Cohésion sociale : explication de vote

Publié le 5 novembre 2004 à 00:00 Mise à jour le 8 avril 2015

par Roland Muzeau

Notre débat a été long, parce que ce texte l’était aussi et que nous en avons eu connaissance à la toute dernière minute. Nul doute que s’il avait appliqué l’exposé des motifs, nous l’aurions adopté à l’unanimité. Nous ne nous opposons pas sur les propos généreux, nous constatons comme vous qu’il n’est pas normal que dans un pays riche comme la France, des millions de nos concitoyens vivent dans ou au seuil de la misère.

Dans ce pays doté de tant de potentiels, humains et économiques, quand on sait les ravages provoqués par la perte de logement et la perte d’emploi, il est normal que le gouvernement se préoccupe de ce qu’on appelait « la fracture sociale » en 1995, aujourd’hui la cohésion sociale. Mais nous ne sommes pas d’accord avec vos propositions, avec votre refus d’agir sur les causes même, c’est-à-dire sur le système capitaliste et nous nous opposons au libéralisme qui multiplie les atteintes aux droits.

Nous avons joué notre rôle, en nous opposant et en proposant. Nous nous sommes parfois abstenus, comme sur la D.S.U., véritable carburant pour sortir de l’ornière les villes les plus en difficulté. Nous suivrons attentivement le débat à l’Assemblée nationale, sur la répartition. Nous espérons aussi que la loi de finances modifiera la D.G.F., pour tenir compte de villes non éligibles à la D.S.U. mais qui restent pauvres. Il ne faut pas opposer les problèmes de l’urbain et ceux du rural : ils existent les uns et les autres, mais c’est dans la ville qu’on jugera la réussite ou l’échec des politiques sociales !

Nous sommes en désaccord sur l’emploi, car votre politique est désastreuse. Vous acceptez cinq amendements dictés par le Médef, vous en retirez huit autres - parce que vous entendriez raison, ou par pression médiatique ? Nous suivrons dans le détail les débats à l’Assemblée nationale : il ne faudrait pas voir revenir par la fenêtre ce que vous faites sortir par la petite porte ! Vous nous avez dit tout le mal que vous pensez sur ces huit amendements, il ne faudrait pas que votre discours change selon l’hémicycle !

Nous ne sommes pas d’accord non plus sur le logement. Tant que le gouvernement comptabilisera les P.L.S. dans le logement social, les villes continueront de s’exonérer de toute obligation et de repousser tout logement P.L.U.S. ou P.L.A.I. : nous ne l’acceptons pas !

Enfin, le gouvernement se trompe, sur l’intégration des populations immigrées, en choisissant la régression plutôt que l’intégration.

Utiliser le lever de l’intégration pour gérer les problèmes des flux migratoires est une erreur colossale. Cela s’ajoute aux multiples événements relevés par Mme Assassi. Ce texte est un mauvais signe que la France va donner.

Roland Muzeau

Ancien sénateur des Hauts-de-Seine

Ses autres interventions :

Droit au logement opposable : explication de vote

Les sénateurs du groupe CRC se sont finalement abstenus lors du vote du projet de loi instituant un droit au logement opposable. Favorables à ce droit, bien avant la conversion subite du gouvernement, ils estiment que le texte voté est trop restrictif."Le processus d’opposabilité du droit au logement, a déploré Roland Muzeau, sera complexe, long et difficile à mettre en œuvre et ne sera pas le même partout. L’exemption dont bénéficieront certains territoires pèsera sur l’universalité du droit et l’égalité des demandeurs de logement devant la loi." Les sénateurs communistes se félicitent néanmoins de ce premier pas, accompli grâce à une mobilisation de terrain, et espèrent que le droit au logement prendra rapidement "un tour plus concret et plus ambitieux".

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