La liberté d’expression et de la presse est un fondement de notre démocratie. La distribution des journaux, qui ne sont pas un bien comme les autres, y participe. La loi Bichet a consacré des principes fondamentaux qui gardent aujourd’hui toute leur valeur. L’égalité de traitement pour tous les titres est assurée par le système coopératif, à la bonne application duquel le CSMP est chargé de veiller.
Cependant, l’essor du numérique met en cause le modèle économique de la presse écrite et la lutte pour la répartition de la valeur fait rage entre les acteurs, qui peinent à s’accouder sur une réforme jugée pourtant par tous nécessaire. Le CSMP, dépourvu de pouvoirs contraignants, n’a pu élaborer de solution pérenne. Une réforme de la régulation est donc indispensable.
Ce texte prévoit un CSMP rénové de vingt professionnels, où les éditeurs ont une place importante au côté des messageries de presse. Il est adossé à une autorité indépendante, l’ARDP. L’architecture semble pertinente mais tout tient à l’équilibre entre ces deux instances. On peut ainsi s’interroger sur la légitimité de l’autorité de régulation à exercer son autorité sur le CSMP, qui doit sans doute être réformé mais doit rester l’instance principale de régulation : il est le dernier rempart contre la marchandisation. L’effacer, c’est introduire la concurrence dans le système coopératif avec, à la clé, la disparition des plus petits. Rien ne garantit que l’ARDP soit fidèle au principe de solidarité, tandis qu’on cherche à transformer le CSMP en coquille vide. De fait, les modifications apportées à l’article 4 portent une atteinte grave au système coopératif, ce qui risque de déstabiliser le modèle économique existant. La mise sous tutelle du CSMP, c’est la fin du système coopératif.
J’étais favorable au texte initial : les remaniements introduits en commission limitent et minorent le rôle du CSMP au profit de l’autorité de régulation, à laquelle est confiée une fonction de contrôle exorbitante. On entre dans un système de distribution administré par l’État : cela a un étrange parfum d’Union soviétique. Je réprouve un texte dangereux pour la liberté de la presse.