Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à l’origine, la présente proposition de loi couplait les activités agricoles du littoral et de la montagne.
L’Assemblée nationale a largement adopté ce texte en ôtant la partie montagne. L’argument avancé est que la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, la loi Montagne, révisée en 2016, prend déjà en compte cette question en des termes identiques et apporte des solutions de même nature. Il reste donc dans la proposition de loi les activités agricoles et marines en zone littorale, d’où ma prise de parole devant vous aujourd’hui. Je suis élue en Bretagne, dans une zone où la question du littoral est importante.
Le constat est unanimement partagé : le foncier et l’immobilier agricoles participent pleinement à la pérennité de notre agriculture et du modèle familial que nous voulons préserver. Ce foncier fait l’objet d’une spéculation féroce, en particulier dans les zones littorales. Cela nuit au maintien de l’activité agricole et accélère l’artificialisation des sols.
Comme l’a souligné ma collègue Françoise Cartron, le taux d’artificialisation des communes littorales est de plus en plus élevé par rapport au reste du territoire. De même, au cours de ces quarante dernières années, la disparition des terres agricoles a été deux fois plus élevée que la moyenne métropolitaine.
Or l’agriculture occupe près de la moitié de la surface des communes littorales métropolitaines. Elle gère des espaces ouverts qui contribuent à la diversité des milieux naturels et à l’attrait des paysages. Mais, là aussi, notre vigilance s’impose. Dans mon département, les Côtes-d’Armor, la fréquence des algues vertes est, certes, moins visible, mais c’est parce que celles-ci sont ramassées plus souvent. Les dégâts écologiques persistent.
Cette attention aux milieux naturels permet le maintien d’une population permanente sur des territoires marqués par une forte fréquentation saisonnière.
C’est pourquoi la présente proposition de loi, qui a pour ambition de défendre l’économie agricole contre une économie résidentielle ou de tourisme, est bienvenue. Il faut éviter que ces bâtiments conchylicoles et les zones de marais salants ne se transforment en résidences secondaires « les pieds dans l’eau ». En effet, aujourd’hui, comme cela est souligné dans le rapport, le prix de vente d’un bâtiment à usage agricole à un privé peut être jusqu’à dix fois supérieur au prix de vente à un professionnel.
En l’absence de dispositifs juridiques et financiers de régulation, nous assistons à la disparition progressive du littoral naturel ou agricole. Les prix d’achat des terrains à bâtir plus élevés écartent les usages agricoles.
Il est nécessaire de porter le droit de préemption des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, les Safer, à vingt ans, contre cinq ans actuellement, pour éviter que les bâtiments ayant eu un usage agricole ne soient transformés en maisons d’habitation particulières. Seule la constitution de réserves foncières permettra de préserver ces espaces, alors même que la question de la transmission et de l’installation des entreprises est devenue un enjeu fort pour la filière conchylicole.
Des situations similaires ont pu être observées en zone de montagne, ces espaces étant soumis à des pressions touristiques et foncières de forte intensité. C’est pourquoi je regrette que l’extension de ce mécanisme à la montagne n’ait pas été retenue.
Toutefois, avec mes collègues du groupe CRCE, je voterai pour cette proposition de loi, qui constitue une avancée dans la lutte contre l’artificialisation des sols. Elle apporte un premier élément de réponse sans rouvrir, pour les connaisseurs, le fameux débat sur les dents creuses.