pauvres sous le prétexte de la crise financière.

Ce faisant, vous faites supporter aux plus faibles parmi les faibles le prix d’une logique économique qui interdit l’accès des plus pauvres aux médicaments, particulièrement à la trithérapie.

Dans ce contexte, je réitère notre demande : il faudrait supprimer en France les franchises médicales, qui constituent un obstacle financier important. Il convient par ailleurs de garantir les fonds destinés à la prévention et à la lutte contre le sida. La question mérite d’être débattue, et je crois que nous devrions nous doter des moyens financiers pour accompagner cette politique de prévention.

Pour ce qui est du vieillissement de la population, on sait que près de 800 000 personnes sont concernées aujourd’hui par la maladie d’Alzheimer et les estimations prévoient, d’ici à 2020, 1,3 million de personnes affectées. C’est dire l’ampleur des besoins !

On constate donc une diminution des budgets, mais peut-être s’agit-il d’une lecture partisane de ce projet de budget !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous êtes mal informé ! Il s’agit d’une mauvaise lecture ; je vous expliquerai.

M. Guy Fischer. Je souhaite que vous puissiez me rassurer, madame la ministre. Quoi qu’il en soit, nous ne pourrons pas voter les crédits alloués à la mission « Santé ».

Guy Fischer

Ancien sénateur du Rhône

Ses autres interventions :

Sur les mêmes sujets :

Budget et fiscalité
Santé et protection sociale