Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers Collègues,
Au terme de ces deux semaines de débat sur le projet de loi de réforme des retraites Raffarin-Fillon, je constate avec regret mais sans surprise, que le gouvernement, après avoir négligé le mouvement social, s’est employé, une fois de plus, à malmener la démocratie parlementaire.
Sur un sujet aussi structurant pour notre modèle social, les Français étaient en droit d’attente que les adaptations nécessaires de nos régimes de retraite se fassent, en respectant le pacte républicain, le dialogue social.
Manifestement ce ne fut pas le cas. Contrairement à ce que vous vous plaisez à répéter pour mieux vous en convaincre, il n’y a pas eu de véritable négociation avec les organisations syndicales.
Le gouvernement est arrivé, sûr de lui, de ses choix, présentant un texte déjà ficelé, affirmant sans le démontrer toutefois, qu’aucune alternative n’existait.
Les organisations syndicales quant à elles, ont œuvré utilement à l’information de nos concitoyens. Elles se sont montrées fermes et déterminées pour protéger le système français de protection sociale.
Les Français eux, se sont approprié cette question qui les concerne directement, dans leur vie quotidienne, qui engage leur avenir et celui de leurs enfants ou petits enfants.
Massivement ils se sont mobilisés dans la rue, ils ont exprimé par sondage, leur refus de voir casser la certitude du droit à la retraite à 60 ans, de voir dynamiter la garantie collective d’un haut niveau de pension.
Cette réforme, censée sauver la répartition, mais faisant le lit de la capitalisation, axant les efforts demandés sur les seuls salariés, ils l’ont combattue, ils la combattent encore, dans la mesure où elle est constitutive d’un profond recul social.
Monsieur le Ministre, vous êtes pourtant resté « droit dans vos bottes », méprisant la rue, érigeant la surdité en vertu politique, prenant ainsi le risque, par votre attitude de blocage, de laisser se creuser la fracture entre le monde politique et les citoyens.
Vous avez multiplié les contre vérités, usé de la démagogie, fait de la division des Français, en l’occurrence des salariés et des fonctionnaires, un principe de gouvernement.
Alors qu’il y avait un réel besoin de débat autour des choix en présence, le gouvernement a orchestré une campagne, non d’information mais de propagande, confisquant les termes du débat, en présentant aux Français, comme inévitable, l’augmentation de la durée de cotisation.
Pourquoi ne pas avoir permis aux Français de s’exprimer sur les différentes options de réforme, avoir refusé qu’ils répondent par la voie du référendum au Premier Ministre qui pourtant s’était adressé à eux directement ?
Peut-être étiez-vous pleinement conscient qu’une telle remise en cause implicite des droits de chacun ne pouvait être acceptée.
Cette réforme, sa philosophie, ses objectifs, qui s’inscrivent parfaitement dans votre logique libérale, dans les impératifs européens, qui demande aux salariés de toujours mettre la main à la pâte, en n’hésitant pas à jouer à l’occasion, de la carte de la culpabilité ; cette réforme imposée aux agents de la fonction publique, nous la refusons.
Nous rejetons les choix politiques de ce gouvernement, qui privilégie les réponses individuelles, pour répondre au défi du vieillissement de la population.
Les parlementaires du groupe communiste républicain et citoyen se sont inscrits dans le débat au Sénat pour faire la preuve que votre réforme est contestable dans sa logique, inacceptable dans ses effets.
Nous avons présenté, à travers notre panoplie d’environ 600 amendements, des propositions alternatives, ambitionnant d’une part, de rompre avec la régression du pouvoir d’achat des retraités et de garantir le droit et les conditions effectives d’une retraite à taux plein à 60 ans, d’autre part.
La majorité sénatoriale calquant son attitude sur celle des députés de l’UMP a confirmé qu’elle excellait dans son rôle de majorité silencieuse !
Le gouvernement lui, a usé et abusé des artifices de procédure à sa disposition, demande de priorité, vote bloqué, pour contraindre la discussion, museler l’expression de solutions alternatives, confirmant ainsi, notamment son manque d’ouverture d’esprit.
Le couperet de l’article 40 est tombé à plus de 200 reprises, inlassablement sur la majeure partie de nos propositions, privant de fait les parlementaires du groupe communiste républicain et citoyen du droit de présenter ces dernières, alors que toutes était financées.
Que reste-t-il, dans ces conditions du droit d’amendement ?
Que dire, en conséquence de ce débat, si ce n’est qu’il est un leurre de plus ?
Pour conclure, je tiens à rappeler que, quel que soit vos propos rassurants concernant les fondamentaux de notre système de protection sociale, l’avenir le montrera malheureusement, l’allongement de la durée de cotisation pour les fonctionnaires dans un premier temps, pour tous ensuite ; l’indexation sur les prix des pensions ; l’ouverture à la capitalisation concourront à baisser significativement le niveau de vie des retraités et à ouvrir largement aux institutions financières la manne des masses financières de la protection sociale.
En niant l’existence d’autres leviers notamment macro économiques pour faire face aux réalités démographiques, vous plombez votre réforme. D’autant que parallèlement, vous ne vous inscrivez pas dans une démarche volontaire, active, pour lutter contre le chômage et résorber la précarité, pour assurer aux jeunes toute leur place dans la vie active.
D’autant que par ailleurs, aucune mesure d’envergure n’est prise pour responsabiliser, contraindre les employeurs à changer d’attitude vis-à-vis des salariés en fin de carrière et, à repenser les conditions de travail.
S’agissant de la pénibilité et de la formation professionnelles, grandes absentes du texte, vous vous en remettez exclusivement aux partenaires sociaux !
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, un monde sépare nos conceptions respectives de l’équité, de la solidarité. Nous regrettons profondément que le gouvernement ait persisté à refuser d’aborder la question pourtant centrale de cette réforme, la question de la répartition des richesses.
Cette réforme passera sûrement, puisque vous êtes majoritaires, soyez tout de même conscients qu’elle n’emporte pas l’adhésion des Français. Soyez également sûrs que les choses n’en resteront pas là.
Les Français seront sensibles aux dossiers sociaux à venir, je pense à la réforme de la sécurité sociale. Demain, à nouveau, ils refuseront l’insécurité sociale, que vous instillez au sein de notre société.
Les parlementaires du groupe communiste républicain et citoyen voteront résolument contre votre projet de loi.