Charles Pasqua nostalgique de la peine de mort

Publié le 27 octobre 2006 à 16:11 Mise à jour le 8 avril 2015

Cinquante sénatrices et sénateurs UMP, Charles PASQUA en tête, viennent de déposer une proposition de loi portant à 30 ans la période de sûreté pour « les crimes les plus odieux ».

Certes, ils ne font que prêter main forte au gouvernement qui a annoncé qu’il ferait voter par sa majorité une nouvelle aggravation pénale par amendement à la loi Sarkozy sur la prévention de la délinquance. Mais ils le font par un véritable réquisitoire pour le rétablissement de la peine de mort. On peut lire en effet dans leurs propos que « L’abolition de la peine de mort en 1981 pêchait par excès d’optimisme ou par sensibilité à sens unique, c’est-à-dire dans la seule considération de la clémence envers les criminels », que « l’abolition procédait d’une vision doctrinaire et irréaliste, selon laquelle l’individu ne serait pas responsable de ses actes » ou encore que « l’abolition de la peine de mort aura été reçue, en fait, comme une incitation à l’assassinat par des délinquants ».
De tels propos obscurantistes et dangereux sont indignes de parlementaires de la République.

Doit-on leur rappeler que l’expérience de tous les pays abolitionnistes montre que l’abolition de la peine de mort est sans effet sur la criminalité ? Doit-on leur rappeler que la cause de l’abolition de la peine de mort est universelle ? Elle est un progrès de civilisation parce qu’elle consacre le refus de la société de répondre au crime par un crime d’Etat. Elle est une avancée pour la justice qui se débarrasse ainsi des scories de la « loi du Talion ».

Doit-on leur rappeler que le rejet de la peine de mort est consacré par la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948, que depuis 1982, par le protocole n° 6 à la Convention européenne des droits de l’Homme, le Conseil de l’Europe a interdit aux pays membres, la peine de mort en temps de paix. La France est signataire de ce texte. En 2002, le protocole n°13 a interdit la peine de mort en toute circonstance ; le Président de la République Jacques CHIRAC s’est engagé à le ratifier.

Doit-on rappeler qu’il y a 25 ans, le gouvernement de l’époque et la majorité des parlementaires ont fait le choix courageux de l’abolition de la peine capitale, en dépit de l’opinion publique et qu’aujourd’hui, la majorité des Français approuvent ce choix.

Aussi est-il particulièrement grave que cinquante sénatrices et sénateurs UMP, pour justifier la spirale sans fin de l’aggravation pénale à laquelle se livrent le gouvernement et sa majorité, incapables de répondre aux aspirations de notre peuple, attisent les peurs et les agressivités de notre société profondément en crise.

Nicole Borvo Cohen-Seat

Ancienne sénatrice de Paris et présidente du groupe CRC

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