Intervention sur article : article 5 de la réforme des retraites.
Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes cher(e)s collègues,
Si nous devions choisir un sous titre à cet article 5 concernant "l’âge d’ouverture du Droit", nous pourrions écrire, Retraites, les Femmes payent le prix fort ! Tant cet article de report de l’âge de 60 à 62 ans s’inscrit dans la continuité des précédentes réformes de 1993 à 2003, où toutes ces dernières ont apporté malheureusement des réponses à la question, Comment les inégalités entre les Hommes et les Femmes se sont encore aggravées ?
En la matière, l’expérience des précédentes réformes que vous avez toutes conduites, mes chers collègues de la majorité, est édifiante tant elles ont amplifié les inégalités.
Les femmes ont de plus en plus de difficultés à valider 40 annuités au cours de leur carrière professionnelle, seuls 43% d’entre elles y arrivent, contre 86% pour les hommes.
Le COR a montré que pour la génération des personnes nées de 1963 à 1975, à l’âge de 30 ans, il y a déjà 2 trimestres de différence dans la durée d’activité en défaveur des femmes !
Les écarts de pensions entre les hommes et les femmes sont des gouffres, 827 euros en moyenne pour les femmes contre 1 426 pour les hommes. Ce montant pour les femmes est à mettre en perspective avec la part de pension de réversion qui sans elle, verrait cette moyenne diminuer à 790 euros.
Comment pouvez-vous imaginer qu’une femme puisse vivre dignement avec cette retraite ! Votre mépris pour les plus précaires inscrit dans votre réforme va aggraver encore plus, la situation des femmes.
Augmenter la durée de cotisations et porter l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans va accentuer le casse tête représenté par le calcul des pensions pour les femmes.
Les dispositions de cet article vont obliger toutes ces femmes aux carrières incomplètes à effectuer des choix terribles :
• pour celles qui ont un travail, elles devront travailler bien au-delà de 67 ans pour compenser la faiblesse de leurs pensions par des surcotes.
• pour les femmes au chômage, elles seront contraintes de vivre plus longtemps avec les minimas sociaux dans l’attente des 67 ans ou alors, prendre leur retraite avec des décotes importantes.
C’est un scandale, une double peine affligée à toutes ces femmes qui subissent déjà de profondes inégalités gravées dans notre société !
C’est justement cette société que nous refusons et dont nous dénonçons les modalités d’organisation, où le partage des richesses se fait entre quelques privilégiés et où les inégalités se creusent aussi vite qu’augmentent les profits des entreprises du CAC 40 !
Monsieur le Ministre, je vous propose de nous arrêter sur quelques grands constats :
Dés le début de l’activité professionnelle, des écarts d’emploi se font jour entre les hommes et les femmes qui sont plus touchées par le chômage et le temps partiel. Première injustice à laquelle s’additionne la discrimination salariale, avec un écart de salaire de 18% à 27%, toutes générations confondues. Comme je vous le disais, la note s’avère salée pour les femmes et votre réforme même amendée est insuffisante pour alléger les différences, alors qu’elle devrait répondre à 3 objectifs :
Le premier est de réduire les inégalités pendant la vie active en tenant compte, encore une fois de la réalité du quotidien des femmes, à commencer par l’éducation des enfants, les tâches domestiques qui reposent encore trop souvent sur elles seules. Tout cela pèse sur l’emploi, le salaire et la carrière des femmes.
La question de l’articulation de la vie professionnelle des femmes et des hommes avec la vie familiale reste donc entièrement posée, c’est le second objectif.
Le troisième objectif, le plus important, est de réintégrer dans les régimes de retraite, la question de l’égalité des genres.
Notre système de retraite par répartition, largement redistributif et correctif permet d’atténuer les aléas de la vie. Mais de ces corrections, vous n’en avez cure et vous leur opposez plutôt l’allongement de la durée de cotisations et la remise en cause des droits familiaux dans le public et le privé.
Le résultat de l’addition de toutes ces mesures injustes pénalise les femmes, dont la part parmi les nouveaux retraités concernés par la décote tend à s’accroître, passant de 41% en 2004 à 51% en 2007. De même, 3 femmes sur 10 doivent attendre l’âge de 65 ans pour compenser les effets d’une carrière incomplète et tenter d’accéder au bénéfice du taux plein.
Si les systèmes de retraites ne peuvent corriger toutes les inégalités professionnelles et sociales dont les femmes sont victimes, toutefois, ils ne peuvent les ignorer comme vous le faites avec beaucoup d’aisance, ni rejeter l’essentiel des correctifs à opérer sur la solidarité nationale.
Peut être préférez-vous, mes chers collègues de la majorité courir le risque de consacrer, au travers d’une dualité des mécanismes de retraites, une dualité sociale et de genre qui selon moi est inacceptable !
C’est bien pourquoi avec mon groupe, je m’opposerai à ce report de 60 à 62 ans de l’âge d’ouverture du droit à la retraite.