Contribution exceptionnelle de solidarité

Publié le 4 juin 2009 à 09:51 Mise à jour le 8 avril 2015

Un déficit budgétaire atteignant les 44 milliards en trois mois, une contraction du PIB de 1,5 % pour le premier trimestre, la probabilité de compter 640 000 chômeurs de plus d’ici la fin de l’année, voici la situation de la France aujourd’hui. Avec une sorte d’autosuggestion, le Gouvernement escompte que le plan de relance sera vraiment mis en oeuvre dans les semaines à venir et que tout sera ainsi presque bouclé. Or, après la loi Tepa, après les rodomontades de l’automne, après la brillante présidence française de l’Union européenne -qui a failli permettre aux salariés de notre pays de travailler 65 heures par semaine-, au moment où remonte un discours autoritariste qui fait aveu d’échec des politiques répressives menées depuis 2002, nous sommes face à la réalité. Le nombre des chômeurs enfle, celui des sans-abri ne diminue pas ; les fermetures d’entreprises succèdent aux périodes de chômage technique, qui accompagnent les plans de licenciement et les redressements judiciaires ; les comptes de l’État et ceux de la sécurité sociale sont dans le rouge vif. Tout cela malgré la cure d’austérité que vous imposez aux Français depuis de trop longues années, fidèles en cela à ces exigences européennes de baisse des dépenses publiques, de dérégulation, d’ouverture à la concurrence des services publics, de dumping fiscal et social.

La proposition de loi de nos collègues socialistes vise à rechercher les voies et moyens d’une inflexion de cette dérive des comptes publics dont, il faut bien le dire, nous ne trouvons aucunement la justification pour l’heure dans la mise en oeuvre du plan de relance. Parce qu’enfin, à quoi cela sert-il de rembourser plus vite la TVA ou l’impôt sur les sociétés si c’est pour constater la persistance des plans sociaux, de l’ajustement à la baisse des salaires, du chômage technique ? Cela signifierait-il que l’argent dont l’État s’est délesté auprès des entreprises ne sert qu’à alimenter les banques créancières de nos PME, banques dont nous constatons d’ailleurs qu’elles sollicitent relativement peu la ligne de trésorerie que vous leur aviez accordée cet automne ?

Cette proposition de loi vise expressément les entreprises qui roulent sur l’or et n’assument pour autant aucune responsabilité sociale dans le cadre de l’utilisation de ces ressources. Total utilise ses profits à racheter ses propres actions pour les détruire plutôt qu’à assurer l’approvisionnement du pays en produits pétroliers. La même compagnie doit sans doute avoir quelques obligations vis-à-vis des dirigeants de ces grandes démocraties productrices de pétrole que sont la Birmanie, le Gabon ou le Congo.

En sollicitant des ressources fiscales nouvelles, pour certaines de caractère exceptionnel, en proposant de revenir sur les dispositions de la loi Tepa, nos collègues socialistes placent dans le débat une question clé, qui engage l’avenir du pays. Quelle politique fiscale concevoir, dans un contexte de crise économique sérieuse, pour redresser les comptes publics et éviter que toute politique ultérieure soit préemptée par les conséquences du déficit abyssal que deux années d’agitation élyséenne ont réussi à creuser ? Le débat est ouvert et il est regrettable que le président de la commission des finances, dont nous avons connu par le passé la grande inquiétude devant l’accroissement des déficits, nous recommande de ne pas voter le moindre article de cette proposition de loi.

M. Jean Arthuis, rapporteur. - C’est qu’elle est inopérante.

M. Thierry Foucaud. - Comme nous sommes des parlementaires conséquents et que nous croyons à l’initiative parlementaire, dont on prétendait en juillet dernier qu’elle sortirait grandie de la révision constitutionnelle, nous avons porté quelques amendements au texte proposé. Parce que, effectivement, il faut mettre un coup d’arrêt à l’aggravation des déficits publics. Non parce que M. Barroso le demande, mais parce que cela est nécessaire pour ne pas hypothéquer l’avenir en laissant filer un déficit qu’il faudra ensuite résorber et privera les Français de toute réforme fiscale avant longtemps. Nécessaire aussi parce que les choix du Gouvernement actuel ont conduit au désastre qu’il est trop facile d’imputer à une crise économique qui a bon dos quand il s’agit de fuir ses responsabilités.

La loi Tepa porte une grande responsabilité dans la dérive des comptes publics et le coût de cette loi imbécile et inefficace ne se mesure pas qu’en termes de moins-values fiscales ! Il se mesure aussi en emplois sacrifiés sur l’autel des heures supplémentaires défiscalisées, en chute de l’activité du bâtiment et de l’immobilier du fait de l’allégement des droits de succession.

Nombre des réformes mises en oeuvre par le Gouvernement montrent aussi leurs limites. On recommande à la justice d’être exemplairement rigoureuse ? Résultat : surpeuplement des prisons et mouvements. On supprime des milliers de postes d’enseignants ? Résultat : on feint de découvrir la violence à l’école et on se prépare à recruter une brigade volante de plusieurs centaines de super surveillants scolaires qui ne remplacera jamais les 80 000 emplois supprimés dans l’éducation nationale en quatre ans.

C’est parce que ceux qui peuvent supporter le poids des déficits publics doivent le faire qu’il faut voter cette proposition de loi. Mais c’est aussi parce qu’il faut définir les voies et moyens de nouveaux choix fiscaux et budgétaires, justes, efficaces et détachés des exigences européennes. La France doit porter d’autres choix et montrer la voie à une Europe exténuée par les politiques récessives imposées par Bruxelles.

Thierry Foucaud

Sénateur de Seine-Maritime
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