Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègue,
Je débuterai mon intervention en donnant la parole à Monsieur André Poupard, maire de Lizières, petite commune de la Creuse : « Dans la Creuse, les bureaux de poste deviennent des agences postales. Dans ma commune, elle est tenue par la secrétaire de mairie. Quand elle peut, et elle ne fait rien de financier, elle essaie simplement de vendre quelques timbres. Le centre de tri est à Limoges : quand j’envoie une lettre dans une commune voisine, elle fait 120 kilomètres aller-retour ! Le courrier n’arrive plus jamais le lendemain. Parfois, il faut 5 ou 6 jours. ».
Ce témoignage pourrait être celui de centaines d’élus qui ont fait entendre à de nombreuses reprises leur mécontentement, notamment au dernier congrès des maires ou plus récemment samedi dernier à Guéret.
Il est vrai que pour se préparer à la mise en place progressive de la concurrence dans le domaine postal, La Poste a engagé différentes restructurations, notamment en séparant l’activité colis, puis en séparant l’activité courrier de l’activité grand public, en réorganisant le tri autour de grandes plateformes automatisées, en fermant de nombreux bureaux de poste et en les transformant en agences postales communales ou en point-poste, le tout s’accompagant de la création de nombreuses filiales : plus de 115 à ce jour.
L’emploi y a beaucoup perdu, particulièrement l’emploi statutaire souvent remplacé par des contrats précaires sous payés, et la qualité du service s’est dégradée de manière significative, essentiellement dans les secteurs ruraux de notre pays.
S’agirait-il donc, aujourd’hui, de réagir à ce début de déclin, fortement marqué, du service public postal dans notre pays ?
Hélas non ! En transposant, avec un zèle tout particulier, deux directives communautaires de 1997 et 2002, ce projet de loi dit de régulation postale, a pour seul objectif l’instauration d’un cadre pour le marché postal dont l’ensemble des activités s’ouvrent à la concurrence, à l’exception d’un petit secteur réservé à l’opérateur historique, que La Poste a pu conserver parce que non rentable pour des opérateurs privés recherchant principalement le maximum de profit dans le développement de leurs activités.
Ce projet de loi s’inscrit en cohérence avec les démantelements du service public mis en oeuvre dans d’autres secteurs comme les transports aériens et ferroviaires, les télécommunications, l’énergie...
Il s’inspire largement des orientations ultralibérales de la Commission Européenne et de l’Organisation Mondiale du Commerce, orientations qui sont l’essence même de l’Accord Général sur le Commerce et les Services et de la directive Bolkestein.
Ce sont ces principes qu’on nous propose d’adopter définitivement avec le projet de constitution européenne qui fait de la concurrence libre et non faussée le fabuleux objectif à atteindre pour le XXI e siècle.
Ce projet de loi illustre parfaitement cette vision libérale qui sanctifie le marché, la rentabilité et le profit en niant les fondements même du contrat social, qui place la solidarité et l’égalité au coeur de l’action politique,
Vous comprendrez alors que les sénateurs communistes, républicains et citoyens ne peuvent adhérer à un tel projet. A la libre concurrence, ils opposent l’exigence de coopérations, plus aptes à satisfaire les besoins fondamentaux des peuples européens.
La volonté conjointe du gouvernement, de la commission européenne et de l’OMC visent, je l’ai dit, à soumettre l’ensemble des activités humaine à la libre concurrence.
Pourtant, nous commencons à voir en Europe les conséquences néfastes pour les peuples, de ces politiques visant à la remise en cause de l’ensemble des services publics.
Quelles améliorations notables, peut-on constater pour les usagers, dans les différents secteurs touchés par la libéralisation ?
Les tarifs augmentent et le service fourni ne correspond pas aux besoins exprimés, sans parler des personnels qui sont les premières victimes de ces restrucuturations...
Notons à ce propos, que l’un des arguments évoqué pour justifier cette évolution des activités de service public est de pointer leur situation monopolistique, il est alors étonnant de constater que souvent l’ouverture à la concurrence a permis la mise en place de monopoles privés.
Avec cette loi, ce sont des pans entiers du service postal qui seront ouverts à la concurrence, en contrepartie desquels les opérateurs privés ne seront soumis à aucune obligation de service public que ce soit pour la desserte de l’ensemble du territoire, ou l’égal accès aux services.
Le secteur réservé, c’est-à-dire le secteur restant sous la seule responsabilité de l’opérateur historique, se réduit comme peau de chagrin : en 2006, seul l’envoi et la distribution des lettres de moins de 50 grammes seront réservés à la Poste. En 2009, toute l’activité courrier sera libéralisée.
Vous semblez oublier un peu vite que les services publics, tels qu’on les connaît en France depuis la Libération, sont non seulement le fruit d’exigences modernes de solidarité humaine et territoriale, d’égalité des chances pour tous mais ont aussi fait la demonstration de leur performance économique et sociale en menant notre pays sur la voie du progrès partagé.
Leur maîtrise par la puissance publique n’est ni coût ni un effort pour la société. Elle est le corollaire des principes fondateurs du service public qui sont ceux de la péréquation tarifaire, de la continuité territoriale, de l’égalité de traitement, et de l’accès de tous. Des principes reconnus constitutionnellement que ce soit dans la déclaration des droits de l’Homme ou dans le préambule de la constitution de 1946. Vous proposez pourtant dans cette loi de ne pas en tenir compte.
Si vous prétendez ne pas vouloir revenir sur les missions remplies par la Poste en tant que service public, vous mettez en place les outils de sa future privatisation. Un simple amendement de la majorité du Sénat en première lecture, prévoit ainsi la création de l’Etablissement de Crédit Postal présenté comme devant rester public, mais autorisé à mettre en bourse une partie de son capital. Ce qui permet à M. Daniel Bouton, président de la Société Générale et président de la Fédération bancaire française, de déclarer sur LCI que la seule vocation de la future banque postale, "c’est d’être privatisée dans les deux ans".
L’entrée des intéréts privés dans les activités financières de La Poste ouvre une phase inédite où les exigences du service public se confronteront aux exigences de rentabilité des capitaux privés. Plus que jamais, les intérêts financiers des actionnaires pèseront lourdement en exigeant la pression sur les salaires, la dégradation des conditions de travail, l’explosion de la précarité et au final le déclin du service public.
En effet, il n’est pas d’exemple où l’ouverture du capital ne s’est soldée par l’élargissement de la part acquise par le privé, la soumission à l’entreprise aux impératifs de rentabilité financière et à terme la privatisation.
On comprend bien que cette activité de la Poste intéresse le capital. En 2002, les activités financières de cette entreprise publique représentait 23 % du chiffre d’affaire de la poste, tandis que les encours représentaient 200 milliards d’euros. La poste gère 48 millions de comptes pour 28 millions de clients.
Dans cette logique de filialisation, le sénateur Marini, rapporteur de la commission des finances, avait raison de déclarer, je cite : « les fermetures de petits bureaux de poste seront surtout de la responsabilité de la future banque postale ».
La gestion du réseau postal sera donc de la responsabilité de la filiale et non de l’entreprise publique. Les critères de rentabilité économique seront alors les plus importants. Ainsi, sur le constat que moins de 10 % des points de contact de la poste réalisent plus de la moitié de la collecte des services financiers, il sera facile de légitimer la fermeture de nombreux bureaux.
On ne peut alors que regretter que la majorité du Sénat soit à l’origine de cette création, nullement demandée par les directives européennes.
Pour les sénateurs communistes, républicains et citoyens, le Service Public est amené à jouer un rôle social important, il doit être un acteur économique disposant d’un pôle public de financement. Ainsi, cette activité de la Poste ne doit pas être filialisée mais intégrée aux autres activités.
Le développement des activités financières de la Poste doit se faire en cohérence avec les autres activités postales pour permettre la péréquation entre des activités plus ou moins rentables.
Nous n’avons pas besoin d’une nouvelle banque de détail mais d’un service public bancaire qui permette de lutter contre l’envolée des tarifs bancaires et de donner accès à tous au service de base.
La Poste devrait aussi pouvoir répondre aux demandes de prêts des jeunes qui s’installent ou achètent leur première voiture, répondre aux besoins de crédit des artisans. Bref, offrir des prestations bancaires diversifiées pour répondre à l’ensemble des besoins.
Pourtant le contrat de plan 2003/2007 n’est pas allé dans ce sens en autorisant uniquement le crédit immobilier sans épargne préalable jusqu’en 2008.
Mais revenons sur un aspect plus fondamental du rôle de la banque postale, celui de répondre positivement à toute demande de création de compte sur livret selon l’article L 221-10 du code monétaire et financier. Il s’agit d’une contrainte de service public pur lutter contre l’exclusion bancaire.
Or, votre projet de la loi crée pour La Poste l’obligation légale d’offrir des services « au plus grand nombre », ce qui est très réducteur. Vous nous proposez donc que la Poste, en étant filialisée, n’assume plus ses obligations de service public.
Autre point abordé par ce projet de loi : celui de la présence postale. Jacques Chirac dans son discours du 13 avril 2002 avait déclaré que « la présence de l’Etat dans nos campagnes est un gage d’équilibre du territoire et une obligation pour que chaque français puisse bénéficier d’un égal accès aux services publics ». Il reconnaissait ainsi aux services publics, et, par conséquent, à la Poste, des missions d’aménagement du territoire et un rôle fondamental de cohésion sociale. On ne peut vraiment pas dire que ce projet de loi s’en inspire.
En effet, sur le constat que 17 % des bureaux de poste desservent 50 % de la population pour 60 % des bureaux qui desservent 18 % de la population, la loi et le contrat de plan prevoit l’évolution du réseau postal.
Par évolution du réseau postal, il faut ici entendre fermeture de bureaux ou transformation en agences postales communales et en points poste d’au moins 4000 des 17000 bureaux qui ne seraient pas jugés assez rentables.
Cette évolution du réseau veut ainsi mettre en oeuvre les nouveaux critères de gestion axés sur la performance. Mais de quelle performance parle-t-on ? Il ne s’agit évidemment pas de la performance sociale.
Il ne faut pas non plus se leurrer, la fermeture prévisible de bureaux de poste dans les campagnes n’entraînera pas création de bureaux dans les villes, ou dans les zones peri-urbaines qui en auraient pourtant besoin pour lutter contre l’exclusion et permettre une revitalisation des quartiers.
Ainsi en Seine et Marne, 3 points poste ont été créés en ce 1er trimestre 2005, l’un en remplacement d’un bureau de poste dans une commune de 800 habitants et 2 en milieu urbain à forte progression démographique en complément de bureaux de poste saturés. On voit donc bien ici que les points poste ne sont pas réserver à la présence postale en milieu rural mais constituent une alternative pour l’ensemble du territoire. Il s’agit donc d’une forte dégradation de la qualité du service qui est engagée.
Pour nos campagnes, ce projet de loi signifie également le désengagement de l’Etat qui ne joue plus son rôle de garant de l’égalité territoriale.
Dans ce sens, l’Assemblée nationale a adopté un amendement proposé par la commission des affaires économiques qui indique que « sauf circonstances exceptionnelles, pas plus de 10 % de la population d’un département ne peut se trouver éloigné de plus de 5 km d’un point d’accès à la poste ».
Cette précision de l’Assemblée Nationale est très en retrait par rapport à l’existant. Le service comunication de La Poste indique qu’aujourd’hui 96 % de la population se trouve à moins de 5 km d’un point de contact. L’application de la loi, si elle était ainsi adoptée, permettrait donc à La Poste de fermer 3 OOO points dits de contact.
Déjà, beaucoup de communes doivent faire face au départ de leurs services publics : école, hôpital, perception... La fermeture d’un bureau de poste aggraverait encore la perte d’actifs de ces communes, la perte d’un lien social de proximité. Le gouvernement ne peut pas condamner des territoires déjà en crise pour de simples raisons comptables.
Si la répartition doit en effet s’adapter au regard de l’évolution démographique, on ne peut imaginer d’avenir pour les territoires ruraux sans maillage fin du territoire par les services publics. la Poste incarne en effet l’intérêt général territorialisé.
Toutes ces raisons expliquent que les maires soient attachés au service public de proximité comme ils viennent de le rappeler samedi à Guéret ou encore par le dépôt aujourd’hui au Sénat de milliers de signatures d’élus à l’initiative de l’Association des Maire Ruraux.
Leur colère est d’autant plus grande, que les collectivités vont subir une nouvelle fois de plein fouet le désengagement de l’Etat. Ce sont-elles qui vont indirectement abonder le fonds national de pérequation, prévu par le contrat de plan. Ce fonds sera en effet alimenter principalement par l’éxonération de taxe professionnelle et de foncier bâti dont bénéficie aujourd’hui La Poste. Cette éxonération est estimée à 150 millions d’euros alors que La Poste situe le déficit à plus de 500 millions d’euros pour maintenir sa présence en milieu rural. Non seulement les recettes prévues sont injustes mais de plus elles risquent d’être insuffisantes. N’aurait-on pu imaginer un financement alternatif ? Par exemple par une taxe additionnelle sur les produits financiers ? Nous y reviendrons dans le débat.
La proposition faite aux élus locaux de financer des agences postales communales s’ils souhaitent le maintien de cette activité sur leur commune est tout simplement du chantage pour les collectivités territoriales déjà lourdement mises à contribution par les lois de décentralisation.
Dans le projet de loi, il est question de « zone de vie », de bureau de proximité, d’agences postales et de points de contact, qu’est-ce que cela signifie en terme de qualité de service ?
En ce qui concerne les points de contact, quelques soient les qualités, certainement indéniables, du commercant, il ne pourra rendre les mêmes services que les postiers.
Les points poste offrent des conditions d’exercice limité et des services réduits, notamment en ce qui concerne les prestations bancaires qui seront pour la plupart exclues de leur compétence.
Comment maintenir l’égalité entre les usagers selon qu’ils béneficient dans leur communes d’un point poste, d’une agence postale communale ou d’un bureau de poste en plein exercice ?
De plus, qu’en sera-t-il du respect de l’article L3-2 du code des postes et des télécommunications qui stipule que « toutes les offres de services postaux sont soumises aux règles suivantes : garantir la sécurité des usagers, des personnels et des installations, garantir la confidentialité des envois par correspondance, et l’intégrité de leur contenus » ?
La confidentialité sera difficile a maintenir si ce ne sont pas des professionnels qui assurent le service postal : comment fera-t-on pour justifier le besoin de découvert, quelle confidentialité pourra être garantie quand un usager recevra une lettre d’un tribunal, d’un huissier ?
Comment le tenancier d’un point poste devra gérer la situation en cas de non remise d’un recommandé, qui, soit dit en passant, ne fera plus partie du domaine reservé dans le cadre des procédures administratives ?
Quid de la force juridique du recommandé selon l’opérateur choisi ? Quel sera le statut des 17 000 points de contact ? Qui les financera ? Autant de questions en suspend auquelles la loi devrait répondre.
Vous prétendez maintenir les 17 000 points de contact alors que la loi n’en imposera plus réellement que 14 000 et que la réduction drastique des bureaux de plein exercice, c’est à dire , où les usagers peuvent effectuer l’ensemble des opérations ne peut que se traduire par une baisse de la qualité des prestations et une rupture du principe d’égalité de traitement des usagers.
Les citoyens ont les mêmes devoirs mais aussi les mêmes droits, notamment d’accès aux services publics.
De plus, la banalisation des tarifs spéciaux permettra aux grands clients de la poste de négocier des prix à la baisse alors que les particuliers, les artisans et les petites entreprises n’auront pas cette possibilité. La péréquation se fera alors sur la base d’un rapport de force entre particuliers et grandes entreprises.
La libéralisation entraînera à terme la fin de la "péréquation tarifaire" et la multiplication de services chers comme Chronopost. En particulier, les fermetures en cours des centres de tri internationaux aboutissent à la suppression du courrier international à tarifs accessibles.
Avec l’ouverture à la concurrence, ce sont 43 % des recettes liées au courrier qui pourraientt être perdues dès 2006, notamment en raison de l’importante dérogation au monopole accordé à la Poste concernant les entreprises dont l’activité de courrier est importante. Il peut s’agir des entreprises de vente par correspondance, par exemple, si elles assurent elles mêmes cette activité ou crée une filiale.
Dans ces conditions, comment financer le service universel ?
Par une augmentation conséquente du prix du timbre ? C’est déjà fait, le prix du timbre a été augmenté de 50 à 53 centimes d’euros le 1er mars 2005, soit une augmenation de plus de 15 % en deux ans, essentiellement supportée par les familles. Mais, de plus, l’augmentation du prix du timbre ne suffira sans doute pas…
A ce sujet, de quelles garanties dispose-t-on aujourd’hui que le prix du timbre restera identique sur l’ensemble du territoire ?
En effet, les obligations de service universel sont de garantir l’existence dans chaque état membre d’un service postal offrant une ensemble de service de qualité tant en termes de prestations, que de présence territoriale à un prix abordable.
Cette définition du service universel ne garantit donc pas un prix unique, mais un prix orienté sur les coûts. Le principe d’égalité de tarification sur tout le territoire risque donc d’être abandonné.
La mutualisation par le prix du timbre identique en tout point du territoire était pourtant un exemple pertinent de péréquation nationale.
Ce qui m’amène à la question du financement du service universel : dès lors que les activités les plus rentables de la poste feront parties du domaine concurentiel, en particulier le courrier industriel et les colis, ce service ne pourra plus bénéficier des excédants qu’il dégageait.
Pour les sénateurs du groupe communiste, républicain et citoyen, il faut financer le service public par la péréquation nationale qui permettrait de faire face à au developpement des activités de la poste et conserver l’infrastructure sous monopole public.
Cependant, sur ces questions, le gouvernement reste très flou en prévoyant éventuellement, après la remise d’un rapport au Parlement dans deux ans, la création d’un fonds de compensation pour le financement du service universel, s’il s’avérait que la Poste ne puisse pas y subvenir.
Ce n’est pas dans deux ans, dans un an ou dans dix ans, c’est aujourd’hui qu’il faut se doter d’un fonds de compensation, évaluer les besoins, prévoir son financement, notamment de la part de l’Etat et par la contribution des opérateurs privés.
Vous refusez de réaliser une véritable évaluation des conséquences des politiques de libéralisation avant de poursuivre aveuglément dans cette voie, mais par contre vous estimez nécessaire de réaliser un audit avant de décider la création d’un fonds de compensation pour le financement du service public. C’est étrange comme, selon les circonstances, votre méthodologie est différente.
Il faut créer dès maintenant un fonds de compensation. Car que si l’on ouvre à la concurrence les secteurs rentables de l’activité postale, si l’on filialise les activités de La Poste, celle-ci aura les plus grandes difficultés pour financer l’ensemble de ses obligations de service public. Vous le savez très bien.
A côté du service universel, la Poste remplit d’autres missions d’intérêt général, comme l’aménagement du territoire et de la distribution de la presse. Elles justifient d’autant plus la création d’un fonds de compensation.
Ainsi, si la poste reste soumise à de lourdes contrainte d’intérêt général (tarifs préférentiels à la presse, maillage du territoire en milieu rural, charge de gestion des petits livrets A), elle ne dispose actuellement d’aucune aide publique. Elle a, bien au contraire, par le passé, contribué à alimenter les recettes du budget de l’Etat.
Selon le conseil de la concurrence, 211 millions d’euros restent à la charge de la Poste pour l’aménagement du territoire.
Quand aux besoins pour la presse, il s’élève à 290 millions d’euros pour la Poste sur un côut global de 1,2 milliard d’euros par an, ceci dans un contexte d’augmentation croissante des coûts de la presse.
Pourtant, il est du rôle de l’Etat de garantir la liberté et la diversité de la presse.
Finalement, la libéralisation du secteur postal fait peser de lourdes inquiétudes sur l’avenir de la Poste et des services qu’elle rend.
En effet, les concurrents de la Poste vont se précipiter sur les secteurs les plus rentables de l’activité courrier. Ils vont pouvoir y offrir des prix plus bas, n’ayant pas à assumer de prestations de service public.
La Poste ne pourra pas, en l’état de la réforme, résister à cette concurrence absolument déloyale. Elle ne pourra plus compenser les charges consécutives à ses obligations de service public avec des activités plus rentables.
Pour rester compétitive, elle sera amener à réduire ses prestations de service public et à baisser les prix offerts à ses principaux clients. Une solution pour limiter les coûts d’exploitation consiste tout simplement à fermer des bureaux de Poste, de leur substituer des agences postales communales ou des points-poste.
Cette loi aura donc de lourdes conséquences sur les personnels. Actuellement, près de 50 % des postiers perçoivent un salaire légèrement supérieur ou égal à 1000 euros par mois. Les conditions d’acivité se sont tellement dégradées que la médecine du travail parle de véritable souffrance au travail.
La logique libérale s’oppose à une logique de développement économique et de l’emploi. Selon les syndicats, de 20 à 30 % des emplois actuels sont menacés. Sur 140 000 départs prévus d’ici à 2012, La Poste ne prévoit d’en remplacer qu’un sur deux.
Déjà un tiers des emplois statutaires ont été remplacés par des emplois sous contrat privé depuis 1994. La précarisation explose. La Poste utilise 6 % de sa force de travail en CDD.
L’ouverture du capital est censée créer de nouveaux emplois par l’émergence d’une offre privée, comme cela est indiqué dans la directive de 2002. Hors c’est faux, comme le démonterent l’expérience en Europe. Ainsi en Suède où 15 000 emplois ont été supprimés dans le secteur public, les opérateurs privés n’ont créé que 1500 emplois, soit 10 % des emplois perdus. En Allemagne, depuis 13 ans les effectifs sont passés de 390 000 à 230 000 salariés.
Au contraire, la Poste devrait permettre dans sa politique de personnel l’amélioration des conditions de travail en ne contribuant pas à la précarisation de l’emploi.
Pour résumer notre vision des choses, il est du rôle de l’Etat de financer ses obligations en matière de solidarités territoriales, de lien social et de service public. Il faut inscrire dans la loi les principes d’égalité d’accès des usagers, la continuité du service postal et l’aménagement du territoire pour les garantir et aussi prévoir les moyens de son financement.
Il est parallèlement urgent de moderniser le service public pour permettre la définition d’une réponse moderne aux défis de notre temps en matière de communication.
Les services publics doivent être le pilier de la construction de l’Europe, pour le développement partagé économique, scientifique, social des peuples.
L’union européenne ne doit pas être une remise en cause du service public mais un moyen de faire partager au niveau communataire une garantie commune de solidarité.
C’est pour cette raison que nous voulons un autre traité que l’actuel projet de constitution qui définissent d’autres objectifs que les orientations libérales de la politique actuellement menée par l’Union.
Et c’est le sens de l’ensemble des amendements que nous proposons afin de modifier comme il se doit ce projet de loi.