Comment le gouvernement resserre l’étau sur les étrangers présents en France

Publié le 16 janvier 2008 à 11:44 Mise à jour le 8 avril 2015

En ce tout début d’année 2008, je souhaite revenir sur la récente actualité en matière d’immigration qui ne fait que renforcer la politique menée par le gouvernement français depuis 2002. Je souhaite ainsi dénoncer le sort réservé aux étrangers présents en France sur lesquels l’étau se resserre dangereusement. Ils ne sont pas les bienvenus en France ; toute personne leur témoignant, à quelque degré que ce soit, sa solidarité, son soutien, n’est pas mieux considérée.

Cette politique, c’est bien sûr celle issue du durcissement de notre législation suite aux réformes successives de 2003, de 2006 et, tout récemment encore, celle de 2007 de M. HORTEFEUX à propos de laquelle il convient de noter l’avis critique rendu par la Halde le 15 janvier 2008 qui a jugé certaines de ses dispositions non conformes aux conventions internationales dont celle qui instaure les tests ADN dans le dispositif du regroupement familial.

Mais c’est aussi la mise en place du fichier ELOI pour mieux ficher les étrangers, leur famille voire leurs hébergeants ; c’est la vérification systématique des titres de séjour lors de l’embauche ou de l’inscription à l’ANPE ; c’est la multiplication des poursuites judiciaires à l’encontre de personnes qui apportent leur solidarité à des hommes, des femmes et des enfants en détresse, et qui constitue une criminalisation de l’action militante et citoyenne ; c’est la mise en place de quotas pour mieux répondre aux besoins patronaux dans certains secteurs économiques en mal de main d’œuvre tout en faisant le tri toutefois entre européens et non européens ; ce sont les objectifs chiffrés en matière d’expulsion du territoire qui occultent le fait que derrière ces chiffres il est question d’hommes, de femmes, d’enfants ; c’est la notation de M. HORTEFEUX en fonction du nombre d’expulsions effectivement réalisées ; c’est l’augmentation du nombre de places dans les centres de rétention qui sont de vraies machines à expulser du territoire ; c’est le projet de mise en place d’un seul ordre juridictionnel pour traiter le contentieux de l’entrée, du séjour et de l’éloignement des étrangers, afin d’éviter que les décisions prises par les juges des libertés et de la détention, qui annulent plus du tiers des procédures d’éloignement, viennent perturber les expulsions ; c’est également le projet qui consiste à faire en sorte que l’Etat soit systématiquement représenté lors des audiences devant le juge des libertés et de la détention, etc. etc.

Cette politique d’immigration menée dans un contexte d’objectifs chiffrés mis en avant comme critère d’efficacité est une aberration. Elle est à l’origine de situations dramatiques : multiplication des contrôles au faciès, défenestrations en série, parfois mortelles, consécutives à des contrôles de police ; placement en rétention administrative ou en zone d’attente de personnes qui n’ont rien à y faire et qui auraient dû être régularisées ; multiplication des poursuites judiciaires pour délit de solidarité ou entrave à la circulation d’un aéronef ...

Il faut savoir que ces objectifs - inhumains - sont impossibles à atteindre et ne servent qu’à manipuler l’opinion publique pour lui laisser croire que le gouvernement agit. Y compris chez les policiers, le malaise grandit face au rôle que leur hiérarchie veut leur faire jouer en matière d’expulsion du territoire.

Cette politique d’immigration -dangereuse pour les droits de l’homme- est à mettre en perspective avec la Présidence française de l’Union européenne à compter du 1er juillet 2008 dont les objectifs sont très préoccupants.

En effet, M. SARKOZY ne cache pas son souhait de profiter de cette occasion pour « harmoniser » la régulation des flux migratoires. Ce qui passera entre autre par l’instauration d’un régime européen de l’asile dont l’objectif consistera sans nul doute à restreindre encore les délais de recours, les délais de jugement etc. ; d’un pacte européen sur l’immigration pour affirmer le refus des régularisations massives, l’approbation des accords de réadmission... ; ou encore d’un délai de rétention administrative pouvant aller jusqu’à 18 mois, ... Sans parler de l’accroissement du nombre de vols groupés européens, de la multiplication des « camps de réfugiés » aux portes d’une Europe de plus en plus forteresse, etc.

C’est dans un tel contexte que RESF 93 organise, le 19 janvier prochain, une journée nationale d’action devant les centres de rétention administrative du Mesnil-Amelot et de Vincennes.

Pour ma part et en ma qualité de parlementaire, je participerai à cette initiative qui s’inscrit dans le cadre de la Journée européenne de mobilisation contre l’enfermement des étrangers.

Ma présence ce jour-là au centre de rétention administrative du Mesnil Amelot (entre 10 heures et 13 heures) sera l’occasion de témoigner aux personnes ainsi retenues -qui se sont mobilisées pour attirer l’attention sur leur situation- mon entier soutien et dénoncer les effets pervers du durcissement de la législation française qui mène des gens, autrefois régularisables, dans ces centres de rétention.

Éliane Assassi

Sénatrice de Seine-Saint-Denis - Présidente du groupe CRCE
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