Expulsion des gens du voyage installés à Vitrolles

Publié le 16 février 2004 à 17:40 Mise à jour le 8 avril 2015

Lettre de Robert Bret et réponse du Préfet des Bouches-du-Rhône

Monsieur le Préfet,

Je souhaite, par la présente, appeler votre attention sur les difficultés d’application de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage et modifiant la loi de 1990.

Vous le savez, la loi « Besson » de 1990, devait favoriser la mise en place de schémas départementaux et obliger toutes les communes de plus de 5000 habitants à réserver des terrains aménagés pour l’accueil des gens du voyage afin d’éviter les stationnements sauvages. Or, faute de n’avoir prévu en contrepartie de cette obligation ni délai ni sanction, il en est résulté, dix années plus tard, une pénurie d’aires d’accueil dans de nombreuses communes et la multiplication des implantations illégales, mettant en exergue la nécessité de modifier la législation.

Pour pallier les carences de la loi de 1990, la loi du 5 juillet 2000 précitée est venue renforcer l’obligation pour les communes de plus de 5000 habitants de créer des aires d’accueil en leur imposant cette fois-ci des délais et des sanctions en cas de non-respect :
* Les schémas départementaux doivent être approuvés dans les 18 mois suivant la publication de la loi. A défaut, le préfet peut seul approuver ce schéma.
* Les communes disposent ensuite d’un délai de deux ans à compter de la publication du schéma départemental pour réaliser les aires d’accueil. A défaut, le préfet dispose d’un pouvoir de substitution face aux communes défaillantes. Dans ce cas, les communes ne peuvent bénéficier des aides financières de l’Etat.

Malgré ces nouvelles dispositions législatives, force est de constater, aujourd’hui encore, qu’à défaut d’aires de stationnement en nombre suffisant, les stationnements illicites perdurent au grand dam des habitants, des élus et des gens du voyage eux-mêmes.

S’agissant du département des Bouches-du-Rhône, pouvez-vous, Monsieur le Préfet, m’indiquer quelles sont les villes figurant dans le schéma départemental qui ont rempli leurs obligations en matière d’aménagement d’aires d’accueil et celles qui ne l’ont pas encore fait ? Pour ces dernières, envisagez-vous de vous substituer à elles comme la loi vous y autorise ?

Concernant la Ville de Vitrolles par exemple, faute d’avoir aménagé de telles aires d’accueil sur son territoire, elle ne peut pas en principe bénéficier des contreparties prévues par la loi dont celle qui consiste à disposer de pouvoirs accrus pour interdire tout stationnement en dehors des aires d’accueil.

Pourtant, la semaine dernière, suite à une ordonnance du président du TGI d’Aix-en-Provence, vous avez requis les forces de l’ordre pour expulser des gens du voyage installés sur un terrain appartenant à cette commune.

Or cette ville, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, en ne respectant pas ses obligations légales favorise les installations sauvages sur son territoire alors que si elle avait mis en place une politique d’accueil adapté elle aurait limité ce genre de situations.

Il ne faut pas, à mon sens, encourager de tels comportements mais au contraire réserver l’intervention de la force publique aux communes ayant mis des aires à disposition de façon à inciter toutes les villes de plus de 5000 habitants à en faire autant. C’est le seul moyen d’empêcher les stationnements illégaux.

Le 5 juillet prochain, la loi du 5 juillet 2000 aura 4 ans d’existence, il serait intéressant à cette occasion de faire un bilan de l’application effective de cette loi dans chaque département : descriptif du schéma départemental ; nombre d’aires de stationnement ; conditions et capacité d’accueil ...

Dans l’attente de vous lire,

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Préfet, l’expression de ma considération distinguée.

Réponse du Préfet des Bouches-du-Rhône (16/03/04) :

Monsieur le Sénateur,

Par lettre du 16 février 2004, vous soulignez les difficultés de mise en oeuvre du schéma départemental d’accueil des gens du voyage dans les Bouches-du-Rhône.

J’ai l’honneur de vous faire connaître qu’à ce jour, certaines communes ont formulé, soit isolément, soit en intercommunalité, des propositions d’implantation d’aires d’accueil. Ces dossiers sont actuellement en cours d’instruction par les services de l’Etat.

Il apparaît, d’ores et déjà, que certains des sites envisagés présentent des inconvénients majeurs, susceptibles d’entraîner un avis défavorable de ma part.

C’est notamment le cas de la commune de Vitrolles dont le terrain dit "Les Bagnols" ne remplit pas les critères requis par la loi pour une telle installation. Cette commune a été informée, par la communauté d’agglomération du pays d’Aix-en-Provence, compétente en matière d’accueil des gens du voyage, qu’elle devait sans tarder proposer un autre site d’implantation.

Dans l’attente d’une proposition recevable et de sa réalisation, l’application des dispositions de l’article 53 de la loi pour la sécurité intérieure relève de l’appréciation souveraine du tribunal de Grande Instance d’Aix-en-Provence.
Souhaitant avoir répondu à vos préoccupations, je vous prie d’agréer, Monsieur le sénateur, l’expression de ma haute considération.

Robert Bret

Ancien sénateur des Bouches-du-Rhône
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