Mobilisation pour le logement et la lutte contre l’ exclusion : explication de vote

Publié le 21 octobre 2008 à 13:54 Mise à jour le 8 avril 2015

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, ce serait une gageure de vouloir résumer en quelques minutes le contenu des discussions qui nous occupent depuis plusieurs jours et plusieurs nuits sur un texte portant le titre positivé de « Mobilisation pour le logement et lutte contre l’exclusion » : le flacon était en apparence attirant ; le contenu ne porte pas vraiment à l’ivresse.

C’est avec une grande déception que nous faisons ce constat. La suppression de l’article 17 et, un temps, celle de l’article 21 nous ont certes donné satisfaction, mais ce fut de courte durée.

Un seul de nos amendements, l’amendement no 654, a été adopté, alors que nous avions fait de nombreuses propositions. Nous considérons, après toutes les modifications qui ont été apportées au texte, que le présent projet de loi tient plus du désengagement national de l’État pour le logement que de la mobilisation.

Quelle mobilisation pour le logement lorsque les premières mesures consistent à faire payer les organismes d’HLM prétendument riches en lieu et place de l’État ?

Quelle mobilisation lorsque le texte procède au racket des ressources du 1 % logement, pour mieux justifier la disparition des dotations budgétaires correspondantes ?

Quelle mobilisation lorsque l’on demande au mouvement HLM de venir au secours des promoteurs aux prises avec leurs stocks de logements invendus et invendables, comme on le constate à l’article 4 ?

Quelle lutte contre l’exclusion lorsque l’on organise, au travers d’une mise en coupe réglée de la gestion locative des organismes d’HLM, l’expulsion programmée des retraités sans enfants, des couples de salariés moyens et même modestes ?

Quelle lutte contre l’exclusion lorsque, au motif de préserver le droit de propriété, on facilite encore un peu plus la mise en œuvre des procédures d’expulsion locative, sans considération pour le drame humain que constituent ces procédures ?

Quelle lutte contre l’exclusion lorsque l’on assimile hébergement d’urgence et logement, lorsque l’on pervertit le sens de la loi DALO ?

Vous déposez un recours dans le cadre de la loi DALO ? Fort bien ! Alors, acceptez d’être relogé loin de votre domicile actuel, loin de votre lieu de travail, à Trifouillis-les-Oies ; je crois que M. le rapporteur préfère Trifouillis-les-Olivettes (Sourires.), mais cela ne raccourcira pas les distances que devront parcourir les personnes relogées.

Et que dire de l’accroissement programmé des effets du surloyer, de la précarisation du maintien dans les lieux et des contrats de location, de la mise en cause, même, du droit de se loger là où on le souhaite, là où l’on peut avoir des attaches, des relations, des amis, des pratiques sociales et culturelles ?

La vérité de ce projet de loi, c’est qu’il est marqué par la pression continue de la régulation budgétaire. Faiblement consommés - la non-réalisation des objectifs de mises en chantier de logements le confirme -, les crédits de la mission « Ville et logement » sont véritablement massacrés dans le projet de budget pour 2009. Le présent projet de loi accompagne le mouvement.

Oui, madame la ministre, mes chers collègues, vous escomptez que l’expulsion de locataires à revenus moyens vous dispensera de construire les logements sociaux qui manquent cruellement aujourd’hui pour répondre aux besoins !

Oui, vous attendez des ponctions sur l’argent des organismes d’HLM comme des collecteurs du 1 % qu’elles vous permettent de réduire autant que faire se peut les crédits, un peu plus de 2 milliards d’euros actuellement, que, dans le budget de la mission, le Gouvernement consacre encore à autre chose qu’aux aides personnelles au logement !

Oui, vous espérez des conventions d’utilité sociale qu’elles conduisent les bailleurs sociaux à vendre leur patrimoine et à autofinancer le plus possible leurs investissements pour vous éviter de verser les subventions !

Madame la ministre, c’est Bercy qui vous a tenu la main quand vous avez rédigé ce projet de loi ! (Mme la ministre proteste vigoureusement.) C’est en tout cas ce que donne à penser sa lecture !

Toutes les mesures phares du texte ne servent qu’un seul but : réduire encore et toujours la dépense publique destinée au logement sans tenir compte de la réalité ni de l’urgence des besoins.

Durant toute la discussion, madame la ministre, vous êtes restée d’une grande courtoisie ; pourtant, nous avons cherché dans ce texte la députée nourrie d’humanisme qui s’insurgeait en 2007 devant l’affaire du canal Saint-Martin et qui, pendant l’hiver de la même année, défendait avec conviction le droit au logement opposable. Serait-ce l’épreuve de la réalité des contraintes budgétaires qui vous a amenée à accepter la véritable purge budgétaire qui se profile derrière ce projet de loi ? C’est en tout cas ce que nous y voyons.

Pour notre part, nous n’avons pas varié quand il s’agit des locataires, des accédants à la propriété, des mal logés, des sans-abri, de tous ceux qui ont faim de droits, notamment de droit au logement.

C’est pourquoi les sénateurs du groupe CRC voteront résolument contre ce projet de loi.

Odette Terrade

Ancienne sénatrice du Val-de-Marne

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