Enfermement d’enfants Afghans au Mesnil Amelot : Michel Billout intervient auprès du ministre de l’intérieur

Publié le 1er octobre 2012 à 17:07 Mise à jour le 8 avril 2015

Monsieur le ministre,

Je souhaite vous faire part de ma réprobation concernant le traitement réservé à un couple afghan et ses deux enfants sur notre territoire.

La famille Khoja a déposé une demande d’asile en France, après une première demande identique en Hongrie. Je n’ignore pas que les accords européens prévoient, dans ce cas, que c’est le pays de première entrée qui traite la demande. Cependant, la Hongrie, comme dans beaucoup de domaines ne respecte pas les accords internationaux.

Ainsi elle a fait l’objet d’observations de la part du Haut commissariat aux réfugiés de l’ONU en avril dernier.

Et, déjà en décembre 2011, le Comité Helsinki Hongrois déclarait que la Hongrie ne garantissait pas des conditions d’accueil appropriées et un accès à la protection pour les demandeurs d’asile renvoyés dans ce pays dans le cadre de la procédure Dublin2 :

"En règle générale, les demandeurs d’asile renvoyés en Hongrie sous Dublin reçoivent un avis d’expulsion dès leur arrivée dans le pays, sans que soit prise en considération leur volonté de déposer une demande d’asile ;"

" Une majorité de dublinés sont placés en rétention suite à une décision d’expulsion systématiquement rendue à leur encontre, sans que leur situation personnelle ne soit prise en considération, ou qu’une alternative à la rétention ne soit envisagée ;"

"Le contrôle qu’exerce le pouvoir judiciaire sur la rétention des immigrés est inefficace, et le placement en rétention est quasi-systématiquement prolongé ;"

Par conséquent, si cette famille est renvoyée en Hongrie, elle risque d’être expulsée sans que son dossier ne soit examiné. Pourtant, le père et le frère de M. Khoja ont été assassinés en Afghanistan. Ce drame a provoqué la fuite de la famille qui est arrivée en France après 10 mois de pérégrinations. Il existe donc de très grands risques pour leur vie s’ils retournent en Afghanistan. Leur demande d’asile doit donc être traitée en France.

S’appuyant sur la circulaire du 6 juillet 2012 relative à la rétention des familles, le préfet de la Sarthe n’a pas souhaité tenir compte de cette réalité et décidé, vendredi dernier, le placement en centre de rétention administrative de cette famille pour être en mesure de leur faire rejoindre la Hongrie lundi matin. Pourtant, l’enfermement de cette famille et de ses deux enfants âgés de deux mois et demi et trois ans, n’est pas conforme aux engagements pris par le chef de l’état. François Hollande avait en effet promis, pendant la campagne présidentielle, de mettre fin à l’enfermement des enfants en centre de rétention, pratique pour laquelle, faut-il le rappeler, la France avait été condamnée en janvier 2012 par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH).

D’ailleurs, le médecin du centre ayant jugé l’état de santé des enfants "incompatible avec la rétention", il a été mis fin à la rétention de la famille qui a été assignée à résidence. Ils sont maintenant gardés dans un hôtel de Noisiel (Seine-et-Marne). Un recours a été déposé devant le tribunal administratif de Melun. Ce dernier n’est certes pas suspensif mais il serait choquant que la justice ne puisse s’exprimer faute de plaignants puisqu’ils peuvent être expulsés à tout moment.

Monsieur le ministre, au vu de ces éléments, je souhaite que la demande de droit d’asile de cette famille soit examinée dans notre pays et qu’il soit mis fin une fois pour toute à l’enfermement des enfants dans ce type de procédure, conformément aux engagements du président de la République.

Dans l’attente d’éléments de réponse de votre part, je vous prie d’agréer, Monsieur le ministre, l’expression de ma haute considération.

Michel Billout

Ancien sénateur de Seine-et-Marne
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