Chers Camarades,
Après la succession des conflits sociaux du printemps et de l’été qui a fortement marquée la vie sociale et politique, pour des raisons politiques, le gouvernement a dû changer de stratégie concernant « la grande réforme » de l’assurance maladie en étalant dans le temps, le traitement de ce dossier.
Dans un premier temps, une instance, le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, chargée sous trois mois, de présenter un diagnostic partagé devrait être créée. Le Medef a d’ores et déjà annoncé sa participation.
Suivrait alors un processus de concertation, de consultation, un « débat » dont il est à craindre, - le précédent de la réforme des retraites ne poussant pas à l’optimisme, - qu’il ne soit pas suffisamment ouvert pour que le dialogue social soit effectif, et aboutisse à un texte dont la philosophie serait partagée par la majorité de nos concitoyens.
Nous ne nous faisons aucune illusion sur la volonté de dialogue, de négociation du gouvernement, du MEDEF.
Alors que l’on communique beaucoup sur le « trou historique » de l’assurance maladie, suite aux prévisions avancées par la commission des comptes de la Sécurité sociale, faisant état pour le régime général d’un déficit pouvant atteindre en 2003, 9,4 milliards d’euros et 13,4 milliards d’euros en 2004.
Pour ne pas anticiper cette future réforme, le PLFSS qui sera examiné par les députés dans la foulée du débat sur la loi de santé publique ne contiendra pas de mesures structurelles.
Ce texte de transition n’en demeure pas moins important.
Par diverses dispositions : augmentation du forfait hospitalier ; nouveau déremboursement de médicaments ; déremboursement d’actes effectués en dehors de toute justification médicale ; contrôle plus strict des arrêts de travail et des admissions en affection de longue durée…. ; Francis MER, parle de mesures drastiques, il se propose de modérer les dépenses de santé en culpabilisant les assurés sociaux et en reportant ces charges sur l’ensemble des ménages.
Par ailleurs, en creux des mesures qu’il recèle, visant à stabiliser le déficit du régime général et, plus particulièrement de l’assurance maladie, à inverser la courbe des dépenses de santé et à clarifier les financements, pointe bien la volonté de mettre en place un autre système de soins. Il est à ce titre important.
Cet énième plan d’économies de bric et de broc pour la sécurité sociale, comme l’a titré « La Tribune » mercredi, permet au gouvernement de poser les jalons en vue de la réforme de l’an prochain.
Le discours de la droite, de M. MATTEI concernant l’assurance maladie a beaucoup changé. Les initiateurs du Plan JUPPE fustigent aujourd’hui la maîtrise comptable des dépenses de santé et admettent comme naturelle l’évolution des dépenses de santé.
Pour autant, ils obèrent la question de l’évolution des ressources, du mode de financement, pour couvrir de manière pérenne les besoins.
Le choix est fait de laisser filer les comptes de la sécurité sociale pour mieux proposer demain son démantèlement.
« L’instrumentalisation du déficit » (L’Humanité du 24 septembre 2003) sert à pointer les limites du système actuel et à présenter comme inévitable le glissement de l’obligatoire vers les assurances complémentaires.
La privatisation, la marchandisation de notre système de soins n’est pas un fantasme. C’est la réalité des propositions contenues notamment dans le rapport CHADELAT. Ce dernier propose de repartir et les couvertures et les responsabilités selon trois niveaux - (l’assurance maladie obligatoire ; la complémentaire de base ; un troisième étage complètement libre d’assurance) - réduit a minima ce que la Nation prend en charge collectivement et ouvre totalement à la concurrence le reste du « marché » des autres soins courants jugés trop coûteux (dentaire, optique) ou moins prioritaires relevant de la responsabilité, de la liberté de chacun.
Ajouté à cela la proposition du candidat président CHIRAC, de mettre en place une aide à la mutualisation, crédit d’impôt ou chèque santé pour « solvabiliser, mais surtout réguler le système de santé » (CANIART) et la boucle est bouclée.
Le gouvernement est loin d’avoir renoncé à avancer, poussé par le Medef, pour réformer en profondeur l’ensemble de notre système de protection sociale qui ne serait plus adapté à la situation et aux perspectives économiques, démographiques, technologiques qui sont celle de la France (discours Kessler, Strasbourg 2001).
Depuis sa création, la sécurité sociale est présentée par le patronat et les tenants du libéralisme comme mettant en danger l’économie de notre pays.
Rien de très nouveau donc aujourd’hui dans les propos du Medef, souhaitant voir baisser toujours davantage les cotisations patronales et militant pour le financement du système de santé par la CSG, un impôt pesant pour les quatre cinquième sur les salariés et les revenus de remplacement.
Comme nous l’avons dénoncé à l’occasion du débat sur les retraites, les solutions libérales avancées, fidèles à l’orthodoxie budgétaire, axant sur la réduction des dépenses sociales et des réponses collectives au profit des acteurs financiers, compagnies d’assurances et consorts, structurent un modèle social différent du nôtre, beaucoup moins solidaire, encore plus inégalitaire.
La situation économique, sociale et sanitaire de la France appelle pourtant un autre choix que celui de l’insécurité sociale généralisée.
L’économie française ne créée plus d’emploi. Pourtant, la France reste en panne d’une réelle politique de l’emploi, de la formation professionnelle. Le gouvernement continue de prioriser les allègements et exonérations de cotisations sociales, alors que les prévisions de la Commissions des comptes de la sécurité sociale font apparaître les effets « massifs » de la situation économique sur les recettes de la branche maladie.
A la cascade de plans sociaux, laissant sur le carreau les salariés les plus fragiles, le Premier Ministre répond par la reconnaissance du droit au reclassement que son gouvernement s’était empressé de vider de son sens en suspendant la Loi de modernisation sociale et par le durcissement des droits à l’ASS pour les chômeurs de longue durée !
Pour relever le défi de l’allongement de la durée de la vie et financer les besoins de la dépendance, le gouvernement avance l’idée de supprimer un jour férié, donnant au passage satisfaction à ceux qui estiment que la France souffre d’une durée légale du travail trop basse !
La vraie cause de la catastrophe sanitaire de ce mois d’août serait selon le gouvernement plus à rechercher du côté de l’absence de solidarité familiale !
A cette question relevant de la solidarité nationale, à l’asphyxie des systèmes d’urgence et de soins, à la suppression de près de 100.000 lits, à la fermeture à marche forcée de centaines d’établissements, le gouvernement répond, augmentation du forfait hospitalier !
Décidément, les perspectives dans lesquelles nous, parlementaires communistes, inscrivons la réforme de l’assurance maladie et, plus globalement, celle de la protection sociale, sont étrangères à celles du gouvernement.
L’examen du PJL sur la politique de santé publique dès le 2 octobre à l’Assemblée Nationale, l’examen du PLFSS fin octobre, doit être l’occasion pour nous de concrétiser notre volonté de voir le champ de la couverture sociale solidaire s’élargir comme condition de l’effectivité de l’égal accès de chacun, au droit à la santé notamment.
Il s’agit de formuler des propositions concrètes comme nous avons réussi à le faire pour les retraites.
Une réflexion a été engagée, elle est loin d’être aboutie et nécessite de toute évidence la contribution de tous les parlementaires communistes en direction des organisations syndicales, de plusieurs associations, des Françaises et des Français.
Elle doit être l’objet de multiples initiatives et actions. Je laisse maintenant la parole à Jacqueline FRAYSSE pour présenter la trame de nos propositions.