meeting du front de gauche à vaux le Pénil le 9 avril : intervention de Michel Billout

Publié le 10 avril 2009 à 14:25 Mise à jour le 8 avril 2015

Au travers des interventions des acteurs du mouvement social que nous venons d’entendre, nous voyons bien les implications des politiques de l’Union européenne sur la vie quotidienne des Français. Il est donc essentiel de peser véritablement, aujourd’hui, sur les choix européens mais si les institutions de l’UE peuvent nous paraître lointaines ou compliquées.

En tant que parlementaire, communiste, je vois chaque jour au sénat combien l’initiative européenne influence fortement notre vie.

Ainsi la plupart des textes législatifs présentés par le gouvernement sont directement des transpositions de directives européennes. ( pour être précis, près de 80 % de notre droit est d’origine communautaire).

Simple exemple, la majorité sénatoriale vient d’adopter le projet de loi sur le tourisme qui est censé rendre plus concurrentielles les activités économiques touristiques en France. Il s’agit en fait de la première mise en application de la tristement directive services, appelée par son inspirateur : Bolkestein.

Le mois dernier, nous avons voté la libéralisation complète du transport ferroviaire, imposée par les directives européennes.
Il en est d’ailleurs ainsi pour toutes les lois de libéralisations : celles concernant la poste, l’énergie, les télécommunications ... nous ont été imposées par les choix faits au niveau européen ;

Mais également, la durée légale du travail, les autorisations de culture des OGM, la protection sociale, le logement, tous ces secteurs sont conditionnés par le droit européen.

Malheureusement depuis la création de l’Europe de 1957 par le traité de Rome, l’unique volonté qui a guidé les différents gouvernement est de construire une Europe ultralibérale en faisant de la libre circulation des capitaux, du démantèlement des droits sociaux et des services publics les principaux objectifs à atteindre.

Est-ce une fatalité ?

Je ne le crois pas , comme l’ont montré la majorité des Français en mai 2005 en refusant de ratifier le projet de traité constitutionnel européen. Comme l’ont montré également les Néerlandais, puis plus récemment les Irlandais en rejetant le Traité de Lisbonne, copie conforme du projet de traité constitutionnel.

Et dans le prolongement, ces élections européennes du 7 juin prochain peuvent marquer un tournant dans les politiques menées au sein de l’Union, particulièrement dans le contexte où les sommets européens ont montré leur incapacité à développer une réponse cohérente et efficace à la crise économique qui frappe très durement les 27 pays de l’UE.

Car si l’on parle sans cesse de « Bruxelles », quand on évoque l’Europe, c’est pour créer une grande distance entre le lieu de prise de décision et les citoyens ou même les élus locaux ou nationaux. Les dirigeants Européens se méfient beaucoup de l’intervention citoyenne !

Il est fort commode, pour les majorités en place, d’accuser Bruxelles de tous les mots, s’étonnant parfois de la brutalité de certaines directives et règlements et se réfugiant derrière l’obligation de les mettre en application sous peine de sanctions financières ?
Mais les initiatives européenne ne viennent pas de fonctionnaires trop zélés de la commission de Bruxelles !
Tout d’abord c’est le Conseil Européen qui définit les grandes orientations, et il est composé des chefs d’Etats et de gouvernements. L’Allemagne et la France y tienne une place prépondérante. C’est le conseil de l’Union, qui réunit les ministres des 27 pays qui affine les propositions. La commission, certes puissante, ne fait que rendre techniquement applicables les orientations définies par les Etats.
Le gouvernement français joue donc un rôle important dans l’impulsion et la mise en œuvre des politiques de l’Union.

Ensuite, et c’est ce qui nous intéresse aujourd’hui, le Parlement européen, s’est vu au fil des années, attribuer de plus en plus de pouvoirs pour légiférer. La procédure de co-décision est aujourd’hui la règle dans 49 domaines sur 90.
C’est pourquoi, le choix que nous avons à faire pour désigner des parlementaires européens est essentiel.

La détermination du groupe GUE et notamment de son Président Francis Wutz que nous venons de voir dans la vidéo, montre bien l’utilité de se doter de parlementaires français au sein du Parlement européen pour porter la voix de ceux qui défendent une toute autre conception de l’Europe, sociale, solidaire, écologique. Une Europe de la coopération et des services publics. Une Europe pour la paix dans le Monde.

Le bilan de l’activité du GUE n’est pas à banaliser.

Des projets de directives importants ont été mis en échec grâce à sa mobilisation :
je citerai 3 exemples :
 la directive portuaire ( certes nous ne sommes pas très concernés ici en Seine et Marne, mais celle-ci portait un coup fatal à l’existence des dockers pour les remplacer par des ouvriers sans protection, à l’image de ce qui existe dans la marine marchande) ,
 la directive sur le temps de travail qui déterminait le principe de la semaine des 65 heures !
 échec également de la volonté d’inscrire le principe du pays d’origine dans la directive Bolkestein. Le principe même du Dumping social. Souvenez vous de l’image du plombier polonais. ( Mais, vigilance, ce principe revient par d’autres voies et risque d’être mis en œuvre juste après les élections).

Mais c’est surtout la détermination des parlementaires du groupe GUE associée à la force du mouvement social qui a permis de mettre en échec ces projets.

C’est pourquoi je pense très sincèrement que le Front de gauche que nous construisons témoigne de cette volonté de rassemblement le plus large possible pour poser les bases d’une Europe plus soucieuse des conditions de vie des Femmes et des Hommes que celle de la santé des grands groupes financiers.

On entend en ce moment qu’il faut réformer le capitalisme, le moraliser, mais sans toutefois changer fondamentalement ce système qui a pourtant lourdement failli et ruine des pays comme l’Islande, la Hongrie, la Lettonie, l’Irlande...

A coup de milliards, l’Union sauve les banques mais continue de refuser le droit aux Etats de fournir des aides aux services publics, de revenir sur le pacte de stabilité qui contraint les investissements publics ou de définir une véritable politique de coopération industrielle et de recherche, seule capable de préserver et développer l’emploi en Europe.

C’est toujours la règle du laisser faire ultralibéral qui prévaut SAUF quand il s’agit d’aller sauver les banquiers et les actionnaires qui auraient trop perdu au jeu de la bourse.
Cependant, comme en témoigne la décision de l’Etat français qui devient le premier actionnaire de BNP-Paribas tout en refusant de prendre sa place dans le CA, il n’est pas question de remettre en cause la gouvernance financière qui régit l’Europe et le Monde.
C’est pourquoi nous affirmons qu’il faut construire un nouveau système économique s’appuyant notamment sur les propositions formulées par le GUE et par le Front de gauche, parmi lesquelles :
1. Stopper les politique de libéralisation qui ont conduit partout à une dégradation des services et à une augmentation des tarifs pour satisfaire l’appétit des actionnaires 2. reconnaître l’importance primordiale des services publics, de la maîtrise publique pour garantir les droits fondamentaux des citoyens européens, et donc garantir l’accès pour tous à l’eau, à l’énergie, aux transports, à l’éducation, à la santé et à un vrai métier.
L’intérêt général ne peut en effet être respecté par les exigences de rentabilité extrême et de court terme des marchés financiers.
3. Refuser l’Europe forteresse mais bien au contraire contribuer plus efficacement à l’aide au développement, donner l’image d’une Europe des droits de l’Homme, une Europe pacifique et accueillante
4 .Harmoniser par le haut des législations sociales et fiscales
5. Abolir le principe de concurrence qui aboutit à un gâchis financier immense et à la précarisation accrue et développer le principe de coopération qui permet de partager les compétences et les savoirs dans le sens de l’intérêt général.
Pour cela, il faut proscrire définitivement le principe du pays d’origine qui conduit au dumping social, économique et environnemental
5. Créer un droit de contrôle plus exigeant des parlements nationaux sur les décisions prises par les ministres européens au sein du conseil de l’Union et un véritable droit d’initiative citoyenne ;
6. Soutenir l’emploi et l’industrie par des plans de relances industriels à l’échelle européenne, avec un véritable contrôle démocratique des fonds publics injectés ;
7 Placer la BCE sous contrôle du conseil et du parlement européen, abolir le pacte de stabilité et le principe de libre circulation des capitaux en créant notamment une taxe sur ceux-ci qui pourrait constituer une importante rectte pour un véritable budget européen.
....
Aujourd’hui, comme en 2005, les peuples peuvent s’exprimer pour une autre Europe, il faut se saisir de cette occasion et doter le parlement européen d’une majorité de changement pour jeter les bases d’une Europe démocratique, laïque, sociale et solidaire. Une Europe qui agit pour la paix, partout dans le monde.

Pour cela nous avons besoins de députés européens déterminés à changer la France, à changer l’Europe, à changer le Monde, des députés du Front de Gauche.

Michel Billout

Ancien sénateur de Seine-et-Marne
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