Sinistrés de la sécheresse de 2003 : Michel Billout défend les laissés pour compte

Publié le 2 mars 2007 à 12:06 Mise à jour le 8 avril 2015

Le 2 mars 2007, Michel Billout est intervenu auprès du ministère de l’Intérieur pour revenir sur la situation de milliers de sinistrés de la sêcheresse de 2003 qui n’ont pas été pris en compte par le gouvernement au titre des catastrophes naturelles et n’ont donc reçu aucune indemnisation de la part des assureurs....

Monsieur le ministre,

J’ai pris récemment connaissance des propositions émanant de votre ministère relatives au développement durable et à la lutte de l’effet de serre. Je partage bien évidemment toute initiative visant à nous protéger et à lutter contre le réchauffement climatique.

Pour les habitants de mon département, les conséquences de ce réchauffement se sont traduites par de nombreux dégâts subies par leurs habitations lors de la sécheresse de l’été 2003.

Pourtant, le traitement des sinistres a été plus qu’arbitraire. Certaines communes ont vu l’état de catastrophe naturelle reconnu, d’autres pas, avec une valse de critères amenant à déclarer aux sinistrés non reconnus que « L’intensité anormale de la sécheresse 2003 n’aurait pas été démontrée » sur le territoire de leur commune.

De quelle intensité parle-t-on ? Comment expliquer, dans mon département, que les dommages constatés et reconnus par l’Etat dans la commune de Claye-Souilly ne le soient pas, dans le même temps, dans une commune proche, Villeparisis, alors qu’elles sont situées sur le même terrain géologique et que dans les deux cas, les mouvements de terrains ont entraîné des fissures anormales dans de nombreux bâtiments publics et propriétés privées ?

Les explications sont pourtant connues et non rien de spécifique à ce département : dans toute la France, de multiples habitations, principalement des maisons individuelles mais aussi des bâtiments publics ont réagi au phénomène de « retrait gonflement des argiles » car édifiés pour la plupart avec des techniques de construction inadaptées à des sols sensibles aux variations climatiques, très répandus en Seine-et-Marne.

Un collectif réunissant près de 50 % des communes laissées pour compte en Seine-et-Marne, représentant un bassin de plus de 260 000 habitants s’est constitué et a relevé depuis l’été 2003, sur les différents territoires concernés, des fissures en façade, des décollements entre différents corps d’ouvrages, des affaissements de dalle, des dislocations de cloison, des distorsions de portes et fenêtres. Malgré cela, « L’intensité anormale de la sécheresse 2003 ne serait toujours pas démontrée ».

Face à ces injustices, inspirées par un souci d’économies budgétaires, une nouvelle proposition de loi a été adoptée par la majorité parlementaire en juin 2005, ne réglant rien sur le fond du problème : l’Etat se préserve le privilège de définir l’intensité de la sécheresse et de modifier à tout moment les critères d’évaluation et de classement des zones sinistrées sans apporter, par ailleurs, une quelconque réponse à la nécessité de pérenniser le fonds d’indemnisation concerné.

Pire, cette loi affirme que « la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle ne constitue pas une présomption de droit à indemnisation ! ». Une mesure qui a sans doute été bien perçue à l’époque par les assureurs mais qui reste inacceptable pour les assurés, justement inquiets dans mon département par les risques d’une nouvelle sécheresse pour l’été 2007, les restrictions de consommation d’eau étant déjà en place depuis le mois de février sur une partie de ce département.

Depuis cette loi, la mission d’enquête sur le régime d’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles a rendu son rapport, en septembre 2005. Pour elle, le système a atteint ses limites : « le cadre juridique imprécis et fragile du dispositif Catnat de même que le recours insuffisant à une expertise scientifique incontestable pour définir et caractériser les catastrophes naturelles placent les pouvoirs publics dans une situation de plus en plus délicate. » Et ce même rapport de rappeler que « le risque Catnat a été jusqu’à présent globalement rentable pour les assureurs », même si « la marge qu’il a dégagée s’est fortement réduite depuis 1992 ».
Quant à l’état : « il a lui aussi tiré globalement de l’activité Catnat des recettes non négligeables (sous forme de dividendes versés par la CCR et de rémunération de la garantie accordée à celle-ci) et des plus values potentielles appréciables ». Et j’en finirai avec ce rapport en reprenant une de ses conclusions : « L’organisation institutionnelle du régime doit être aménagée pour rendre sa gestion plus rigoureuse et plus transparente. » Depuis 2005, pourtant rien n’a bougé.

J’estime que sur ce dossier, le principe de solidarité nationale a été bafoué, plusieurs centaines de communes étant encore en attente, en France, d’être prises en compte, malgré la procédure d’aide exceptionnelle hors CATNAT mise en place en juin dernier par votre gouvernement.

En Seine-et-Marne, cette procédure est en effet loin d’avoir répondue aux attentes. Seuls 44% des dossiers ont été retenus. Et lorsqu’on rentre dans les détails, on s’aperçoit que les heureux élus ne toucheront, en réalité qu’une aide à hauteur de 70 % du coût total de l’opération de confortation de leur demeure qui permettrait de na pas subir de nouveaux sinistres.

Pour une seconde catégorie de bénéficiaires (les communes non limitrophes de celles classées), ils ne recevront que 20% du montant nécessaire pour financer la totalité des travaux destinés à assurer la pérennité des ouvrages sinistrés.

56% des demandeurs d’indemnités ne recevront rien, y compris si leurs préjudices sont importants. Il est à ce titre inadmissible que des dossiers qualifiés d’incomplet où arrivés après la date de dépôt aient été rejetés sans que des motifs de refus soient motivés sur le fond.

Cette disposition, mise en place pour palier un dispositif CATNAT injuste a été appliqué avec le même manque de transparence, en produisant de graves disparités.

Pour palier à ce manque de transparence dans l’application des critères de reconnaissance de catastrophe naturelle, le groupe CRC auquel j’appartiens avait proposé en juin 2005, sous forme d’amendement, la création d’un conseil national des catastrophes naturelles en substitution à la commission interministérielle. Nous avions notamment proposé que ce Conseil soit composé de représentants de l’Etat, désignés par les ministres chargés de la sécurité civile, de l’économie et des finances, du budget et de l’environnement, de représentants des collectivités locales désignés par l’association des maires de France, de représentants des assurés nommés sur proposition du collège des consommateurs du Conseil National de la Consommation, et de représentants des assureurs nommés sur proposition des organismes professionnel.

Cette composition aurait permis de garantir que l’ensemble des intérêts en cause soit pris en compte, et notamment celles des familles que je côtoie dans mon département, confrontées à une situation de désarroi face à la destruction de ce qui est souvent le sacrifice de toute une vie de labeur. Elles se retrouvent abandonnées sans protection aucune.

Cette situation étant consécutive de l’inaction de votre gouvernement, je souhaiterai donc connaître, monsieur le ministre, les dispositions que vous comptez prendre pour rétablir une justice et une équité de traitement entre les différentes catégories de sinistrés.

Dans cette attente, je vous prie de croire, monsieur le ministre, en l’expression de ma plus haute considération.

Michel Billout
Sénateur de Seine-et-Marne
Maire de Nangis

Michel Billout

Ancien sénateur de Seine-et-Marne
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