Il serait bon, avant d’entendre les critiques faites à l’encontre de nos amendements, que nous puissions d’abord les présenter : l’amendement n° 232 rectifié vise à supprimer l’article 52, qui donne le coup de grâce à Engie, anciennement GDF puis GRDF, en tant qu’entreprise publique.
L’histoire récente de cette entreprise montre bien ce que valent les mécanismes de garantie et de sécurité mis en place pour encadrer les privatisations et assurer le rôle central de l’État.
Il n’avait fallu que deux ans au législateur pour passer d’une entreprise pleinement publique à une société anonyme, sans majorité étatique de contrôle, en passant par une période dite « tampon » pendant laquelle la propriété publique était garantie à 70 % au moins du capital social. Puis 2014 fut l’année de la seconde banderille, avec une distinction entre détention de capital et détention des droits de vote pour affaiblir encore la présence de l’État.
Monsieur le ministre, vous nous avez dit à plusieurs reprises que vous ne comptiez pas refaire les erreurs commises lors des privatisations passées, notamment celles qui découlent de la mise en concession des autoroutes. Nous aurons, d’ici à quelques semaines, l’occasion de revenir sur ce sujet.
Vous comprendrez donc que nous soyons circonspects en la matière et que la levée du mécanisme de compensation permettant à l’État de continue à disposer d’une minorité de blocage ne nous agrée pas.
Notre opposition à la privatisation tient en quatre points particuliers.
Premièrement, nous regrettons que le Gouvernement fasse une nouvelle fois le choix de renoncer à des rentrées d’argent. Monsieur le ministre, on ne peut pas en même temps déplorer le déséquilibre budgétaire de l’État et refuser la part des 350 000 millions d’euros de dividendes que lui verse Engie chaque année – cela en fait d’ailleurs l’une des trois entreprises qui distribuent en relatif le plus de dividendes.
Deuxièmement, cette privatisation conduit à s’interroger sur la pérennité de la qualité du service public, notamment en matière de prix. Je l’ai évoqué précédemment, la libéralisation ne se traduit pas automatiquement par une baisse des tarifs ; même dans ce cadre, elle ne signifie pas que la qualité de l’offre sera maintenue.
La question qui se pose, monsieur Karoutchi, est non pas simplement celle de la production gazière, mais bel et bien celle de la distribution de cette énergie au plus grand nombre de Françaises et des Français.
M. Roger Karoutchi. C’est un tout !
Mme Cécile Cukierman. Troisièmement, nous nous interrogeons sur la pertinence de se retirer d’une entreprise stratégique en matière de transition écologique. De fait, la lutte contre le réchauffement climatique et la rationalisation énergétique sont le combat de ce XXIe siècle, et Engie est un outil non négligeable en la matière.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Cécile Cukierman. Quatrièmement, je rappelle qu’Engie constitue aussi un enjeu stratégique en matière de défense nationale. Au vu des enjeux auxquels doit répondre notre pays, le secteur dans lequel elle intervient doit être protégé et préservé.