Jamais une réforme n’aura mobilisé contre elle un tel front de mécontentement : magistrats, avocats, personnels de la justice, élus, citoyens. Il est vrai que cette réforme tant vantée par la Ministre de la Justice consiste à fermer 319 tribunaux et a été décidée sans concertation.
Le Parlement lui-même n’a pas été consulté. Certes, du point de vue strictement juridique, la réforme de la carte judiciaire ne relève pas de la loi, mais il est inconcevable qu’un tel bouleversement se fasse au mépris de la représentation nationale.
S’il est vrai que la carte judiciaire date de 1958, le nombre de magistrats n’a pas non plus bougé depuis lors. La France n’est qu’au 23ème rang des pays européens pour le budget consacré à la justice. Les 4,5 % d’augmentation de 2008 n’y changeront pas grand-chose : se situer au niveau de l’Allemagne suppose de doubler ce budget. Or, même la loi de programmation de la justice de 2002, pourtant loin du compte, n’est toujours pas appliquée.
Que le pays et la démographie aient changé depuis 1958 : c’est évident. Mais toute modification doit se faire avec l’objectif d’un meilleur accès des justiciables à la justice et au droit. Or, c’est précisément l’inverse que décide la Garde des Sceaux : ce sont les tribunaux de proximité qui seront les plus touchés.
L’éloignement va rendre l’accès à la justice - et notamment celle du quotidien - beaucoup plus difficile pour les justiciables. Il va générer pour eux des coûts supplémentaires : coût des déplacements, coût des avocats...
Des organisations de professionnels, d’élus... demandent au gouvernement de surseoir à la réforme et d’organiser des Etats généraux de la justice. C’est en effet la seule garantie d’une véritable mise à plat des besoins et des moyens.