Soutien aux revendications du collectif départemental des propriétaires des maisons sinistrées de Seine et Marne

Publié le 24 septembre 2005 à 10:45 Mise à jour le 8 avril 2015

Sollicité par le président du collectif départemental des propriétaires des maisons sinistrées de seine-et- Marne, Michel Billout a répondu le 24 septembre 2005 sur l’ensemble de leurs propositions :

Monsieur le Président,

C’est avec un vif intérêt que j’ai pris connaissance de votre courrier porteur des propositions du collectif de propriétaires dont vous assurez la présidence.

Je souhaiterais, avant toute chose, vous dire combien j’apprécie votre investissement citoyen ainsi que celui des membres de votre collectif sur ce dossier, qui, j’en conviens, n’a pas encore trouvé de solutions satisfaisantes.

En effet, la proposition de loi débattue le 3 mai dernier au Sénat en première lecture aurait du permettre la définition de critères légaux plus précis pour la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et une meilleure transparence et une plus grande équité dans le traitement des demandes. Il a été, de fait, vidé de sa substance par la majorité parlementaire qui a proposé au vote un texte qui ne règle rien sur le fond.

Cette loi n’apporte en effet pas de solution permettant de faire réellement face aux risques climatiques que nous allons devoir supporter à l’avenir. L’Etat se réserve toujours le privilège de définir seul les critères caractérisant l’état de catastrophe naturelle au regard de la loi de 1982 et de faire évoluer ces critères selon la volonté de reconnaître ou non l’ensemble des zones sinistrées.

Coté indemnisation, le projet de loi conforte certes le rôle du fonds de prévention des risques - c’est une bonne chose - mais n’améliore pas les mécanismes financiers d’indemnisation. De ce fait, le principe de solidarité nationale sera difficile à appliquer tant que l’état refusera d’assumer ses engagements.

Dans le cas qui nous intéresse, 60% voire à 70% des 7 600 dossiers déposés par les communes demandant le classement en zone sinistrée auraient pu pourrait être supportés à par la Caisse centrale de réassurance, l’Etat ayant tout de même à supporter le complément. Cette situation a amené la commission interministérielle à définir limitativement les critères de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle afin de privilégier la défense des assureurs plutôt que celle des assurés.

Nous nous sommes heurtés à cette même démarche, lors du débat au sein de l’hémicycle. En effet, l’article 3 de ce texte stipule que la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle n’ouvre pas droit à indemnisation. Cet article revient de fait à faire peser la charge de la preuve sur les sinistrés. C’est inacceptable !

Cette disposition rendra nécessairement plus difficile la démarche individuelle des administrés envers leur compagnie d’assurances en vue d’être indemnisés, même s’ils sont les principales victimes de la catastrophe naturelle.

Pour aider les sinistrés, nous avons proposé et obtenu par un amendement la création d’une permanence juridique organisée par les préfectures qui, si l’assemblée nationale le vote dans les mêmes termes, sera mise en oeuvre dans chaque département pour répondre aux questions des sinistrés et, notamment, pour les alerter sur les délais de recours, qui restent souvent limités.

Cet amendement découle directement de notre refus de voir les sinistrés toujours plus démunis face au parcours du combattant que représentent les démarches qu’ils doivent effectuer auprès des assurances, une fois l’état de catastrophe naturelle reconnu. Face aux services juridiques expérimentés des sociétés d’assurance, nous estimons en effet que les particuliers doivent recevoir une aide pour les aider à faire reconnaître leur préjudice.

S’agissant de la prévention, je suis intervenu en séance pour réclamer des mesures drastiques à l’encontre des constructeurs non respectueux des règles de construction, notamment celles liées à la prise en compte des conditions géologiques locales.

Lors du débat parlementaire, nous avons donc déposé, avec les élus de mon groupe, un amendement pour que la prise en compte de la composition géologique des sous sols devienne un « critère déterminant » pour caractériser l’état de catastrophe naturelle. Celui-ci aurait en effet permis que soient reconnues des collectivités qui avaient effectivement été sinistrées par la sécheresse de l’été 2003. Nous n’avons pas été suivi et la majorité gouvernementale a rejeté cette proposition.

Pour toutes ces raisons, nous n’avons pu soutenir cette proposition de loi, estimant que malgré quelques avancées, son ambition restait insuffisante face aux besoins des sinistrés.

Ce manque d’ambition n’est pas nouveau : à l’issue de la canicule de l’été 2003, une réflexion approfondie aurait dû être engagée ainsi que le proposait l’Association des maires d’Ile-de-France. Ces derniers avaient en effet encouragé le Gouvernement à nommer un expert pour qu’une enquête sérieuse soit menée afin de définir de nouveaux critères plus adaptés pour caractériser la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.

Le groupe communiste, républicain et citoyen, au Sénat, avait demandé la création d’une commission d’enquête sur les conséquences de la sécheresse et la gestion de ses effets. Le Gouvernement et sa majorité parlementaire n’ont pas souhaité mener ce travail de fond. Rien d’étonnant donc à ce que cette proposition de loi aujourd’hui adopté ressemble à une coquille vide.

Certes, la proposition de loi a été adoptée au sénat. Cependant, elle doit désormais passer en première lecture à l’Assemblée nationale. Encore faut-il obtenir que le gouvernement accepte de mettre ce projet de loi à l’ordre du jour. Une fois ce débat obtenu, ce qui n’est pas certain car il n’est pas rare de voir « enterrer » certaines lois, nos collègues du groupe communiste à l’assemblée seront évidement sur les mêmes positions que celle que nous avons défendu le 3 mai dernier.

Sur le fond, vos propositions méritent d’être étudiés de près. Si le gouvernement et les députés de la majorité le souhaitent, elles peuvent être discutées en commission, faire, par exemple, l’objet d’auditions de l’ensemble des acteurs concernés (collectifs de propriétaires, constructeurs, assureurs, etc...). Au sénat, le gouvernement ne nous a pas donné les moyens d’effectuer ce travail pourtant nécessaire.

Ainsi, je vous invite à prendre attache auprès du groupe communiste, républicain et citoyen de l’Assemblée nationale et parallèlement à solliciter les députés de notre département pour qu’ils interviennent afin que cette proposition de loi soit discutée au sein de l’hémicycle et que la majorité parlementaire donne concrètement les moyens à la représentation nationale de débattre de ce sujet qui touche durement notre département.

Néanmoins, vous pouvez compter sur ma détermination pour continuer à soutenir votre démarche.

En espérant avoir répondu à vos attentes, je vous prie de croire, Monsieur le Président, en l’expression de mes sentiments les plus distingués.

Michel Billout

Ancien sénateur de Seine-et-Marne
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