Fête de l’Humanité Bretagne

Ensemble, changeons le cap, redonnons de l’espoir !

Publié le 4 décembre 2014 à 16:37 Mise à jour le 8 avril 2015

Mesdames, Messieurs,
Chers Camarades, chers Amis,

Quel plaisir de vous retrouver ici à l’occasion de cette belle fête de l’Humanité Bretagne.
Pour commencer, j’emprunterais les mots de Jean-Pierre Claris DE FLORIAN qui, à la Révolution déclarait à la tribune de la toute nouvelle République :
« Les noix ont fort bon goût, mais il faut les ouvrir. Souvenez-vous que dans la vie, sans un peu de travail, on n’a point de plaisir ! »
A priori, le Gouvernement et la majorité actuelle n’ont pas encore trouvé où était rangé le casse-noix mais ils ont parfaitement su décortiquer notre modèle social, né de la Résistance et du programme du CNR qui avait permis de grandes avancées sociales et démocratiques.
Une belle occasion, malheureusement ratée, d’accomplir de grandes réformes pour la collectivité, pour le peuple que celle du Sénat à gauche. Lorsque j’ai été élu, jeune Sénateur en 2011, je me réjouissais d’appartenir à une Assemblée qui pour la première fois, s’inscrivait à gauche et j’ai été fier d’avoir contribué à ce bouleversement.
Trois ans plus tard, cette dernière bascule à droite très largement et le Front national y fait son entrée. Quelle désolation !
Ça n’a pas été une surprise, car les dernières élections municipales ont été une vraie déroute électorale pour le Parti socialiste dont la politique d’austérité, de renoncement aux valeurs de progrès et de justice sociale a été sanctionnée par les citoyens.
Aujourd’hui, de nombreux grands électeurs, élus locaux pour la plupart, ont exprimé leur refus d’une réforme territoriale qui poursuit la logique de démembrement de la République et du service public que Nicolas Sarkozy n’aurait pas renié. Alors que nous avions été élus au Sénat en 2011, pour défendre les territoires, écouter les élus locaux, développer la démocratie locale et les services publics de proximité.
Les électeurs ont exprimé leur refus, leurs inquiétudes face aux réductions budgétaires drastiques : 11 milliards d’euros en 3 ans, imposées aux collectivités territoriales au nom de l’austérité. Une baisse totale de 30% de la DGF en 4 ans. Les contraintes budgétaires obligent les élus à des choix difficiles et à réduire leurs projets d’investissements alors qu’ils ont pour mission d’assurer des services publics quotidiens, à l’image de la désastreuse réforme des rythmes scolaires.
Là encore, nous pouvions créer les conditions de la réussite de cette belle idée républicaine ; faire que tous les élèves s’épanouissent dans une école dotée des moyens nécessaires et d’enseignants bien formés…
C’est une occasion manquée car mal préparée et insuffisamment financée par l’Etat qui s’est déchargé sur les communes. Cette réforme a creusé le sillon de l’inégalité territoriale et a accru le mécontentement des élus et des citoyens. C’est la démonstration que l’on peut enterrer une très belle idée si elle n’est ni bien préparée, ni bien financée.
Le réel objectif de cette cure de restrictions des dépenses et de la réforme territoriale est de réduire l’emploi public et de donner des garanties à la Commission de Bruxelles, toujours avec la menace de la dette.
Alors que nous avons besoin de plus de démocratie, on éloigne les citoyens des lieux de décisions et de leurs élus. Voilà le résultat de cette addition de moins. Moins de budget, moins de subventions, moins de vision d’une société plus juste et égalitaire, moins de droits pour tous…. En bas de la note, qui se frotte les mains en attendant de récupérer le montant des déceptions si ce n’est le front national !
Les dispositions actuellement en discussion du budget 2015 ne font qu’enfoncer le clou :
Pour mieux comprendre la logique gouvernementale, deux chiffres suffisent. 75 milliards d’euros, c’est les recettes attendues de l’impôt sur le revenu pour 2015 payé par tous. 56 milliards d’euros, c’est le montant de l’impôt sur les sociétés. Presque 20 milliards d’euros d’écart entre des contribuables déjà exsangues et des grands groupes financiers pour qui impôt rime avec cadeaux fiscaux et retraites chapeaux.
Tout budget nécessite des ajustements, le plus souvent à la hausse pour le contribuable, et ça, François Hollande le sait mieux que quiconque, lui qui a pourtant annoncé une promesse de baisse des impôts.
Pour nous, l’impôt doit servir à la fois au financement des besoins de la population, à la correction des inégalités et au développement économique durable. Il est le levier principal pour l’action collective. C’est l’outil de développement et de justice sociale, c’est là tout son sens qu’il convient aujourd’hui de réhabiliter si nous voulons combattre la crise et ouvrir le chemin de l’espoir pour notre jeunesse et notre peuple.
S’y soustraire, c’est refuser de financer l’école, la santé ou encore le logement, l’ensemble des services publics, les loisirs et la culture.
Il faut une véritable action pour réduire les inégalités et les privilèges. Cela passe par une lutte sans concession contre l’évasion fiscale et la fraude fiscale massives, organisées et générales.
La justice fiscale ne peut se concevoir sans nouvelle répartition des richesses, sans lutte pour le plein emploi, sans augmentation du pouvoir d’achat et enfin, sans s’attaquer au capital. Ce chantier n’a pas été entamé ni à l’Assemblée Nationale, ni au sénat, malgré nos propositions comme celle contre les licenciements boursiers par exemple. Cette dernière avait été votée par l’ensemble de la Gauche sénatoriale mais la majorité de gauche à l’Assemblée Nationale se refuse à l’inscrire à son ordre du jour.
Le capital, ou « l’ennemi invisible » selon le candidat François Hollande, voilà le moteur du véritable désastre économique et social que traverse notre pays.
La filière agroalimentaire bretonne illustre parfaitement cette situation. Elle est frappée par ce système à bout de souffle qui conduit à la faillite d’entreprises et aux licenciements massifs et abusifs. Ce qui s’appelle de la compétitivité représente pour nos concitoyens, une réalité tragique à l’opposé d’une visée humaniste.
Au sénat, le ministre Macron répondant à mes questions, commençait à se réjouir de la baisse du coût horaire du travail !
Mais il n’y a pas de fatalité ! Nous devons engager la bataille de la ré-industrialisation et notamment agroalimentaire. Son avenir passe par une juste rémunération du travail des salariés et le soutien à de filières de production relocalisées.
Ouvrir la voie des solutions à la crise suppose le courage de changer de cap. Sur le plan économique, cela implique au moins trois axes :
► Diminuer les coûts exorbitants du capital (dividendes, exonérations, retraites chapeaux, CICE...). ce ne sont pas les modestes salaires qui nous mènent au chaos.
► Affronter la domination des marchés financiers et engager le combat pour modifier certaines règles européennes.
►Fonder un nouvel essor économique sur les moteurs du progrès social et de la transformation écologique et démocratique du mode de production et d’échanges.

Aujourd’hui, la compétitivité est sans limite. La réforme des collectivités menée simplement pour assurer les conséquences du CICE, va accélérer ce mouvement de concurrence entre les territoires. C’est un transfert de ressources du public au privé.
Mais la vraie compétitivité consisterait à réformer pour plus de justice, à donner la parole au peuple, notamment pour la réforme territoriale, à simplifier pour plus d’égalité, à engager des politiques sociales ambitieuses dans le sens de plus de justice.
Il existe dans le pays une majorité de femmes et d’hommes disponibles pour une autre politique, des forces syndicales, sociales, associatives, politiques. Les rassembler pour construire ensemble, c’est ce à quoi veut se consacrer le Parti communiste français. Au Sénat, nous n’avons pas réussi à concrétiser notre rêve.
Dans cette situation nouvelle, nous devons porter l’espoir d’une politique alternative de gauche qui, elle seule, permettra de résister à la poussée de la droite et de l’extrême droite lors des prochaines échéances électorales.
D’autres choix sont possibles. Nous ne sommes pas condamnés à l’austérité permanente et à l’insécurité sociale et au chômage de masse. Il faut mettre en œuvre une politique qui parte des besoins sociaux, qui s’attaque aux inégalités et à la finance et surtout ne pas se soumettre au diktat de Bruxelles. Nous devons changer l’Europe et la BCE.
Notre terre bretonne maritime a vu tant de marins se battre contre les roulis de la mer :
Alors, hissons les voiles, larguons les amarres, et fixons nous un vrai changement de cap !
Je vous remercie pour votre attention.

Michel Le Scouarnec

Ancien sénateur du Morbihan
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