Le gouvernement n’apporte aucune réponse aux inégalités qui touchent les femmes

Réforme des retraites

Publié le 5 octobre 2010 à 06:23 Mise à jour le 8 avril 2015

Pour paraphraser le slogan utilisé le 26 août 1970 par le Mouvement Libérateur des Femmes devant la tombe du soldat inconnu, « il y a encore plus précaire que le salarié, la salariée ».

Selon l’Observatoire des inégalités, qui relaie la dernière étude statistique en la matière publiée par la DARES en octobre 2008 : les femmes perçoivent « tout temps de travail confondu un salaire inférieur de 27% à celui des hommes ». Une proportion qui augmente naturellement pour les femmes qui sont à temps partiel. Ou plutôt, devrais-je dire, subissent des contrats à temps partiel. 82% des personnes qui déclarent être contraints de conserver de tels contrats sont des femmes. Quoi de plus logique quand on sait que les femmes sont cinq fois plus souvent à temps partiel que les hommes et que les activités professionnelles auxquelles nous cantonnons les femmes peu qualifiées sont précisément les contrats aux horaires les plus atypiques et font partie des contrats les plus précaires.

A cela se rajoute d’autres inégalités encore moins acceptables puisque simplement illégales. Toujours selon l’Observatoire de l’égalité « si l’on tient compte des différences de poste (cadre, employé, ouvrier), d’expérience, de qualification (niveau de diplôme) et de secteur d’activité (éducation ou finance) environ 10 % de l’écart demeure inexpliqué ». Et l’Observatoire de préciser « Cette différence de traitement se rapproche d’une mesure de discrimination pure pratiquée par les employeurs à l’encontre des femmes ».

Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en la matière, votre Gouvernement n’est pas, Monsieur le Ministre, des plus combattif. L’article 31 de votre projet de loi ne fait pas illusion. Vous vous limitez à créer une taxe de 1% de la masse salariale en cas de non-respect en matière de négociations annuelles obligatoires. Vous qui ne cessez de dire que la sanction doit servir d’exemple, qu’elle doit être un élément fondamental dans la lutte contre la violation du droit, vous auriez pu, vous auriez dû, et nous le proposerons, créer une sanction financière dont les fonds seraient affectés au FSV.

Il y aurait pourtant tout lieu d’agir et d’agir vite car les inégalités salariales subies au cours de la carrière professionnelle s’accroissent avec la retraite. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : aujourd’hui, 76% des bénéficiaires du minimum vieillesse sont des femmes et leur pension moyenne ne représente que 48% de celle des hommes. Et bien souvent, c’est les pensions de réversion qui permettent aux femmes de vivre dignement, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous ne cessons de proposer son extension aux couples Pacsés, ce que vous ne cessez de refuser.

Monsieur le Ministre, ces inégalités inacceptables pour celles qui les subissent, et intolérables pour celles et ceux qui sont attachés à un certain modèle républicain, ne diminueront pas avec la crise et s’amplifieront demain.
Aujourd’hui, sans même que votre réforme ne leur soit applicable, parmi les salariées du secteur privé nées en 1938, plus 50% des femmes ont dû attendre 65 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein, contre seulement 16% des hommes du même âge qui ont pu valider leurs trimestres plus tôt.
Conséquence : les femmes touchent une pension moitié moindre que celle des hommes : 745 euros en moyenne contre 1550 euros (en 2004).

Et que leur répondez-vous à toutes ces femmes ? Que les retraites ne sont pas le lieu pour compenser les inégalités. Autrement dit, vous ne leur apportez aucune réponse, les laissant vivre avec des pensions notoirement inférieures au seuil de pauvreté.

Enfin Monsieur le Ministre, permettez-moi de vous dire que nous ne partageons pas votre analyse selon laquelle ces inégalités se résorberaient par elles-mêmes, du simple fait du mouvement démographique. La situation actuelle du marché du travail, marquée par la banalisation des contrats de courte durée ou à temps très partiel pèsera d’autant plus dans la balance que vous rallongez la durée de cotisation. Le passage à 67 ans pour bénéficier d’une retraite sans décote obligera les salariées qui le peuvent à travailler plus et pour les autres à voir le montant de leurs pensions amputées par les décotes.

Votre projet est tellement injuste, va tellement accroître les inégalités que même la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations le qualifie de discriminatoire, c’est dire.

Notre République ne peut accepter de rester passif face aux discriminations. Elle ne peut pas renoncer à les supprimer. Elle ne peut pas les amplifier. Vous devez retirer votre projet de loi !

Sur le même sujet :

Emploi, salaires et retraites

À la une