Régulation des activités postales, seconde lecture : explication de vote

Publié le 10 mars 2005 à 00:00 Mise à jour le 8 avril 2015

par Michel Billout

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers Collègues,

En quelques heures de débat, marqué par la faiblesse de participation des sénateurs de la majorité, parfois même leur absence, vous avez une nouvelle fois montré votre volonter de livrer le service public aux intérêts du capital, cedant au dogme de la libéralisation imposé par la commission européenne et le gouvernement.

Monsieur le Ministre, vous nous disiez hier qu’on ne pouvait s’opposer aux points poste uniquement par idéologie, mais de quoi d’autre s’agit-il dans votre réforme que de l’application primaire des principes ultra libéraux, qui ont pourtant, on en a des exemples, tant au niveau européen qu’au niveau national,, démontrés leur contre performance économique et sociale ?

Dans l’application de ces principes, vous vous montrez particulièrment zélés en allant nettement plus loin que ce qu’impose les directives communataires.

Aujourd’hui, c’est bien la disparition programmée du service public postal dont il est question, alors même que la Poste est un pilier fondamental de l’unité de la République Française, le symbole de l’ intêt général territorialisé.

Sans revenir sur l’ensemble de nos débats, je voudrais insister sur quelques points que je juge particulièrement néfastes :

Il s’agit premièrement du désengagement de l’Etat de ses missions d’aménagement du territoire et de garant de la cohésion nationale. La présence d’un bureau de poste de plein exercice dans les communes rurales, comme dans les quartiers sensibles est un atout inestimable pour les populations, qui ne peut se jauger à l’aune de la rentabilité marchande.

D’autre part, la création d’un établissement de crédit postal, filiale de la poste dont la vocation est d’être privatisée rapidement selon toute vraisemblance, remet directement en cause l’existance d’un service public bancaire, qui lutte contre l’exclusion en offrant à tous des prestations et permet de contenir contre l’envolée des taux bancaires.

La question du financement du service public n’a été que trop partiellement évoquée et certainement pas résolue.

Toute forme de péréquation nationale est finalement renvoyée aux collectivités locales par le biais de la création du fonds de péréquation nationale qui sera très insuffisament financé par l’abbatement dont bénéficie la poste sur les taxes locales.

Parallèlement, la création immédiate d’un fonds de compensation, obtenue au cours de ces débats, ne prévoit rien quand aux ressources de ce fonds, pas une seule fois vous n’avez évoqué concretement la contribution des opérateurs privés, comme il vous l’a été proposé. Ils ne sont pourtant soumis à aucune obligation de service public.

Pour le dire plus clairement, vous ne recherchez pas les financements du service public là où se trouve les richesses, en préférant remettre à plus tard la question du financement du fonds de compensation.

La restructuration du réseau postal, par la multiplication des agences postales communales et des points poste crée une rupture d’égalité de traitement des usagers du service public.

Nous ne pouvons être satisfait de ce service public a minima que vous nous proposez. Ces structures ne pourront répondre aux besoins concrets de la population.

La création de l’autorité de régulation des communications électroniques et des postes correspond à un désengagement clair de l’Etat qui préfère confier à des experts le soin de réguler le marché postal et notamment de fixer les tarifs du secteur reservé.

Ce désengagement est aussi caractérisé par votre volonté de renvoyer à un décret pris en Conseil d’Etat la définition même des caractéristiques du service universel.

Pour toutes ces raisons, les sénateurs du groupe communiste, républicain et citoyen voteront contre ce projet de loi.

En ouvrant à la concurrence le secteur postal, vous privatisez les profits et socialisez les pertes. En conséquence, la Poste ne pourra pas assumer ses obligations de service public, tandis que les nouveaux entrants trouveront de cette manière une nouvelle source de bénéfices. La péréquation entre les différentes activités de la Poste était pourtant le gage de sa capacité à financer le service public.

Mais la page n’est pas tournée en même temps que ce débat prend fin. Il y aura d’autres ressemblements d’élus comme celui de samedi dernier à Guéret, d’autres grandes journées d’action des salariés comme celle d’aujourd’hui.

Malgré vos efforts pour revenir sur tous les fondements de notre société, vous ne pourrez parvenir durablement à convaincre la population qu’il faut supprimer les services publics et accepter la loi de marché comme seul fondement de la vie de la cité, sous pretexte de moderniser la France.

Nous aussi nous souhaitons que les services publics évoluent, mais dans le sens d’une plus grande qualité, d’une meilleure prise en compte des besoins des populations, de toutes les populations, en terme de communication.

C’est dans ce sens que nous nous engageons dans la campagne contre le projet de constitution européenne pour que l’union européenne soit un moyen de faire partager au niveau communautaire une garantie commune de solidarité.

C’est aussi dans ce sens que nous avons déposé une proposition de résolution contre la directive Bolkestein. Les services publics doivent, en effet, être le pilier de la construction de l’Europe.

Michel Billout

Ancien sénateur de Seine-et-Marne
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