Ville et rénovation urbaine : explication de vote

Publié le 23 juillet 2003 à 00:00 Mise à jour le 8 avril 2015

par Odette Terrade

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre délégué,

Mes chers collègues,

Nous voici au terme de la discussion tantôt rapide, tantôt ralentie d’un projet de loi dont nous avions souhaité et pensé nécessaire qu’il ne soit pas inscrit à l’ordre du jour de notre Assemblée, en fin de session extraordinaire, à la "va vite".

Et l’impression de précipitation qui a guidé son inscription ne s’est pas estompée au fil de la discussion.

Nous, parlementaires du Groupe Communiste Républicain et Citoyen, avons eu l’occasion, notamment lors de la défense de la mention de renvoi à la commission, de pointer le fait que les enjeux de la politique de la ville auraient manifestement demandé un autre traitement et le report à la session d’automne de l’examen de ce projet de loi.

Revenons en au contenu, cependant.

Dans certaines opérations de rénovation urbaine, parfois, l’on propose aux habitants des ensembles locatifs sociaux de créer, à plusieurs centaines de mains, des mosaïques pour l’agrément de tous.

Cette mosaïque, hélas, sans trop de cohérence, c’est ce qui ressort de ce projet de loi qui aurait fort bien pu s’appeler « projet de loi portant diverses dispositions relatives à la ville, à l’initiative économique, à la rénovation urbaine et au surendettement « sans que l’on n’y trouve à redire.

Le projet de loi dont nous venons de débattre rassemble en effet des dispositions en apparence si hétéroclite que l’on peine à y trouver vraiment l’affirmation d’une volonté politique claire.

Quelques points semblent acquis, au - delà des déclarations de principe généraux et généreux des premiers articles du projet de loi.

D’une part, une forme de privatisation de l’intervention de l’Etat en matière de rénovation urbaine par la création de l’ANRU, qui peut conduire, in fine, à la mise en œuvre de logiques strictement commerciales dans la relation entre les collectivités locales et l’Agence, confrontée par exemple au remboursement de ses emprunts.

S’agissant des copropriétés dégradées, si l’on peut admettre le principe de l’intervention des élus locaux dans la gestion de ces ensembles immobiliers source de maintes difficultés pour les collectivités locales ( demandes de logements, sollicitation des services sociaux, etc.), on ne peut que regretter que notre Assemblée ait choisi, sur cette question, de s’en tenir à une ligne de déresponsabilisation des syndics dans les situations de crise ainsi révélées.

Concernant les zones franches, nous ne pouvons que confirmer notre grande réserve quant à l’efficacité de ces dispositifs dont les effets pervers sont connus, notamment sur la qualité de l’emploi, sans que toutes les garanties de pérennisation de l’emploi soient établies.

S’agissant du surendettement, nous resterons vigilants sur la mise en œuvre de la procédure de rétablissement personnel, tout en indiquant, en guise de conclusion provisoire sur cette question, qu’il conviendrait sans doute de développer tant la prévention du surendettement que les compétences et l’efficacité des commissions de surendettement.

Enfin, les mutations juridiques intervenues sur le statut des ’ entreprises sociales pour l’habitat ’ ( nom reconnu pour l’ancienne fédération des SA HLM ) auraient mérité un débat bien plus approfondi.

Enfin, et surtout, au - delà des effets d’affichage parfois séduisants qui ont accompagné tant la présentation que la discussion du projet de loi ( et nous ne doutons pas de votre sincérité en la matière, Monsieur le Ministre délégué ), c’est lors de la discussion de la prochaine loi de finances que nous verrons de quoi il retourne exactement.

Pour l’essentiel, les crédits affectés à l’ANRU sont en effet des crédits d’investissement sous forme d’autorisations de programme, alors que la politique de la ville nécessite aussi des moyens d’intervention publique au concret, au quotidien.

Qu’en sera-t-il demain par exemple des 2,5 milliards d’euros des crédits ministériels hors Ministère de la Ville avec les lettres de cadrage recommandant le gel en francs courants des dépenses publiques ?

Restructurer un centre commercial, c’est sans doute utile, mais si, à côté, le lycée ferme une section ou deux, faute d’enseignants, aura-t-on résolu les problèmes ?

La lecture des plus récentes décisions budgétaires interpelle d’ailleurs de ce point de vue.

Le 14 mars dernier, 120 millions d’euros ont disparu de la ligne PLA PALULOS et votre Ministère a perdu plus de 21 millions d’autorisations de programmes et plus de 20 millions en crédits de paiement, sur les chapitres du développement social urbain et du financement des grands projets urbains.

Vous comprendrez que nous vous donnions rendez - vous pour cet automne de ce point de vue pour voir quelle consistance ont les intentions affichées au cœur de l’été.

Il serait regrettable que le chant de la cigale se perde dans les brumes de l’austérité budgétaire imposée par les fourmis de Bercy.

C’est donc avec ce sentiment d’insatisfaction que nous ne pouvons que confirmer le vote négatif sur l’ensemble du projet de loi qui semble, hélas, bien éloigné de ce qu’il serait nécessaire de faire en matière de politique de la ville et de renouvellement urbain.

Odette Terrade

Ancienne sénatrice du Val-de-Marne

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