Chacun s’accorde à reconnaître l’urgence de renforcer les normes de sécurité relatives aux infrastructures et aux systèmes de transport et de généraliser aux transports terrestres et maritimes les procédures d’enquêtes jusqu’ici réservées aux accidents de l’aviation civile.
Après les événements tragiques qui se sont déroulés dans les tunnels du Mont-Blanc et du Gothard, il devenait impératif de disposer d’instruments de « retour d’expérience ».
En 1999, les 40 000 tonnes de fioul de l’Érika souillaient le littoral atlantique ; et en 2000, le Ievoli Sun, aux cuves pleines de produits chimiques toxiques, dont 4 000 tonnes de styrène, étaient en perdition en face du Cotentin.
Ces catastrophes prouvent qu’une politique plus soucieuse de l’environnement et des hommes doit renforcer les normes de sécurité fortement affaiblies par la déréglementation de ces vingt dernières années.
Nous ne pouvons donc que nous féliciter de l’inscription à l’ordre du jour de ce projet de loi, déclaré en urgence.
Nous nous félicitons également que la C.M.P. ait abouti malgré les divergences apparues dans la navette, notamment concernant l’introduction des dispositions dites « Seveso II » relatives au stockage souterrain de gaz naturel, d’hydrocarbures et de produits chimiques. Cette transposition partielle de la directive gaz, répond à l’impérieuse nécessité de prévenir les risques industriels mis en évidence par la déflagration meurtrière de l’usine A.Z.F.
Il y a encore beaucoup à faire pour réduire la probabilité de tels accidents : surveiller les conditions de travail, freiner la libéralisation des économies, le développement de la sous-traitance et du travail précarisé autant de facteurs de déstabilisation des collectifs de travail, donc d’affaiblissement de la sécurité. Notre groupe lors de la discussion de l’article 38 du collectif budgétaire, concernant les réseaux de transport de gaz naturel, en a encore fait la démonstration.
Comment le Breton que je suis pourrait-il ne pas rappeler combien l’abandon de l’organisation du transport maritime aux règles du marché mondial a accru la probabilité des accidents dont on connaît, par expérience hélas, la gravité ? Le dumping social, la réduction drastique des coûts, le contournement des règles internationales sont pratiques courantes…
Monsieur le Ministre, vous avez œuvré en faveur d’un retour à une plus stricte réglementation internationale, en proposant et promouvant activement, au cours de la Présidence française, le paquet « Érika I » que l’Union européenne a définitivement adopté le 5 décembre dernier.
Ce « paquet », en regroupant trois directives, renforce la sécurité.
La première vise à responsabiliser les sociétés de classification qui effectuent les contrôles techniques. La deuxième renforce les contrôles des navires « à haut risque » des infrastructures portuaires. La troisième vise l’élimination entre 2003 et 2015 des pétroliers à simple coque.
Ce dispositif sera bientôt complété par le paquet « Érika II », déjà examiné par le Parlement européen et pour lequel une position commune sera vraisemblablement décidée sous la Présidence espagnole.
L’indemnisation des victimes des pollutions maritimes sera alors améliorée, puisque l’une des dispositions crée un fonds complémentaire au FIPOL, dont chacun reconnaît aujourd’hui les insuffisances notoires.
À cela s’ajoutent la création de l’agence européenne maritime de sécurité, l’accroissement des moyens techniques en matière de contrôle du suivi du trafic maritime…
Pour autant, monsieur le Ministre, vous l’avez vous-même souligné ici, le 24 octobre dernier, la sécurité n’est pas qu’une affaire technique, selon la conception « étriquée » à laquelle certains s’accrochent. Pour réduire le nombre des accidents, il faut aussi faire obstacle à une concurrence acharnée, tirant vers le bas les normes sociales, car il y a interaction, entre la dimension technico-économique et les conditions de travail, la formation et la qualification.
En ce domaine aussi, l’harmonisation européenne par le haut doit se poursuivre. C’est peu dire que nous comptons sur vous… Nous voterons l’amendement du gouvernement en faveur de la politique intermodale des transports. Celle-ci nécessite une volonté, vous l’avez, et des investissements à court et moyen termes.
Nous voterons le projet de loi. (Applaudissements.)